Rock Werchter 2009 (Jour 3) avec Kings Of Leon, Nick Cave et Franz Ferdinand
Troisième journée de l’édition 2009 du festival de Werchter, avec aujourd’hui encore pas mal de choses intéressantes à se mettre sous la dent, comme les Yeah Yeah Yeahs, Franz Ferdinand, Nick Cave & The Bad Seeds et les Kings Of Leon. On a tout d’abord commencé par éviter le rock lourd et nerveux de Triggerfinger, indigeste sous le soleil à l’heure de l’apéritif ainsi que Rodrigo Y Gabriela, deux virtuoses de la guitare hispanique qui s’adressent plutôt à un public de mélomanes avertis.
C’est donc sous la Pyramid Marquee que notre journée a réellement débuté peu avant 15 heures avec Regina Spektor, auteur compositrice interprète de talent originaire de Moscou et désormais installée à New York. La première fois que je l’avais vue, c’était à l’AB en 2003, en première partie des (encore inconnus à l’époque) Kings Of Leon. Elle m’avait impressionné en maniant avec dextérité (et en même temps) le micro, un clavier et une batterie. Aujourd’hui, elle passera la majeure partie du concert derrière un piano, accompagnée d’un batteur, d’un contrebassiste et d’un violoniste. Non non, pas de guitares, sauf quand elle jouera quelques morceaux toute seule en acoustique. N’empêche, dans un cas comme dans l’autre, sa voix envoûtante qui fait par moments penser à Kate Nash, sert merveilleusement bien ses compositions à tendance folk.
Elle vient de sortir “Far”, un cinquième album, dans lequel elle puisera abondamment cet après-midi (en fait, quasi la première moitié de son set) avant de se balader dans le reste de sa discographie et de proposer des compositions qui vont ravir les festivaliers manifestement très réceptifs à la voix de la belle, notamment le très délicat “Samson” et son hit single, “Fidelity”. Un bon petit concert pour commencer ce samedi en douceur.
Car la suite s’annonçait nettement plus nerveuse avec les Yeah Yeah Yeahs, emmenés par la charismatique Karen O. Ils ont sorti un troisième album au printemps, “It’s Blitz!”, qui utilise un peu moins les guitares et prend une direction plus pop new wave (à la manière de The Gossip). On était tout de même curieux de voir ce que cela pouvait donner en live, surtout que le trio New Yorkais est capable du meilleur (Pukkelpop en 2006) comme du pire (Botanique en 2004).
Aujourd’hui, on ne va pas se mouiller en affirmant qu’on a assisté à un concert assez inégal, perturbé par un réglage du son assez médiocre. Pourtant, ils ont les tubes, la folie (cfr le couvre chef papou de Karen O lors de son entrée sur scène, la représentation d’un énorme œil derrière la batterie,…) et la fougue. Mais voilà, cela ne suffira pas à rendre leur prestation inoubliable, pourtant entamée à du 100 à l’heure avec “Dull Life”. Ah oui, une autre chose qui irrite quelque peu est cette fâcheuse habitude qu’ils ont prise d’allonger à outrance leurs intros, ce qui enlève de l’intensité aux compositions. Ainsi, le début de “Gold Lion” fait irrémédiablement penser au “We Will Rock You” de Queen. Dommage car “Heads Will Roll”, “Zero” ou “Pin” sont autant de morceaux parfaits. Sans parler de “Date With The Night” qui clôturera leur set dans un certain chaos. A revoir impérativement en salle pour se faire une idée plus précise.
De retour vers la Main Stage, on a eu l’occasion de voir le dernier titre de Limp Bizkit, dont le pathétique Fred Durst porte toujours un short et une casquette comme lorsqu’il était ado. Néanmoins, la puissance dégagée par ce morceau (“Take A Look Around”, B.O. de Mission Impossible 2) en a laissé plus d’un pantois, à commencer par moi. Mais honnêtement, je ne pense pas que j’aurais pu tenir pendant une heure entière, surtout avec le soleil intense qui régnait de nouveau ce jour-là.
