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Lokerse Feesten : Des corbeaux nostalgiques…

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Avec 36 éditions au compteur, les Lokerse Feesten peuvent se targuer d’être non seulement un des plus anciens festivals du royaume, mais également un de ceux qui proposent une affiche aussi pléthorique qu’éclectique, répartie sur dix soirées. Ce jeudi 5 août s’annonçait ténébreux avec Customs, Gang Of Four, les Dandy Warhols et les Sisters Of Mercy… Après avoir ouvert la scène à Werchter et à Dour, les louvanistes de Customs constituaient le point de départ idéal de la soirée. En effet, leur rock sombre très largement inspiré de Joy Division ne pouvait que ravir une assemblée dont la moyenne d’âge devait tourner autour des quarante ans. Avec sa voix caverneuse, le chanteur Kristof Uitebroek va en effet impressionner et habiter des compositions qui ne font que se bonifier au fil des prestations scéniques.

“Justine”, “Talk More Nonsense”, “We Are Ghosts”, autant de titres limpides qui font de leur premier album, “Enter The Characters”, un des albums incontournables de 2009. Ajoutons à cela une cover bluffante du “Transmission” de… Joy Division (of course) ainsi que le single imparable qu’est “Rex” et on a assisté d’emblée à une excellente prestation. Retenons encore leur look strict qui ne fait qu’accentuer le caractère sérieux d’un groupe décidément bien en place qu’il ne faudra pas louper le jour où ils feront escale près de chez vous.

En tout cas, on peut affirmer sans crainte qu’ils ont également été puiser quelques idées chez Gang Of Four, ceux qui allaient leur succéder sur scène. Auteur d’un remarquable premier album en 1979 (“Entertainment!”, devenu depuis un classique) qui amenait un vent de fraîcheur sur un marché punk déjà sur le déclin à l’époque, le quatuor de Leeds a, par la suite, plutôt cherché à reproduire cet éclair de génie sans toutefois y parvenir réellement. Séparés au milieu des années 80, ils se reformeront dix ans plus tard et viennent d’annoncer la sortie d’un nouvel album pour la rentrée (“Content”), le premier depuis quinze ans.

En fait, comme ils vont le démontrer ce soir, leur style va bien plus loin que les quelques accords limités qui ont fait la réputation du punk, en parfaite opposition à la musique progressive et pompeuse qui inondait les ondes à l’entame de la seconde moitié des 70’s. Ils vont en effet y amener un petit quelque chose en plus, sous forme d’influences groovantes et exotiques, avec à la clé une source d’inspiration pour bon nombre de groupes futurs, comme les Strokes, The Rapture ou Radio 4 pour n’en citer que quelques-uns.

De la formation originale, ne restent plus que le charismatique (et intenable) leader, Jon King et le guitariste Andy Gill. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’ont rien perdu de l’énergie qui était la leur voici une trentaine d’années. Comme l’an dernier au Sinner’s Day où ils avaient remplacé The Psychedelic Furs au pied levé, c’est dans leur riche passé qu’ils ont sélectionné leur set-list, avec des standards injustement sous-estimés comme “Damaged Goods”, “Anthrax” ou leur tube underground “At Home He’s A Tourist”, le tout emmené par une basse ronflante aux effets destructeurs.

Le groupe suivant à fouler la scène allait nous emmener dans un univers complètement différent, au point de paraître presque comme un intrus dans la programmation de la soirée. Il est vrai que le profil des Dandy Warhols lorgne plutôt du côté psychédélique sous influence que vers la noirceur du reste de l’affiche du jour. Cela dit, leur actualité récente fait la part belle à la nostalgie, car après avoir ressorti “Welcome To The Monkey House” (2003) dans une version non produite et dépouillée d’effets sous le nom “The Dandy Warhols Are Sound” en 2009, c’est leur ancienne maison de disques, Capitol, qui a commercialisé le mois dernier une compilation, “The Capitol Years 1995-2007”.

