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Suspected Hippie In Transit : l’interview

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L’album “Diamond” du groupe suédois Suspected Hippie In Transit à beaucoup tourné sur ma platine depuis que j’ai eu la chance de pouvoir le chroniquer pour Music In Belgium. Mats Jonsson, le leader de ce combo hors-normes à accepté de lever le voile sur les origines de son groupe et de nous exposer ses opinions bien tranchée de ‘rocker hippie anarchiste’ sur l’état de notre société actuelle. Michel Serry : Salut. Pourrais-tu présenter Suspected Hippie In Transit à ceux qui n’ont pas eu la chance d’écouter “Diamond” ?

Mats Jonsson : Salut. Nous sommes un groupe rock suédois plutôt intéressant. Nous jouons un rock’n’roll lourd comme la pierre, basé sur la guitare dans l’esprit des seventies. Nous avons une forte personnalité. Écoutez-nous et vous verrez !

MS : Quel est ton background musical ? Ta bio sur MySpace révèle que, dans les années quatre-vingt, tu étais le guitariste d’un groupe rock appelé Zirr et aussi que tu es un musicien folk. Pourrais-tu nous en dire un peu plus ?

Mats Jonsson : J’ai appris à jouer de la guitare à l’âge de quatorze ans, en jouant du blues. C’est à cette époque que j’ai formé mon premier blues band. Le groupe s’est séparé trois ans plus tard. Je me suis alors tourné vers le heavy rock. J’ai appris à interpréter le répertoire de Jimi Hendrix. Ensuite, comme cela devenait un peu ennuyeux de jouer la musique d’un autre, j’ai commencé à improviser sur du rock et à écrire mon propre matériel. Pour moi, les bonnes chansons ne sont rien d’autres que des improvisations gelées. Quelques années plus tard, j’ai rejoint Zirr, un combo underground de Gothenburg avec lequel j’ai tourné jusqu’en 1992. Cette année-là, Ulf, le fondateur du groupe est décédé au cours d’un voyage au Népal ce qui a mis fin à nos activités. Ensuite, j’ai appris à jouer du violon. Pour cela, j’ai étudié la musique folk suédoise qui est, à mon avis, la version suédoise du blues. J’ai voyagé partout en Suède et j’ai rencontré de vieux violonistes afin d’apprendre la tradition musicale de mon pays. J’ai fait cela pendant dix ans. Puis, finalement je suis revenu au rock.

MS : Es-tu un musicien professionnel ? Ou, pour te poser la question de manière plus directe, est-ce que ta musique paie tes factures ou bien es-tu obligé d’avoir un autre boulot pour subvenir à tes besoins ?

Mats Jonsson : Depuis deux ans, je n’ai plus d’autre travail que la musique. Je donne des leçons de musique folklorique suédoise au violon et des leçons de rock à la guitare électrique. Cependant, la plupart de mes revenus viennent des concerts de musique folk. Parfois cela paie mes factures, parfois non. Pour l’instant, le rock ne me rapporte qu’un peu d’argent de poche. Cela vient probablement du fait que quand Christel O et moi, nous avons enregistré “Diamond” en 2008, nous l’avons fait comme un projet unique. Nous n’avions pas, à l’époque, l’intention de former un véritable groupe. Un peu après la sortie de l’album, nous avons rencontré un batteur professionnel (Per Lindberg) qui nous a aidé pour les enregistrements suivants (que vous pouvez écouter sur notre
page MySpace
). Peu après, comme il aimait nos titres, il nous a suggéré de former un groupe. Il nous a fallu quelques auditions pour trouver Lasse (basse) et Philip (guitare). En fait, nous n’avons donné que quelques concerts depuis janvier, donc, cela ne nous a pas encore rapporté énormément d’argent. Cependant, nous espérons que cette situation va changer, car nous voudrions bien essayer de vivre grâce à notre musique.


MS : Comment as-tu rencontré Christel O, ta chanteuse. Quelle est son histoire musicale ? Faisait-elle du rock avant de rejoindre le groupe ?

Mats Jonsson : Ma rencontre avec Christel O en 2006 fut une pure coïncidence. J’avais l’intention d’enregistrer “Diamond” et je cherchais une chanteuse. J’ai tout de suite adoré sa voix et la manière dont elle interprétait mes chansons. Nous avons donc décidé de travailler ensemble.

Christel O : J’ai étudié le théâtre et la production télévisée à l’école. Cela m’a permis de m’impliquer dans un tas de projets différents. J’ai chanté dans des groupes, des chorales, j’ai joué dans des pièces de théâtre, fait de petits concerts (principalement jazz et pop). Comme je cherchais d’autres opportunités, j’ai rencontré Mats dans une maison culturelle et musicale de Gothenburg appelée ‘Musikens Hus’ (The Music House). En fait, j’avais mis une petite annonce sur le tableau du ‘Musikens Hus’. Un petit bout de papier qui disait simplement : ‘Je chante tout, sauf du rock’…

MS : Quelles sont vos influences principales ? Quel genre de musique écoutiez-vous dans les années quatre-vingt ? Quelle musique vous fait vibrer de nos jours ?