Le premier dilemme du festival allait ensuite se présenter. Qui de Franz Ferdinand ou de Mogwai (tous deux originaires de Glasgow) allait recevoir nos faveurs? En sachant que les premiers nous avaient enchantés à l’AB en mars dernier et que les seconds seront aux Ardentes ce jeudi, nous avons opté pour le groupe d’Alex Kapranos, dont le dernier album, “Tonight: Franz Ferdinand” nous entraîne vers des sentiers bien moins arty que le précédent. Et puis, tout le monde se rappelle de la prestation de feu que le groupe avait donné sous la Pyramid Marquee en 2004, sans doute une des plus chaudes de ces dernières années.
Pourtant, ils commenceront en mode mineur avec une version assez ralentie de “Walk Away”, qui a de quoi surprendre. Cela s’est amélioré avec “No You Girls” et cela a carrément décollé avec “The Dark Of The Matinée”. A partir de ce moment-là, plus aucun moment de répit ne nous sera accordé, le groupe adressant une salve de hits à une foule qui, en plus d’être réceptive, était aux anges avec des hits comme “This Fire”, “Do You Want To” (dont le début du deuxième couplet sera adapté en “So here we are at the Werchter party, oh yeah!”), Michael (pas un hommage à l’autre) et l’incontournable “Take Me Out”, pareil à lui-même lorsqu’il s’agit de faire trembler la plaine. Les nouveaux titres passent très bien également, “Ulysses” et un nerveux “What She Came For” en tête. C’est toutefois pendant “Lucid Dreams” qu’ils vont se déchaîner, lors du long final électro new wave très années 80, en sachant que les musiciens (sauf le bassiste Bob Hardy) frapperont comme des sauvages (surtout Nick McCarthy, d’ailleurs) sur la grosse caisse de Paul Thomson, tellement fort qu’ils vont finir par mettre la batterie hors service, obligeant le chanteur à se fendre d’une version acoustique minimaliste (et raccourcie) de “Jacqueline”. Ceci n’enlèvera rien à une très chouette prestation. Pour les amateurs, ils seront au Lotto Arena d’Anvers le 21 novembre prochain. A ne pas louper, surtout que The Cribs (avec Johnny Marr) assureront la première partie…
Le festival accueillait ensuite une légende en la personne de Nick Cave, accompagné de ses fidèles Bad Seeds. L’année dernière, il avait joué sur la Pyramid Marquee avec son autre projet, Grinderman (dont les Bad Seeds Warren Ellis et Martyn Casey sont présents ce soir également). Personnellement, je n’en attendais pas grand-chose, surtout que le dernier album, “Dig, Lazarus, Dig!!!” est sorti voici presqu’un an et demi. Et bien, sur ce coup-là, ils m’ont bluffé… Dès le très western “Tupelo”, le titre en intro, Nick Cave a éclaboussé de toute sa classe la scène de Werchter. Très élégant avec sa veste de smoking et ses boutons de manchette (il se retrouvera néanmoins en chemises dès le second morceau), il a également rasé la moustache de Cardinal de Richelieu qui était sienne depuis un moment. Il a désormais l’air d’un parfait gentleman. Mais cela n’a rien enlevé à son talent. Que du contraire…
Le groupe s’est baladé naturellement dans sa pléthorique discographie. C’est vrai qu’avec plus de 25 ans de carrière et 14 albums, il y a de quoi remplir plusieurs sets. On retiendra donc une version tout bonnement magnifique de “Henry Lee” (dédicacée à PJ Harvey, avec qui il chantait ce titre sur l’album “Murder Ballads” en 1996), un entraînant “The Weeping Song”, un méconnaissable “Red Right Hand” ainsi qu’un prenant “Stagger Lee”, chanté avec une telle conviction que l’histoire tragique qu’il contait défilait sous nos yeux ébahis. Il faut dire que sa voix suave et grave a tout pour être impressionnante. En d’autres mots, on a assisté à un des grands moments de cette édition du festival de Werchter.
