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ULTHA – The inextricable wandering

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Formé il y a à peine cinq ans à Cologne, Ultha est en passe de devenir une influence certaine pour le devenir du black metal moderne. Chris Noir (basse et chant), Ralph Schmidt (guitare et chant), Manuel Schaub (batterie), Andreas Rosczyk (électronique) et Ralf Conrad (guitare) n’y vont pas de main morte dans le débit de leur production discographique, qui en est déjà à un troisième album long format, deux EPs, quelques singles partagés avec d’autres groupes et même un album live capté au mythique festival Roadburn en 2017.

Parmi ces disques, il y a “Converging sins” (2016), l’album qui a fait connaître Ultha dans les milieux autorisés du black metal. Il n’y avait que cinq morceaux sur cet album, mais ils tenaient en majorité des durées très longues, avec trois morceaux de plus d’un quart d’heure. Ultha y développait un black metal atmosphérique très soigné dans ses introductions, distillant une science consommée de la tristesse et de la mélancolie, croisant parfois le chemin d’un doom funéraire déchirant de dépression. Bref, on n’était plus dans les singeries sataniques de Cradle Of Filth ou Immortal, mais on touchait à du grandiose, du sérieux. S’il fallait tenter une comparaison avec un groupe plus ancien, on pourrait penser à Emperor, par exemple.

“Converging sins” avait tellement bien fait le travail de séduction qu’il a fini par attirer l’attention du label Century Media, l’un des derniers grands défenseurs d’un métal de qualité, la fois avant-gardiste et classique. L’encre du contrat d’enregistrement à peine sèche, Ultha s’est fendu de ce troisième album “The inextricable wandering”. On retrouve les atmosphères ébauchées dans le précédent album, avec de nouveau des titres longs (sept minutes pour le plus court, 19 minutes pour le plus long) qui permettent le développement de grandes fresques progressives, où une dramaturgie sonore s’exprime pleinement. Le chant est aigu mais clair, les rythmiques assez complexes, avec cette coexistence entre les cognements ultra-rapides de la batterie et un contre-rythme plus lent en provenance de la basse. Le travail des synthétiseurs est essentiel pour illustrer des atmosphères prenantes et angoissantes. Ultha, c’est la tristesse hivernale qui vient dévaster l’été des blés blonds, la peur qui s’invite brusquement en pleine fête foraine, le deuil qui étend ses ailes sur d’énormes surfaces.

Dès “The avarist (eyes of a tragedy)”, on reste subjugué par l’introduction soigneusement travaillée, qui laisse partir plus tard des tempêtes de guitares tourmentées. “There is no love, high up on the gallows” pourrait être sans soucis la bande-son d’un film de John Carpenter, avec ses sept minutes de synthés planants et inquiétants. Mais la palme revient à “I’m afraid to follow ou there” et ses 19 minutes qui prennent le temps de construire un labyrinthe sonore où la lenteur des rythmes nous englue peu à peu dans une neurasthénie quasi norvégienne. Les instruments montent en puissance sur le long terme, entraînant une puissante vague de grandeur épique. Et lorsque le déchaînement arrive, c’est tout le Walhalla qui sort de terre pour chevaucher sur nos têtes meurtries et ravager nos cœurs blessés. Cette cavalcade maudite se fracasse à l’occasion de breaks capricieux, relançant toujours davantage une ruée de sons hantés et de rythmes furieux qui semble inextinguible. Les choses finissent par déboucher sur une subite accalmie, planante, langoureuse et tout, juste de quoi reprendre un peu de souffle avant de repartir de plus belle, vers toujours plus de tristesse poignante et de larmes de colère. Au terme de cette nouvelle apogée, le morceau vient finalement se confier à la douceur froide d’une guitare demeurée seule au milieu du fracas désormais évanoui. Un grand voyage.

Je ne suis pas d’habitude un grand fanatique de black metal, mais quand on y met d’autres éléments plus progressifs et plus émotionnels, je dois avouer que ça commence à devenir intéressant. Et dans le genre, Ultha négocie tout ça avec maestria.

Pays: DE
Century Media
Sortie: 2018/10/05

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