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LOKERSE FEESTEN 2011 : MORRISSEY en grand seigneur

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Nouvelle soirée de concerts dans le pays de Waes ce jeudi 4 août avec sans doute l’une des affiches les plus intéressantes des Lokerse Feesten 2011. En effet, ce n’est pas tous les jours que Morrissey se retrouve au programme d’un festival belge. Et comme Balthazar, Gogol Bordello ainsi que les 2manydjs étaient également de la partie, on pouvait s’attendre à du lourd. Puisque les jours se suivent et se ressemblent, inutile de préciser que c’est sous la pluie que l’on a pénétré sur le site. Un site vierge de tout morceau de viande puisque sa Majesté Steven Patrick Morrissey, végétarien notoire, en avait interdit la vente lors de son passage. Opportunité commerciale saisie par un producteur de Quorn qui proposait des échantillons de chili con carne à base de ce substitut de bidoche. Ma foi pas mauvais du tout…

Tout ceci nous éloigne de la musique puisque les cinq membres de Balthazar s’apprêtaient à monter sur scène. Pour la petite histoire, les festivités avaient commencé plus tôt que les autres jours (à 19h) mais les embouteillages à la sortie de la capitale nous ont privés de The Heartbreaks. Partie remise, sans aucun doute.

Balthazar donc, qui continuent leur petit bonhomme de chemin et qui capitalisent le succès de leur excellent premier album (“Applause”) sorti en 2010 (et qui s’apprête à être distribué en Europe d’ici l’automne). Ceci dit, depuis leur concert presque complet à l’AB en avril dernier et la première partie de dEUS aux Nuits Botanique un mois plus tard, ils testent du nouveau matériel et ce sera le cas ce soir également à travers l’une ou l’autre composition toute chaude en milieu du set. De nouveaux titres qui augurent de bien bonnes choses pour la suite.

A côté de cela, on s’est régalé grâce à leur son typique, basé sur une basse particulièrement présente et inspirée alors que le batteur se déchaîne toujours autant. Quelque part entre Phoenix (“Wire”) et Cold War Kids (“Blues For Rosann”), c’est surtout la diversité de leurs voix qui impressionne (mis à part le batteur, chaque musicien a un micro devant lui). Petit bémol quant à la nonchalance de Maarten Devoldere mais ce point se voit annihilé à l’écoute des terribles “Hunger At The Door” et surtout “Blood Like Wine”, le titre qu’ils interprètent en final et qui donne de mieux en mieux sur scène, malgré sa durée extensible. Pour peu, l’absence de “Morning” passerait inaperçue…

La pluie avait momentanément cessé de tomber et le site s’est subitement rempli de spectateurs arborant fièrement leurs t-shirts vintage des Smiths. Pourtant, avant d’applaudir leur idole, il leur restait à se bousculer dans le moshpit sur Gogol Bordello. Il est vrai que le punk rock tzigane du groupe New Yorkais d’origine ukrainienne emmené par le déjanté Eugene Hütz ne laisse personne de marbre. Violon, accordéon, guitare sèche que l’on dirait empruntée à un mendiant, on se surprendrait presque à leur donner une petite pièce. Résolument festif, leur style se trouve à un carrefour avec la Mano Negra, les Dropkick Murphys et par moments les Négresses Vertes (surtout lors de leur cover particulière du “Another Brick In The Wall” de Pink Floyd).

Comme de coutume, c’est le branle-bas de combat sur scène, on tape du pied, mais après une vingtaine de minutes, on a l’impression d’avoir fait le tour de la question. Heureusement que l’hilarant leader à la légendaire moustache arrive à capter l’attention du public en multipliant les pitreries et en peaufinant son sens du spectacle (il terminera torse nu, une fois de plus). Ceci dit, le sentiment qui était le notre en 2008 lorsqu’ils avaient joué en tête d’affiche du Dour Festival n’a pas changé. Du Gogol Bordello se consomme en doses homéopathiques.

