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SLAYER + MEGADETH, deux des quatre big du thrash métal assaillent Bruxelles

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En cette fin mars 2011, l’Europe est confrontée à une double menace : d’une part, le nuage nucléaire japonais qui passe au-dessus de son territoire et d’autre part la razzia effectuée par Megadeth et Slayer, qui viennent rajouter une couche de radiations atomiques et facturer le rayonnement au prix de gros. Megadeth et Slayer, c’est trente ans de thrash metal qui vous tombent sur la figure, pilonnant les neurones, ravageant les lobes frontaux et demeurant la musique la plus dangereuse jamais inventée, invincible aux agressions du death metal et indifférente aux manifestations de force prodiguées par le black metal.

Surtout, l’occasion qui nous est donnée de voir sur une même scène des gabarits comme Slayer et Megadeth tient tout simplement du miracle quand on connaît l’inimitié qui a toujours opposé ces deux groupes, illustrée par les innombrables sorties de Kerry King sur Dave Mustaine lors de toutes les interviews que le guitariste de Slayer a pu donner à la presse au cours de ces dernières années. Il a toujours été de notoriété publique que Slayer et Megadeth, c’était deux conceptions opposées du thrash metal. D’un côté, les bourreaux d’Huntington Beach, tenants depuis près de trente ans d’un thrash metal ultra-agressif, sombre et inquiétant, ont toujours fait face à la formation de Dave Mustaine, ombrageux et orgueilleux ex-guitariste de Metallica ayant mis sur pied un Megadeth entièrement voué à son ego et dont le personnel a changé à peu près autant de fois que le gouvernement fédéral belge en vingt ans (hormis la présence du fidèle bassiste Dave Ellefson depuis toujours). À ma droite, un groupe ayant à peine connu des modifications de son line-up (un petit aller-retour du batteur Dave Lombardo, sans plus), à ma gauche, une formation changeante entièrement vouée à son leader lui-même toujours prêt à flirter avec le changement et l’imprévu.

Et comme tout change dans ce bas monde, les relations entre Slayer et Megadeth ont elles-mêmes changé à l’occasion d’une sorte de réunification miraculeuse des quatre plus grands groupes de thrash metal américain encore en activité : Metallica, Slayer, Megadeth et Anthrax. Cette rencontre des titans a eu lieu au cours de la désormais mythique tournée des Big Four l’été dernier, immortalisée par le coffret CD et DVD issu du festival Sonisphere enregistré et filmé en Bulgarie. Devant nos yeux ébahis, les piliers absolus du métal irréductible nous ont sorti le grand jeu de la mort qui tue. Et ce soir, la moitié des quatre cavaliers de l’apocalypse unit ses forces pour venir porter la dévastation sur le vieux continent. Slayer vient défendre son dernier album
World painted blood
sorti fin 2009 et Megadeth fait la promotion de son “Endgame”, arrivé au front la même année.

La tournée Megadeth/Slayer a lancé ses mortelles escadrilles au-dessus l’Australie et de la Nouvelle-Zélande début mars avant de se diriger inexorablement vers la Russie et la Scandinavie, avec l’intention de continuer le massacre en Belgique, Allemagne, France, Italie, Espagne, Portugal, Croatie, Hongrie, Pologne, Suisse et autres pays européens ayant signé la Convention de Genève. La malédiction s’est alors emparée de Slayer qui a été frappé par une infection interne ayant mis hors de combat le guitariste Jeff Hanneman et par un malaise qui a empêché le bassiste Tom Araya de se produire lors de quelques shows aux antipodes. Mais finalement, avec l’aide d’un guitariste d’appoint et le rétablissement d’Araya, la Bitzkrieg thrash metal a pu continuer son chemin. Le guitariste qui vient sauver la tournée de Slayer est quand même Gary Holt, flingueur en chef chez Exodus, un autre groupe fondamental de la scène thrash californienne.

Il était donc du devoir de tout hardeux qui se respecte de croiser ce chemin et de prendre une dose salvatrice de plutonium en fusion de la part des maîtres du thrash. Après avoir abandonné le train-train quotidien du boulot et de la famille, je fonce sur Bruxelles et parvient à me garer pas trop loin du Forest National et au final me placer à l’extrémité de la barrière dans une salle occupée depuis longtemps par une foule nombreuse. Ce sont les Belges de Drums Are For Parades et leur doom/sludge metal qui assurent un préchauffage et j’arrive juste pour savourer les dernières minutes de leur show.

Après un rapide changement de matériel, il revient à Megadeth d’enfoncer le front et de lancer l’offensive vers 20h20. Ici, on ne peut pas parler de première partie mais plutôt de co-vedette. Comment voulez-vous en effet traiter de façon inférieure un groupe de la même génération que Slayer ou Metallica, dont est d’ailleurs issu Dave Mustaine, un temps guitariste soliste de la bande à Lars Ulrich et James Hetfield ? Ce sont de purs conflits d’ego qui ont amené Dave Mustaine à quitter Metallica et à fonder son groupe Megadeth, qui va rapidement se distinguer par son thrash metal plus mélodique et l’univers tordu de Dave Mustaine. Les albums “Peace sells… but who’s buying?” (1986), et surtout “Rust in peace” (1990) et “Countdown to extinction” (1992) demeurent la Sainte Trinité de ce combo qui a connu bien des changements de personnel, mais dont l’époque d’or reste celle où le guitariste Marty Friedman avait sévi et avait donné au groupe tout son côté technique et brutal. Après cela, Megadeth a connu un petit passage à vide au milieu des années 90 avant de revenir au premier plan en 2004, quand Dave Mustaine a annoncé le retour de son groupe qu’il avait déclaré dissous quelques années auparavant.

