DOUR FESTIVAL 2011 (jour 3) : entre décibels et déluge…
Troisième journée de notre périple annuel au Dour Festival ce samedi 16 juillet et cette fois, on n’allait pas y échapper. Aux côtés de Suede, d’IAMX et de Life Of Agony, c’est la pluie qui allait devenir l’encombrant invité de la journée, avec toutes les conséquences que cela engendre… Pourtant, lorsque l’on a pénétré sur la plaine de la machine à feu, il faisait encore sec et beau (lisez: beau comme une journée de l’été 2011 peut l’être…). Sous La Petite Maison Dans La Prairie, il y avait El National Quarterback qui, une semaine après Les Ardentes, venaient défendre leur premier EP, “Monarchs”, sorti voici quelques mois. Mais, à l’instar de leur prestation à Liège, il leur manque toujours un petit quelque chose pour retranscrire l’intéressante sensation qui se dégage du disque. L’histoire de quelques concerts supplémentaires, sans doute.
Au ClubCircuit Marquee, c’était un spectacle particulier qui nous attendait puisque se déroulait la demi-finale du championnat de Belgique d’Air Guitar. Chacun des neuf participants avait une minute pour convaincre le jury en s’exhibant (pour certains, c’était le mot…) une guitare invisible entre les mains au son d’un titre qu’il avait préalablement choisi. L’occasion d’entendre un fragment des Sex Pistols, des Who ou des Foo Fighters mis en scène d’une manière originale (ou pas). Les cinq meilleurs étaient qualifiés pour la finale. Et, aux dernières nouvelles, c’est le participant de Charleroi qui aurait remporté la (vraie) guitare Gibson Les Paul qui trônait à l’arrière de la scène…
Après cet intermède somme toute risible, direction La Petite Maison Dans La Prairie pour Cloud Control, ces Australiens qui font un tabac dans leur pays natal et dont le premier album (“Bliss Release”) est disponible chez nous depuis peu. Leur indie folk aux relents psyché a de quoi surprendre mais tient admirablement la route, même si la douce voix du chanteur Alister Wright ne correspond pas nécessairement aux guitares nerveuses qui l’accompagnent. Mentionnons également l’essentielle seconde voix du claviériste et le titre imparable qu’est “There’s Nothing In The Water We Can’t Fight”. A revoir sans hésiter à la Rotonde du Botanique le 14 septembre prochain.
Le vent qui s’était levé nous a poussés vers le ClubCircuit Marquee où The Amplifetes avaient déjà débuté leur set. Emmené par un leader aussi chevelu que barbu à la voix saturée, le groupe suédois étale allègrement ses influences 80’s grâce notamment à deux synthés et à une batterie électronique agrémentée de deux cymbales. Comme on peut s’en douter, tout ceci se révèle délicieusement pop, dansant et efficace, un peu comme si Daft Punk s’était trompé de décennie. Le seul bémol concerne le chanteur qui récite ses textes plus qu’il ne les chante. Mais cela fait visiblement partie du concept.
Le début de la journée était clairement basé sur les découvertes puisque la suite de notre programme mentionnait Yussuf Jerusalem, projet du Parisien Benjamin Daures qui n’a pas trop la tête du style de musique qu’il compose. Accompagné sur scène d’un bassiste black et d’un batteur qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Liam Gallagher, il met en place un son rock ‘n’ roll punkabilly quelque part entre Del Shannon, les Buzzcocks et Johnny Cash en plus électrique. Cela ratisse large et, malheureusement, manque un peu de constance sur la longueur. Mais certains titres sont tout bonnement irrésistibles…
Retour sur le ClubCircuit Marquee décidément bien pop en cette fin d’après-midi pour Architecture In Helsinki. Ce qui nous a d’abord frappés, outre le fait qu’ils sont six sur scène, c’est que la batterie électronique ressemble étrangement à celle de The Amplifetes. Egalement basée sur des sons synthétiques, leur musique franchit cependant un pas supplémentaire en proposant de vraies chansons pop avec des refrains catchy, des chœurs féminins et tout et tout. On pense aux Killers pour le son mais la voix caractéristique du chanteur renvoie plutôt du côté des B-52’s. Ils vont même nous faire bondir une vingtaine d’années en arrière en reprenant le hit de London Beat (“I’ve Been Thinking About You”). Deux mots nous viennent à l’esprit pour résumer leur prestation: coloré et guilleret.