Les suivants, par contre, ne méritaient peut-être pas d’être aussi haut sur l’affiche. En tout cas pas après Nick Cave et ce, même si les Kings Of Leon viennent de passer une année tout bonnement impressionnante, obtenant leur premier N°1 anglais avec “Sex On Fire” (devenu entre-temps le morceau le plus téléchargé de l’histoire), extrait d’un album, “Only By The Night”, déjà vendu à plus de 4 millions d’exemplaires à travers le monde. Un succès qui a mis du temps à se dessiner, puisque le premier album du groupe, “Youth & Young Manhood” est sorti en 2003. Pour la petite histoire, ils étaient à Werchter pour la troisième année d’affilée, chaque fois un peu plus tard dans la soirée.
D’abord, un truc qui m’a réellement impressionné, c’est la manière dont ils ont déchaîné les passions lors du précité “Sex On Fire” chanté, que dis-je, hurlé par la majorité des demoiselles présentes sur la plaine, toutes plus ou moins amoureuses de Caleb Followill, de ses frères Jared (le bassiste) et Nathan (l’énervant batteur qui mâche un chewing-gum d’une manière peu distinguée) ou de son cousin Matthew (le guitariste).
Mis à part ça, on a eu droit à une lecture autant horizontale que verticale de leurs compositions. Au fil des albums, ils ont évolué d’un rock sudiste influencé par les 70’s vers un son plus anglais (il faut savoir que dans leur pays d’origine, leur succès est loin d’être aussi colossal qu’au Royaume-Uni). La preuve en a été donnée ce soir, de “Molly’s Chambers” à “Use Somebody” en passant par “The Bucket” et “On Call”. Pointons encore ce qui est, à mon sens, leurs deux meilleures compositions, autant la plage qui ouvre le dernier album (“Closer”) que le précédent (“Knocked Up”). Mais cela ne m’a pas empêché de trouver ce concert somme toute assez banal. En effet, j’ai toujours du mal à comprendre la hype qui s’est emparée d’eux et je la trouve limite exagérée…
On allait donc oublier tout ça en se laissant emporter par les platines des frères Dewaele qui, quand ils ne s’occupent pas de leur projet rock Soulwax ou de réaliser des remixes innovants pour d’autres artistes, se transforment en DJ sous le nom 2ManyDJs, un produit d’exportation très demandé. En effet, on ne compte plus les énormes salles ou les festivals prestigieux qui réclament la présence des gantois. C’est vrai que leur habileté à mixer entre eux des titres rock, pop, électro, techno ou hard convient à des générations entières, pour autant que les jambes suivent… Au programme du blind test grandeur nature de ce soir: The Chemical Brothers (“Hey Boy Hey Girl”), The Gossip (“Standing In The Way Of Control”), New Order (“Blue Monday”), Sepultura (“Roots Bloody Roots”), Mr Oizo (“Flat Beat”, “Positif”), The Clash (“Rock The Casbah”), Aphex Twin (“Windowlicker”). J’en passe, et des meilleures. Eclectisme, quand tu nous tiens…
C’est donc en gesticulant et en jumpant que se terminera notre troisième journée de festival. Plus aussi frais qu’au premier jour, certes, mais loin d’avoir épuisé toutes nos ressources…
Vous n’avez pas fait les bons choix, visiblement 😉 !
Dans le dilemme ecossais j’ai prefere Mogwai, qui ont donne un grand concert, meme si leur musique se prete mal a des grands espaces. Aux dires de ma copine qui elle avait choisi Franz Ferdinand, la sauce a mis du temps a prendre, la faute notamment a pas mal de problemes techniques.
D’autre part, Kings of Leon est le groupe le plus sur-estime du moment, a sa place l’apres-midi mais pas comme tete d’affiche. Apres 30 minutes de patience nous sommes alles plein de curiosite regarder l’improbable Grace Jones… et ce fut de loin l’un des plus grands moments du w-e !