Dave Mustaine lance son groupe dans une monstrueuse parade égrenant le meilleur des chansons de Megadeth. Le morceau introductif est “Trust”, extrait de “Cryptic writings”, qui voit Dave Mustaine monter sur scène avec une somptueuse guitare à double manche tandis que ses hommes lancent également leurs instruments de torture. Au cours d’un show bien ficelé, dynamique, les valeurs sûres illustrées par “In my darkest hour”, “Wake up dead”, “Hangar 18”, “A tout le monde” et son refrain en français viennent chatouiller les tympans et fissurer les cervelets. Le visage enterré sous une épaisse tignasse blonde, Dave Mustaine sort ses plus belles guitares et confirme que son groupe est revenu au plus haut niveau, après les errances de la fin des années 90. Megadeth nous sort une heure et dix minutes de show au petit trot et achève le mitraillage avec un premier rappel composé de “Peace sells”, enchaîné avec “The mechanix”, titre écrit par Dave Mustaine à l’époque de sa présence dans Metallica et que ces derniers se réapproprieront sous le titre de “The four horsemen”. Megadeth semble être parti, mais revient avec un second rappel basé sur “Holy wars/Punishment due”, extrait de “Rust in peace”. Le public a déjà été bien nourri à la cuiller en fonte, mais le plat principal reste à venir avec Slayer.

Slayer vient achever le bombardement lourd avec un show basé sur une double inspiration : nouveaux titres de “World painted blood” et morceaux puisés dans le classicisme le plus pur. Je dirais même que Slayer joue la carte de l’essentiel, pour ne pas dire du minimum syndical avec un show qui va finalement se résumer à une heure et dix minutes. La préparation d’artillerie est assurée par deux nouveaux titres de “World painted blood” avant que l’assaut d’infanterie infernale ne se déploie autour des habituels “War ensemble”, “Dead skin mask”, “Seasons in the abyss”, “South of havent” ou “Reign in blood”. Autour de ces monstres sacrés, Slayer organise des escarmouches sanguinaires avec de petites perles déterrées du fond des albums classiques des années 80 et 90, “Post mortem”, “Hallowed point” ; “Payback” ou deux missiles en provenance du tout premier album “Show no mercy” de 1983, “The Antichrist” et “Black magic”. Sur scène et dans le public, c’est l’habituelle furie qui se déchaîne et qui fait d’un concert de Slayer un moment unique dans la vie d’un humain. Le service de sécurité mérite sa paye en extrayant du bouillon humain des dizaines de slammeurs complètement excités ou au contraire totalement abrutis. Tom Araya exhorte la foule tandis que Kerry King, Gary Holt et Dave Lombardo déversent des mégatonnes de décibels hargneux et virulents, aplatissant les têtes, faisant revenir sur terre les fantômes de sorcières maudites et ouvrant le sol pour y faire surgir les sept portes de l’enfer. On pourrait faire la fine bouche et regretter l’absence dans la set list d’un “Chemical warfare” ou d’un titre de l’avant-dernier album
Christ illusion
, excellent disque et à mon goût même plus convaincant que le tout dernier. Mais enfin, nous n’allons pas bouder notre plaisir devant cette leçon de fission nucléaire qui ferait passer l’explosion de la centrale nucléaire de Fukushima pour un aimable feu de camp de boy-scouts sociaux-chrétiens. L’apocalypse est d’ailleurs programmée avec le dernier titre qui termine de pulvériser une audience venue uniquement pour se faire soumettre par la puissance imparable de Slayer. Lorsque “Angel of death” s’abat sur le Forest National, tout le monde comprend que les maîtres du thrash metal restent Slayer et que le plus grand album du genre restera à jamais “Reign in blood”, qui fête cette année son quart de siècle.

Seul point sombre de ce show de Slayer : il n’a duré que 70 minutes, à peine plus qu’un solo de guitare de Jimmy Page sur “Dazed and confused” en concert en 1973. Mais avec Slayer, c’est l’intensité qui compte et on peut dire que ce soir, la distribution d’électricité a été pleinement assurée.

Set list Slayer :
World painted blood / Hate worldwide / War ensemble / Post-mortem / Hallowed point / Dead skin mask / Silent scream / The Antichrist / Americon / Payback / Seasons in the abyss / Snuff / South of heaven / Raining blood / Black magic / Angel of death

Set list Megadeth :
Trust / In my darkest hour / Hangar 18 / Wake up dead / Head crusher / A tout le monde / How the story ends / She-wolf / Poison was the cure / Angry again / Sweating bullets / Symphony of destruction // Rappels : Peace sells…/The mechanix / Holy wars… The punishment due

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