Quoi qu’il en soit, un concert des Dandy Warhols ressemble à un quitte ou double, dont la réussite dépend de la quantité de substances illicites qu’ils ont ingurgitées dans les heures précédant leur montée sur scène. Ce soir, ils n’ont pas (trop) l’air explosés, même si, comme à son habitude, la voix du chanteur Courtney Taylor-Taylor part assez souvent en vrille, au point de devenir risible par moments (on pense à “Not If You Were The Last Junkie On Earth”, particulièrement pathétique). La claviériste a l’air aussi beaucoup plus calme et sage que par le passé (le temps où elle montrait ses attributs est désormais bien loin) et le batteur expressif aux cheveux ébouriffés semble toujours aussi allumé. Pêle-mêle, le lancinant “I Love You”, le hit single “Bohemian Like You”, le bourré de cuivres “All The Money Or The Simple Life Honey” ou le plus récent (et country) “The Legend Of The Last Of The Outlaw Truckers aka The Ballad Of Sheriff Shorty” vont parsemer un set malheureusement pas toujours convaincant.

Surtout que, comme le démontrait la majorité des t-shirts arborés par les festivaliers, le public avait clairement fait le déplacement (et parfois de très loin) pour les Sisters Of Mercy, au point de snober les groupes qui s’étaient succédés jusqu’à minuit, l’heure de l’entrée en scène d’Andrew Eldritch et de ses deux guitaristes actuels (qui étaient encore dans leurs langes lorsque “First And Last And Always”, le premier album du groupe, est sorti et dont ils interpréteront la plage titulaire en guise d’intro ce soir). Pour les accompagner, leur célèbre boîte à rythmes baptisée Doktor Avalanche dans sa version la plus récente…

The Sisters Of Mercy. Un phénomène à part dans le monde musical anglais. En effet, d’ici quelques semaines, cela fera précisément vingt ans qu’est sorti leur troisième et dernier album. Vingt ans pendant lesquels les fans le la première heure ont perdu leurs cheveux et attrapé des rides en continuant à vénérer le sorcier gothique qui a marqué durablement (c’est le cas de le dire) le rock sombre, sinistre et froid des années 80. Vingt ans qu’ils remplissent les salles de concert sur l’unique base de leur nom et de leur back catalogue, avec des fortunes diverses (très bons au Pukkelpop 2001, plutôt décevants lors de leurs dates en 2006 et 2009 à l’AB).

En fait, rien n’a vraiment changé dans leur chef. Ils se produisent toujours à trois dans un épais nuage de fumigènes (bien que ce soir, on a réussi à distinguer assez clairement la calvitie complète du leader). En revanche, sa voix est intacte et la puissance glaciale qui habite ses compositions ne s’est pas réchauffée avec le temps. Bien entendu, ils vont donner aux spectateurs ce qu’ils sont venus chercher, c’est-à-dire un set convenu truffé de classiques issus de la période dorée (si l’on peut dire) du rock gothique, en ratissant dans une discographie qui ne comporte que très peu de faiblesses. Pointons parmi d’autres “Alice”, “Marian”, “Dominion / Mother Russia” ou encore “Vision Thing”.

Cela dit, des titres inédits ont été joués également (même si cela fait plusieurs années qu’ils figurent sur les set-lists), ce qui laisse toujours une porte ouverte à un hypothétique quatrième album. En rappel, outre “Rain From Heaven” (à l’origine interprété par The Sisterhood, groupe éphémère formé en 1986 par Eldritch et Alan Vega notamment), on a bien entendu eu droit au classique “Temple Of Love”, point final d’une soirée assez nostalgique à bien y réfléchir. Mais c’est vrai aussi que l’on ne s’attendait pas à autre chose…

One thought on “Lokerse Feesten : Des corbeaux nostalgiques…

  • Je ne sais pas ce que les Strokes et the Rapture ont été chercher dans les Gang of Four mais je n’y vois pas grand-chose. Ce concert était horrible, ce groupe est vraiment une vaste blague. J’ai eu l’impression d’entendre le même concept à répétition, les mêmes accords déstructurés et autres larsens abusifs pendant une heure. Même leur jeu scénique – relativement mou – est strictement identique tout au long. Je ne vois pas ce que le chanteur a de charismatique, il était tout simplement absent et n’avait absolument aucune émotion à transmettre au public.

    Customs, Joy Division oui effectivement, des wannabees comme tant d’autres…

    Grand fan des Dandy Warhols, j’ai également été assez déçu par leur prestation. Pour les avoir vu trois fois en concert, je peux dire que Courtney n’a jamais chanté juste 😉 Ceci dit, j’étais tout devant durant ce concert et j’ai vu de nombreuses personnes avec un t-shirt à leur effigie…

    Mes vidéos (jour 3 et 7) : http://www.youtube.com/view_play_list?p=74FA704181A0E767

    Mes photos (jour 3 et 7) : http://www.flickr.com/photos/jverlant/sets/72157624528531775

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