Mats Jonsson : Je suis inspiré par les musiques que j’aime et j’aime toutes les musiques heavy et expressives (même chose pour la littérature et le cinéma, en fait). Cela combiné avec mes compétences particulières et mon regard anarchique sur la vie et la société sont mes influences principales. Dans les années quatre-vingt, j’adorais la musique pop-rock qui découlait du punk, des groupes comme Sixouxie and the Banshees, Danielle Dax ou The Cure. De nos jours, je préfère des groupes américains comme Queens Of The Stone Age, Eagles Of Death Metal, ou System Of A Down pour n’en mentionner que quelques-uns.

Christel O : Les chanteuses qui m’ont le plus influencé sont Tori Amos et Edie Brickell. Ce que j’écoutais dans les années quatre-vingt ? Drôle de question. Dois-je vraiment y répondre ? Et bien, j’écoutais Djurens Brevlåda (Animal Mailbox), un duo suédois des seventies qui chantait des histoires d’élans qui aimaient manger du maïs. C’était de la musique pour enfants ; je suis née en 1985 ! De nos jours, je ne me cantonne pas dans une seule catégorie de musique. J’écoute beaucoup Joss Stone, Fever Ray, Moloko, Lauryn Hill, Lady Sovereign et Frou Frou/Imogen Heap qui ont toutes en commun d’être des femmes incroyablement fortes avec de très jolies voix.

MS : Quels sont vos artistes suédois favoris ? Vous arrive-t-il d’écouter vos compatriotes de Opeth, Dark Tranquillity, Katatonia ou In Flames ?

Mats Jonsson : Je n’ai pas de groupe suédois favori. J’aime Hellacopter, et Conny Bloom est un excellent guitariste suédois. Il y a trop d’excellents groupes suédois qui sont tout à fait inconnus comme Hangover ou Tjänsteman & Trötte Theodor par exemple. Oui, j’écoute certains groupes métal suédois. Ils sont un peu difficile à éviter d’ailleurs. Nous avons eu un grand courant de métal suédois depuis quelques années. J’aime écouter Meshuggah et The Haunted. Opeth et In Flames sont bien aussi. Tous ces groupes ne sont pas apparus comme cela par hasard. Ils sont la conséquence du mélange de la scène hard rock suédoise avec la scène heavy métal américaine.

MS : Votre musique sonne comme du ‘classic rock’. Que pensez-vous de jeunes groupes comme Witchcraft, Wolfmother ou bien le suédo-norvégien Brutus qui essaient d’avoir un son identique à celui des albums enregistrés dans les seventies ?

Mats Jonsson : Je pense qu’ils sont géniaux. J’adore le son des seventies. Cependant, je pense que Wolfmother n’est qu’un pastiche de Led Zeppelin. Brutus quant à lui est très proche de ce que nous faisons nous-mêmes.

MS : Suspected Hippie In Transit, c’est un nom plutôt étrange. Pourrais-tu nous en expliquer la signification et nous dire pourquoi tu l’as choisi ?

Mats Jonsson : A Singapour, dans les années 70 et 80, Les autorités ne laissaient entrer aucun homme aux cheveux longs dans le pays. Les douanes apposaient un cachet portant la mention “S.H.I.T.” sur leur passeport. Cela signifiait ‘Suspected Hippie in Transit’ (Soupçonné d’être un hippie en transit). Les chevelus étaient obligés de quitter l’aéroport par le premier avion. Dans les années quatre-vingt, j’ai voyagé en Asie et j’avais reçu cet avertissement : ‘Ne va pas à Singapour’. Dans mon travail précédent (j’ai été fossoyeur (grave digger) pendant presque 18 ans), les gens avaient pris l’habitude de m’appeler le ‘hippie’ à cause de mes cheveux longs. Et finalement, je me suis toujours senti un peu comme un outsider dans notre société. Je regarde autour de moi et je ne vois que de la corruption partout où je vais. Quand les milliardaires organisent des fêtes, ils n’invitent que des politiciens, des juges et tous ceux qui ont des positions de puissance afin de les asseoir comme des marionnettes sur leurs genoux. Le vote n’a pas vraiment d’importance puisque le pouvoir est de toute façon dans les mains de ceux qui ont l’argent. Même les lois ne s’appliquent pas à eux de la même manière qu’à nous. Ils peuvent même s’en tirer avec un meurtre sur les bras alors que les prisons sont remplies de pauvres, de marginaux, de dissidents de la société. Et regarde un peu. Qui sont les gens qui sont battus par la police dans la rue ? Ce ne sont pas les millionnaires. Pas en suède en tout cas. Donc, c’est dans cet état d’esprit, je pense, avec cette impression perpétuelle d’avoir un ‘S.H.I.T.’ cacheté sur mon front, que j’ai opté pour ce nom.

MS : Pourquoi l’album “Diamond” est-il divisé en trois parties distinctes ?

