TRIGGERFINGER à l’AB : toujours avec classe
C’est ce week-end du samedi 4 décembre que les Triggerfinger ont décidé de poser leurs valises à l’Ancienne Belgique pour nous secouer un peu, comme si Saint-Nicolas avait décidé de nous faire un cadeau en avance… Première partie : Poltrock Piano Explosion
Arrivée peu après le début de la première partie, je découvre une atmosphère plutôt calme en pénétrant dans la salle de l’AB. Sur scène, la déco est assez cosy et le pianiste qu’est Poltrock Piano Explosion est à son poste. Il reprend quelques grands titres du rock tels que Queens of the Stone Age ou encore Led Zeppelin laissant le public se prendre au jeu du blindtest. Ses mains virevoltent, légères et ils nous étonnent par sa faculté à enchaîner les reprises sans interruption.
Triggerfinger
C’est en force que les anversois débutent ce concert avec un titre de leur nouvel album : “I’m coming for you”. Ils visent juste : le son est lourd mais reste très clair. Le trio, comme à son habitude, est en costume satiné et a avancé la batterie au-devant de la scène. Ils enchaînent de suite avec leur dernier single : “All this dancin’ around”, plus pop, il semble faire des heureux dans le public qui chante avec eux. Le concert se poursuit, Triggerfinger semble être une vraie machine de guerre, bien huilée, lourde mais précise, jusqu’à ce mémorable “My baby’s got a gun”. Tout d’abord sa voix si particulière, dont je n’ai pas encore parlé, prend ici tout son pouvoir. Comment ne pas sentir de frissons en l’écoutant ? Elle semble entrer lentement en nous, au fur et à mesure que la tension dans la musique monte, pénétrer au plus profond de nos entrailles et nous tordre doucement le ventre, et ce de plus en plus fort. Cette chanson n’est rien d’autre que du sexe à l’état musical. Le public ne peut qu’être en transe, attendant l’orgasme auditif et Ruben Block semble éprouver un malin plaisir à le faire languir. Quand retentit l’explosion tant attendue, c’est véritablement le point fort de ce concert et il me faudra bien un moment pour m’en remettre. On peut d’ailleurs s’interroger sur le choix de la setlist : pourquoi placer l’apothéose relativement tôt dans le concert ? Preuve de mes doutes, les deux titres suivants ne me marquent pas. Peu après, c’est au tour d’un “First taste” dont le son très stoner fait sans surprise penser aux Queens Of the Stone Age.
Après un bref rappel, “All night long” nous donnera un peu de douceur mais surtout du blues, comme un retour bien mérité aux racines. Ce voyage nous permet de nous poser pour savourer la ballade plutôt mélancolique qu’est “It hasn’t gone away”. Les Triggerfinger semblent ici vouloir nous faire oublier qu’ils peuvent jouer comme un rouleau compresseur, mais c’est sans compter sur “Let it ride” dont l’intro sonne très “High on a wire” des Black Box Revelation (eux-mêmes produit par Mario Goossens le batteur des Triggerfinger… le monde de la musique en Belgique est si petit !).
En guise de second rappel, ils nous joueront une reprise : “Commotion” des Creedence Clearwater Revival. Les relents country n’étant vraiment pas pour moi, cette dernière chanson me laissera un goût de trop peu pour terminer ce concert, décidément cette setlist ne me plaît pas ! Je pense d’ailleurs que c’est une des raisons qui m’a fait perdre le fil du concert par moment. Et si les Triggerfinger sont un très bon groupe, je ne peux nier un certain manque de rupture de rythme dans leur show.
Ce qui m’aura le plus frappée, c’est la très belle complicité entre le public et le groupe. Par exemple, le public fait silence, presque recueilli pour savourer l’intro de “My baby’s got a gun” et lorsqu’un spectateur crie, manifestant son contentement, c’est toute une salle qui lui répond en chuchotant de se taire pour protéger cet instant fragile. Il semble y avoir une véritable cohésion entre la salle et la scène. Ce n’est pas tous les jours qu’on entend un public chanter un hymne au batteur ni ovationner le bassiste, alias Monsieur Pol, autant que le chanteur alors même que le charisme de Ruben n’a d’égal que sa superbe voix caverneuse.
Bonne review, et je partage l’avis selon lequel “My baby’s got a gun” a été un point culminant: quelle intensité !!! QUI, actuellement, peut prétendre “tenir” une salle avec ce type de morceau, ce chant hanté (évoquant parfois Nick Cave et toujours … Ruben Block)? Comme souvent avec TF, la version live est en tout point supérieure à la pourtant excellente version discographique (le génial “All this dancin’ around”, que je vous recommande dans la version LP+CD, à peine plus chère et sonnant divinement).
Par contre, je ne suis pas d’accord avec l’avis du chroniqueur sur la set list: je l’ai trouvée au contraire très équilibrée, avec une bonne répartition des trois albums (plusieurs titres du premier offerts en rappel comme cadeau aux plus vieux fans, dont ce “Commotion” qui n’a vraiment plus rien de country (déjà dans le smains de CCR … ) une fois Triggerfingerisé. Et en début de premier rappel, “It hasn’t gone away” culmine dans les mêmes sphères d’émotion que “My baby …”, avec sa puissnate batterie Bonhamesque et la permanente complicité du public (pour moi, c’était le 4/12, le jour des plus fidèles fans car booké le premier).
Ce groupe a une carrure internationale, et même à ce niveau, je ne vois guère qui pourrait les chatouiller dans leur domaine, ils sont impériaux. Ne les ratez pas!