C’est alors que le déluge a commencé à s’abattre sur Dour. Au vent déjà bien présent se sont ajoutées des trombes d’eau, obligeant les festivaliers à trouver un refuge sous les différents chapiteaux ou à braver les éléments pour écouter le concert de Groundation (qui avaient concocté un tribute à Bob Marley) et, plus tard, de Pennywise. En ce qui nous concerne, on s’est sagement abrité sous le ClubCircuit Marquee en assistant aux soundchecks de Saul Williams et en espérant que la tempête se calme quelque peu. Las. On est donc resté à l’abri pendant le set de l’Américain qui, de prime abord, nous a fait penser à du TV On The Radio avant de se disperser entre rap, hip hop et électro, le tout sans devenir barbant comme Cypress Hill ou Ice Cube les jours précédents. On remarque une réelle volonté de se démarquer en proposant des compositions travaillées qui coulent à l’oreille. Parfois, les intempéries ont du bon…
Les choses sérieuses allaient commencer avec la prestation d’IAMX, dont le nouvel album (“Volatile Times”), est sorti au printemps. Habitué du festival (c’était son quatrième passage) et des mises en scène à la limite du politiquement correct, Chris Corner et ses musiciens (dont une batteuse pas très commode avec les roadies et une claviériste toute de latex vêtue) seront fidèles à leur réputation. Mystique, suggestif, bestial parfois, leur set d’une heure ne va présenter aucun temps mort. Au contraire, on est content de prendre du plaisir à l’écoute de “Music People” (au final inhumain pendant lequel le chanteur frappera de plus en plus vite sur ce qui ressemblait à un fût de bière) ou du très pop “Ghosts Of Utopia”, deux excellents nouveaux titres. Mais “Nightlife”, “Kiss And Swallow” ou “President” vont nous rappeler quelle machine à tube ils sont devenus au fil des ans. Surtout qu’ils ont encore quelques bombes en stock qu’ils réservent pour les concerts traditionnels.
Inutile de vous dire qu’entre-temps, le site s’était transformé en champ de gadoue, digne du Pukkelpop en 2002 où l’on s’enfonçait littéralement dans la boue en regardant le concert de Suede. Tiens, coïncidence ou pas, mais c’est justement le groupe de Brett Anderson qui va nous faire sortir de notre tanière ce soir. En effet, après Pulp la veille, c’est une autre légende récemment reformée de la Britpop que le festival accueillait. D’ailleurs, les deux groupes avaient jeté l’éponge quasiment au même moment. Une fin de parcours et une reprise quasiment identiques donc, même si, à l’inverse de Pulp, les membres de Suede avaient déjà fêté leur réconciliation lors d’un show incroyable d’intensité en novembre 2010 au Cirque Royal.
Ce soir, ils vont toutefois mettre un certain temps avant de rentrer dans le vif du sujet. Dieu sait pour quelle raison (une scène gorgée de pluie obligeant les roadies à l’éponger, un public très peu nombreux,…), mais Brett Anderson n’avait pas la tête des grands soirs au moment d’entamer “She”. Heureusement, il allait progressivement redevenir le leader tel qu’il le restait dans nos mémoires, soit après “Trash” et “Filmstar” (mais pour jouer du lasso avec son micro, il va falloir attendre la toute fin du concert). Le set best of se focalisant principalement sur les trois premiers albums du groupe va faire le bonheur des aficionados réunis devant la Last Arena.
Malheureusement pour eux, l’ouragan Pulp était passé la veille et l’inévitable comparaison des deux prestations n’allait leur laisser aucune chance. Brett Anderson n’a pas la tchache de Jarvis Cocker et le visuel était pour ainsi dire nul. Ceci dit, les compositions tiennent évidemment parfaitement la route: “Animal Nitrate”, “We Are The Pigs”, “So Young”, “Saturday Night” (bien entendu), “Metal Mickey”, autant de classiques indie des 90’s. Et, sur ce coup-là, c’est Suede qui remporte la mise… Tiens, hasard ou pas, mais la pluie s’est subitement arrêtée de tomber au milieu de leur set, avant de reprendre de plus belle au terme d’une ultime pépite, “Beautiful Ones”.
Il fallait donc de nouveau se mettre à l’abri (de la pluie, pas des décibels) car sur la Cannibal Stage jouaient Life Of Agony, ceux-là même qui ont mis l’Ancienne Belgique à genoux l’an dernier, au point d’en sortir le concert en DVD (“20 Years Strong (River Runs Red Live In Brussels)”) quelques semaines plus tard. Ce soir, le groupe New Yorkais va faire de même avec le public de Dour, réputé pour être friand de ce genre de style musical extrême. Guitare cinglante, batterie sauvage et basse qui claque, c’est toutefois Keith Caputo, le chanteur (très petit par la taille, d’autant plus qu’il joue une vingtaine de centimètres en contrebas de ses collègues) à la voix caractéristique qui fait le spectacle. Régulièrement au beau milieu de la foule, il (ou elle, finalement, si l’on en croit les rumeurs…) se donne à fond et fait vivre les compositions qui, malgré les apparences, restent accessibles et mélodieuses (écoutez donc “Lost At 22” pour vous en convaincre). Ce qui, pour un groupe de hardcore n’est franchement pas un résultat facile à atteindre…
C’est donc sur trois excellents concerts que notre troisième journée s’est achevée. Rendez-vous demain pour la suite et la fin de nos aventures à Dourland…
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Photos © 2011 Olivier Bourgi