Mats Jonsson : Lors de la composition de l’album, j’ai cristallisé trois parties. La première, heavy, swing et purement rock’n’roll, la seconde, plus mélancolique et la troisième qui est un mélange des différents styles pop-rock des années quatre-vingt. Si nous avions organisé les titres dans un ordre différent, l’album n’aurait pas eu le même feeling. De cette manière, nous amenons l’auditeur dans un voyage musical. Quelques-unes des chansons de l’album sont plus vieilles. Je les avais écrites alors que je jouais encore avec Zirr. J’ai voulu les inclure comme un tribut musical à cette période de ma vie. Et aussi, bien sûr, parce que je les aime.

MS : Il est possible d’écouter de nouvelles chansons sur votre page MySpace. Travaillez-vous sur un nouvel album ? Si oui, à quoi ressemblera-t-il ?

Mats Jonsson : Il ne fait aucun doute que nous ayons assez de matériel pour un nouvel album, mais cela ne fait pas vraiment partie de nos plans pour l’instant. Cependant, cela pourrait changer dans un futur proche. Si c’est le cas, nous n’utiliserons que de nouvelles chansons dans le style de celles que tu peux entendre sur notre page MySpace, puisque ce sont ces chansons que nous interprétons pendant nos concerts.

MS : Donc, vous ne jouez plus d’extraits de “Diamond” en concert ?

Mats Jonsson : Si, bien sûr. En fait, nous n’en jouons plus que trois. Peut-être en jouerons-nous une ou deux de plus à l’avenir. Mais comme je t’ai dit, chaque fois que je prends ma guitare, j’improvise de nouvelles choses et donc, je dispose de vraiment beaucoup trop de chansons. En plus, notre son ‘live’ ressemble plus à ce heavy-stoner rock que tu peux retrouver dans les nouvelles chansons sur MySpace.

MS : Tu étais déjà dans le ‘music-business’ dans les années quatre-vingt. Depuis cette époque, l’arrivée d’internet a vraiment changé la donne pour les musiciens et les compagnies discographiques. Vois-tu cela comme une bonne ou une mauvaise chose ?

Mats Jonsson : C’est une question épineuse. J’ai vécu l’incroyable développement d’internet depuis le début jusqu’à ce à quoi nous en sommes arrivés maintenant. De nos jours, nous pouvons atteindre un tas de personnes très rapidement. Nous avons des fans au Japon et aux USA alors que nous n’y sommes jamais allés et que notre disque n’y est même pas disponible, ce qui aurait été tout à fait impossible il y a vingt ans. D’un autre côté, il y a un tas de personnes qui pourraient acheter notre album et qui ne le font plus parce qu’ils arrivent à le télécharger gratuitement sur internet et, cela peut être très mauvais pour des petits labels indépendants au budget limité comme le nôtre.

MS : Est-ce que votre style musical est populaire en Suède ? Avez-vous écoulé beaucoup de copies de “Diamond” ? Y a-t-il beaucoup de gens qui viennent voir vos concerts ?

Mats Jonsson : Notre style n’est pas très populaire chez les chroniqueurs suédois ou dans les média musicaux locaux. Mais nous vendons pas mal de copies de l’album lors de nos concert. Il semble donc évident que le public suédois nous aime. Depuis que nous avons commencé à jouer live avec notre nouveau line-up, nous avons donné quelques concerts en compagnie d’autres combos et nous avons rencontré pas mal de gens. Et quand, après un concert, quelqu’un vient vous dire “J’ai vu que vous alliez jouer ce soir, et je ne l’aurais raté pour rien au monde”, ça fait vraiment du bien.

MS : Si vous en aviez l’occasion, avec quel groupe célèbre aimeriez vous tourner en Europe ?

Mats Jonsson : Aucun. Nous préfèrerions tourner avec un groupe inconnu mais génial comme les canadiens de The Harold Wartooth ou bien les hollandais de Towtruck, par exemple. Les groupes célèbres reçoivent un peu trop d’attention alors qu’il existe tant de bons groupes inconnus. C’est une nouvelle fois à cause du business. Les plus grands acteurs de ce business travaillent comme une industrie. Ils savent comment remplir tous les espaces pour vendre leurs propres artistes. Cela n’a vraiment rien à voir avec la bonne musique.

MS : As-tu des enfants ? Si oui, que pensent-ils du fait que leur papa soit dans un groupe rock ?

Mats Jonsson : J’ai un fils de dix-sept ans. Il s’appelle Simon. Il est au lycée et a choisi la production musicale comme matière principale. Je lui ai un peu appris à jouer de la guitare, et je pense que je suis encore un peu son héro. Il aime beaucoup Suspected Hippie In Transit.

MS : Que peuvent faire les Belges si cette interview leur a donné l’envie d’écouter la musique de Suspected Hippie In Transit ?

Mats Jonsson : Vous pouvez acheter notre album via internet ou en télécharger quelques titres. Il vous suffit d’aller voir notre
page MySpace
. Nous aimerions beaucoup venir jouer chez vous, alors, si quelqu’un pouvait nous arranger le coup, ce serait bien. Tous ceux qui voudront nous aider seront les bienvenus dans notre famille. Merci pour votre temps. Peace.

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