HURTS à l’AB, une heure sans heurt
Quelques mois après avoir aisément rempli l’Orangerie du Botanique, les Anglais de Hurts (from Manchester) ont fait de même ce mardi 1er mars à l’Ancienne Belgique. Un public essentiellement féminin et hystérique s’était en effet pressé pour applaudir le duo mélancolique au succès aussi fulgurant qu’inattendu…
C’est à Harvey Quinnt qu’avait été confié le soin de mettre les tympans des spectateurs en condition. Il s’agit du nouveau projet de Philippe Fierens, l’ancien leader de Savana Station, groupe anversois aujourd’hui séparé. Pour l’occasion, il s’est entouré de musiciens pour qui jouer de la musique n’est pas un vain mot.
De fait, la contrebasse, la guitare et la batterie allégée sont parfaitement dosées et distinctement identifiables, le tout chapeauté par une voix que l’on peut réellement considérer comme instrument à part entière.
En tout cas, Philippe Fierens ne passe pas inaperçu avec son costume gris, ses lunettes aux bords épais et surtout sa moustache 70’s. Mais ce qui surprend le plus, c’est sa manière de danser façon zoulou. Ce type a le rythme dans la peau (et peut-être même du sang black dans les veines). Musicalement, on dirait du Venus (les compositions élégamment construites) aux guitares plus présentes et dont le micro serait tenu par Lenny Kravitz (la voix est troublante de similitude), même si l’on assiste à des moments groovy, voire soul qui éloignent du même coup l’influence rock vintage revival. Une demi-heure curieuse, certes, mais pas inintéressante…
Forts d’un hit en puissance (“Wonderful Life”) et d’un album qui, malgré son titre (“
Happiness“) ne respire pas la joie de vivre, Hurts s’est hissé au rang de révélation de l’année 2010 (ils ont récemment reçu le Best New Band Award décerné par le NME). Entre un Pet Shop Boys dépressif et un Killers cafardeux, on ne s’attendait pas à mourir de rire ce soir, même si les sonorités franchement pop peuvent faire prétendre le contraire.
Cheveux gominés et costume tiré à quatre épingles, le chanteur Theo Hutchcraft a déboulé sur scène en portant à bout de bras un bouquet de roses blanches qu’il déposera sur le piano de son compère Adam Anderson, avant d’entamer le set au son d’“Unspoken”. Il ne faudra pas longtemps pour se rendre compte de la puissance de sa voix, qui illumine véritablement les compositions. Derrière le duo, quatre musiciens (dont une multi-instrumentiste hors pair qui manie la flûte, le saxophone et le violon à la perfection) sont alignés sur une estrade. En guise de décor, une persienne géante qui fait office d’écran reçoit les projections en noir et blanc.
Avec l’excellent “Silver Lining” et “Wonderful Life” (déjà!), ils rentrent dans le vif du sujet, et le public a l’air de vouloir les suivre, chauffés sans doute par les fameuses roses que le chanteur va de temps à autre jeter dans la foule. Très statique et ne laissant transparaître aucune émotion, il va enfin esquisser un sourire sur “Happiness”. C’est toutefois à ce moment que l’on commence à se poser des questions car la direction musicale du groupe prend tout d’un coup un virage pop dérangeant. On se croirait dans les années 80 période néoromantique (Spandau Ballet, Duran Duran) et cela manque singulièrement de guitares (le facile “Blood, Tears & Gold”, “Sunday”).
Comme pour nous contredire, au beau milieu d’“Evelyn”, Adam Anderson quitte subitement son piano et attrape une six cordes qu’il va nerveusement chauffer en rentrant dans un trip à la Slash, tout en ne tenant plus en place. Il va même manquer par deux fois de télescoper le chanteur qui, lui aussi, semblait tout à coup habité. Malheureusement, cette démonstration va rester isolée et la suite du concert reprendra, à de rares exceptions près (la voix de ténor sur le surprenant “Verona” notamment), le mauvais filon mentionné ci-dessus.
Ils vont même réussir à tomber encore plus bas avec une pathétique reprise du “Confide In Me” de Kylie Minogue, pourtant un des rares titres plus ou moins crédibles de la petite Australienne (qui, pour la petite histoire, a participé à l’enregistrement de “Devotion”, mais dont la voix aura manqué ce soir). De plus, on se demande l’utilité récurrente des chœurs inspirés de l’armée rouge qui sortent d’on ne sait où…
Le public, lui, n’en a cure et participe pleinement à la fête, en frappant dans les mains et en reprenant les paroles de “Stay” avant qu’“Illuminated” ne termine le set principal après moins d’une heure de concert. Le groupe reviendra pour un ultime morceau, “Better Than Love”, efficace à souhait avec un beat presque techno à la Chemical Brothers et des arrangements largement inspirés des Pet Shop Boys. Mouais, en résumé, Hurts ne nous a pas vraiment convaincus. On arrive même à se demander ce qu’ils viendront faire à Werchter cet été…
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Photos © 2011 Aurore Belot