Place ensuite à la star de la soirée, jamais avare d’une déclaration incendiaire. Ainsi, voici quelques jours, Morrissey s’est fendu d’un commentaire pour le mois ambigu relatif aux récents événements tragiques en Norvège. Ce soir, il ne mettra pas d’huile sur le feu, même si les quatre musiciens qui l’accompagnent ont troqué leur costume traditionnel contre un t-shirt arborant l’indication “Fuck Fur”. On ne le changera jamais, notre Moz.

Physiquement, en revanche, on a l’impression qu’il s’est développé ces dernières années. Il apparaît en tout cas plus massif que lors de la dernière tournée. Mais il a toujours cette voix incroyable et cette prestance qui font de lui un personnage respectable du monde musical indépendant anglais. Et puis, il a de la suite dans les idées puisqu’il va débuter son set avec “I Want The One I Can’t Have”, un extrait de… “Meat Is Murder”, le deuxième album des Smiths.

Contre toute attente, il va prendre le public à la gorge en alignant d’emblée des compositions imparables et intemporelles comme “First Of The Gang To Die”, “You Have Killed Me” ou “Everyday Is Like Sunday”. Le public est aux anges et le fait savoir en chantant à tue-tête des textes qui signifient quelque chose à tout un chacun. Passé ou présent, on ne peut que se retrouver dans les vers du dandy anglais.

On a récemment fêté le vingt-cinquième anniversaire de “The Queen Is Dead”, le chef d’œuvre des Smiths et l’écoute de “There Is A Light That Never Goes Out” nous confirme qu’il n’a pris aucune ride (contrairement à son auteur). Troublant, à l’instar d’“I Know It’s Over”, un autre extrait de cet album duquel transpire toujours autant d’émotion. Surtout qu’il arrivera après une délicate version du “Satellite Of Love” de Lou Reed.

N’oubliant quasi aucun moment de sa carrière (même les extraits du récent “Years Of Refusal” valaient le détour, “One Day Goodbye Will Be Farewell” en tête), il va également présenter une nouvelle composition, “Scandinavia” dans un style Morrissey presque crooner. Pointons encore le thème de la soirée, “Meat Is Murder”, agrémenté d’une vidéo vraiment trop datée montrant les souffrances occasionnées aux animaux lors de leur passage à l’abattoir. Un peu téléphoné, mais bon….

C’est à ce moment qu’il changera de chemise (pour une fois sans la donner en offrande à son public dévolu) alors que le batteur fera résonner l’énorme gong qui se trouvait derrière lui. Le tout se terminera avec un incroyable “Speedway” et surtout un particulièrement excellent “Irish Blood, English Heart”, le titre qui l’avait remis sur les rails en 2004 après quelques années de disette. Morrissey est venu et il a terrassé Lokeren en restant à la hauteur de sa légendaire réputation.

C’est à une heure du matin que les 2manydjs ont pris place derrière leurs platines pour faire danser la foule au son de leurs mixes savants. La réputation des frères Dewaele n’est clairement plus à démontrer, sachant qu’ils n’ont pas leur pareil pour faire habilement cohabiter rock et dance, permettant la communion de deux mondes au départ diamétralement opposés. La petite nouveauté réside dans le fait que désormais, des projections inspirées des pochettes des disques qu’ils diffusent agrémentent la scène. Metronomy, Goose, Blur, The Clash, Metallica, MGMT, c’est un blind test permanent avec la réponse qui s’inscrit sur l’écran à un moment ou à un autre. Et c’est là que l’on est un peu perplexe. Comment font-ils pour mixer en même temps musique et image? Tout a l’air très préparé et laisse finalement peu de place à l’improvisation, impression confirmée par des spectateurs pour qui le set de ce soir avait des airs de déjà vu. Ceci dit, ils restent efficaces et le site était encore généreusement garni lorsqu’ils ont replié leur matériel. Les organisateurs des Lokerse Feesten ont encore visé juste…

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