Jacques STOTZEM caught the spirit (of 66 of course!)
A quoi le succès tient! Jacques Stotzem est un guitariste mondialement reconnu par ses pairs, c’est un des rois du picking, cette technique qui consiste à jouer l’accompagnement avec le pouce sur les cordes du haut (qu’on appelle par conséquent les basses, dixit Bobby Lapointe), et la mélodie avec les autres doigts. Cela demande une coordination exemplaire, et est loin d’être à la portée de n’importe quel guitariste. Autrement dit, notre bonhomme est aussi adroit de la main droite que de la gauche, c’est pas donné à tout le monde non plus ça (y’en a qui ont de la chance tout de même !). Le monsieur est tellement reconnu que la légendaire firme Martin produit depuis 2006 un modèle “OMC Jacques Stotzem signature” (excusez du peu !). Seulement voilà, notre ami a beau être excellent, cela ne lui ouvre pas les portes du succès, face au grand public en tout cas. Il suffira pour lui de sortir un album de standards du rock, “Catch the spirit“, et de passer sur l’antenne de Classic 21 pour que la tournée affiche complet.
C’est justement par là que Jacques débute ce vendredi 30 janvier son concert sur la noble scène du Spirit of 66. Après avoir charié Francis Geron à propos de la musique dans les retours, ce dernier n’étant évidemment pas en reste de commentaires (nos deux compères organisent ensemble le festival de la guitare de Verviers, je pense qu’ils se connaissent un peu !), Jacques remercie Marc Ysaye et son équipe, faisant modestement abstraction du fait que si Marc l’a invité, c’est évidemment parce qu’il en vaut la peine.
Le concert débute en force avec “Fire” de Jimi Hendrix, interprété avec brio, énergie et rapidité, suivi de “Shape of my heart” de Sting, tiré de la bande originale du film “Léon”. Jacques fait preuve de deux autres grandes qualités en annonçant ce titre : la modestie et l’humour ! “La différence entre les musiques de films de Sting et les miennes, c’est que les siennes ont un film !”, hilarité générale. Sur ce titre, le virtuose nous offrira une belle suite d’harmoniques (ça le fait toujours !). Il nous en offre d’autres avec l’intro de “With or without you” de U2, jusque-là, on est surtout captivé par les prouesses techniques de l’ami Jacques.
Mais voilà qu’il se décide à jouer deux de ses propres compositions : “Oasis”, à ce propos, il nous fait part du fait qu’il a interprété ce titre débutant sur des tonalités proche orientales au Maroc, et que les spectateurs ont apprécié ce mélange de cultures, et ont répondu par une standing ovation. “L’avantage au spirit of 66, c’est que la standing ovation, je l’ai d’emblée”, de fait! C’est vraiment un moment fort du concert, ce titre est un chef d’œuvre ! Des sonorités nord-africaines, Jacques va nous balader vers l’Espagne, tout en continuant à accumuler les prouesses techniques. Mais surtout, que tout cela est agréable à écouter ! La salle est littéralement inondée de notes.
La deuxième compo personnelle est une ballade : “Simple Pleasure”, plage titulaire de l’avant-dernier album du maître, un petit côté Maxime Leforestier. Non seulement Jacques est techniquement impressionnant, mais ses mélodies sont superbes, et de toute évidence, Jacques, des mélodies il en a plein la tête !
Puis il décide de jouer les animateurs (quand on fait tout tout seul, on va jusqu’au bout !) et nous propose un quizz musical, “reconnaissez-vous ceci ?”, tout le monde reconnaît dès les premières mesures, bien sûr il s’agit de “One”, succès planétaire de la bande à Bono, ensuite il nous offre un petit coup d’auto dérision, commentant son exemplaire occupation de l’espace scénique, puisqu’il va maintenant quitter la position centrale qu’il occupe pour migrer à sa gauche vers la “scène latérale”, pour nous interpréter le “Fields of gold” de son ami policeman, suivi d’un “Purple Haze” pêchu à souhait.
Après la pause, il enchaîne avec deux titres d’une autre de ses idoles (et des miennes, cela dit en passant) : l’immense Neil Young. “Heart of gold”, suivi d’“After the gold rush”, il parle tellement bien de son amour pour cette chanson qu’il en oublie presque le titre. Ensuite vient un dynamique “Come together” avec un petit coup de “bottleneck” pour varier les plaisirs, le refrain sera chanté par une audience de plus en plus enthousiaste.
Deux autres compositions personnelles : l’époustouflant “Jungle” sur lequel l’artiste utilise tour à tour son outil comme une guitare, puis comme un instrument de percussion, on adore !! (avant de jouer : “quelqu’un connaît Jungle ?”, pas mal de doigts se lèvent, “ah tout de même, t’as vu Francis ?” “ouais, les amis que t’as fait venir pour rien !”, rires). Tout cela suivi de “Together”, une ballade composée pour sa tendre compagne. Petit commentaire amusé sur le fait que les ballades sont souvent moins applaudies que les morceaux rythmés, et effet garanti, le titre suivant, l’excellent “No surprises” de Radiohead est applaudi à tout rompre, le public est définitivement conquis !
Le magicien de la gratte sort sur deux monuments enchaînés : “Voodoo Chile”, “j’ose” dit-il, il peut tout oser !!! et un petit bijou : “Moonchild” d’un autre irlandais, monsieur Rory Gallagher. Jacques avait été le voir à Grivegnée (Liège), jadis et a toujours rêvé de le faire venir dans sa ville de Verviers. Malheureusement ce grand bluesmen est décédé l’année de création du Spirit of 66. Ce soir, grâce à lui, il aura été un moment avec nous, son voeux est exaucé. L’autre “Grand Jacques”, permettez-moi de le nommer ainsi, quitte la scène en remerciant : “j’ai vraiment apprécié chaque minute de ce concert comme un bon vin”, nous aussi m’sieur, et quel cru !!!
C’est l’heure des rappels, encore un grand moment (mais y en a-t-il eu des petits ?), “Paris Texas” de Ry Cooder, là c’est une reprise, plus un arrangement, slide guitar à vous donner des frissons. Un medley country-jazz aux accents manouche avec les standards “All of me” et “Sweet Georgia Brown” à la fin duquel notre ami accélère le tempo, déjà rapide au départ, vitesse d’exécution, justesse, technicité, tout y est, ne jetez pas votre guitare contre un mur, les gars, vous ne jouez pas mal, simplement lui c’est un martien !
Une très belle compo pour clore les débats, hommage à cette belle région des hautes-fagnes qu’il aime : “Sur Vesdre”, puis à la demande du public et de Francis Geron, on se refait “With or without you”, histoire d’être allé “au bout de ses doigts”.
Est-il nécessaire de conclure en disant comment c’était, vous l’avez depuis longtemps compris ! Jacques nous reviendra au Spirit aux alentours du 22 mars, ne le ratez pas !!!
J’y étais et cela a été un très grand moment. Ce gars a dix doigts à chaque main. C’est un extraterrestre. J’ai cru au début qu’il y avait deux autres guitaristes planqués en coulisses.
Ne le ratez pas si vous en avez l’occasion!