MOUNTAIN : UN VRAI SOMMET !
West and Laing’s MOUNTAIN Spirit of 66 20 février 2003 Pour l’historique, je vous renvoie à la bio du groupe sur l’excellent site où vous vous trouvez à l’instant (cliquez sur « Encyclopédies » si vous êtes membres ou faites vous membres que diable, c’est gratuit !) non sans rappeler que Mountain a « virtuellement » démarré par l’album solo (du même nom) de Leslie West (1969) puis le plus collectif «( Mountain) Climbing » (1970) suivi par « Nantucket Sleighride » et « Flowers of Evil » (la même année : 1971).
On comptera aussi dans les tout bons moments du groupe, le live 1972 : « The Road Goes On Forever ». Je ne me risquerai pas à affirmer (comme certains) que la messe était dite dès ce moment, puisqu’on vivra encore les exploits du sublime trio « West/Bruce/Laing » mais nous ne sommes pas loin de la vérité.
Le reste, pour Mountain, ne fut que redites ou tentatives météoriques de retrouver le lustre d’antan.
Par contre, les diverses performances individuelles de chacun des membres initiaux furent particulièrement dignes d’estime et de respect.
Les deux albums « blues » de West (1988 et 1994) représentent de véritables petits chefs d’œuvres et « The Secret Sessions » (1977) de Corky Laing avec, excusez du peu, Felix Pappalardi, Ian Hunter, Mick Ronson, Todd Rundgren et John Sebastian (oops !) est une authentique merveille, disponible depuis 1999, chez Pet Rock.
En 1995, toutefois, comme pour nous consoler de quelques errements, paraît le double Cd compil de Mountain « Over The Top » et les deux bonus avec Noel Redding (ex-J. Hendrix Experience), West et Laing dans cette formule trio qui leur va comme un gant (qui a dit « à trois doigts », hein ?).
Enfin, pour ceux que la chose intéresse, voici la discographie complète du groupe telle qu’elle apparaît sur le website officiel :
Leslie West Mountain released 1969
Mountain Climbing Aug. 28 1970 released March 7 1970
Nantucket Sleighride May 26 1971 released Feb. 6 1971
Flowers of Evil released Dec. 11 1971
Mountain Live Road Goes On Forever released May 13 1972
BO Mountain Nov. 10 1989 released Feb. 24 1973
Twin Peaks released Feb. 23 1974
Avalanche released July 27 1974
Go For Your Life released March 9 1985
Over The Top released 1995
Man’s World released 1996
Blood of the Sun released 1996
Super Hits released 1998
Mountain Extended Versions released 2000
King Biscuits live Greatest Hits released 2000
On the Mark (1) released 2002
Mystic Fire released 2002.
On reparlera des deux derniers albums plus loin mais d’abord le show.
Difficile d’aborder des légendes vivantes sans risquer de glisser dans la pré-nécro ou le panégyrique.
D’autant que , comme je l’avais déjà entraperçu avec Buddy Miles dans cette même salle, nos héros d’hier gardent parfois un égo surdimensionné par rapport à la réalité et sans dire qu’ils se la jouent, il faut bien avouer qu’un petit peu plus de simplicité ne ferait pas de tort à la cause du rock. Certaines attitudes un peu empruntées ne trompent, d’ailleurs, pas l’œil attentif.
Néanmoins, c’est très gentiment que Leslie West s’est prêté au jeu des autographes et des photos de famille…après le concert.
Le bassiste Ritchie (Ron-Wood-Motley-Crue-look) Scarlet fraîchement rallié à la cause « montagneuse » reste, lui, relativement accessible. C’est finalement Corky Laing qui paraît le plus cool de la bande, même si ce brave homme s’est barré fissa le premier en loucedé… (m’en fous j’ai eu mon drumstick dédicacé pour Polo, merci Christophe !).
Encore une remarque : deux de ces gars-là étaient à Woodstock . Ils ont mis le feu à la plaine de Bethel en propageant un son nouveau et en défrichant le terrain de la musique heavy. Ils ont ménagé ainsi l’espace pour la dizaine des mega-groupes qui n’attendaient que cela. Du Led au Sabbath, de Grand Funk aux Stooges, de Deep Purple à Aerosmith, tous leur doivent quelque chose. En ce sens là, MOUNTAIN est un grand groupe. Même si sa carrière réelle se résume à trois disques, la capacité créative et le sens de la formule musclée des New-Yorkais ont trouvé sur ces vinyles un terreau magnifique pour ensemencer le hard-rock.
Vue sous cet angle, leur présence à Verviers est un véritable événement, une performance de plus pour Francis Géron toujours affûté pour proposer des affiches magiques. Il ne fallait pas les rater, c’est sans doute ce qu’ont pensé les trois-cents et quelques connaisseurs qui s’étaient donné rendez-vous au Spirit.
Réglage des turbines sur « Blood of the Sun », super saccadé, lourd et fort.
On sent déjà la puissance s’installer. Leslie West impérial, massif et appliqué impulse immédiatement le son par des effets de manche décidés quoiqu’ encore un peu décalés et parfois longuets. Il a sur le nez des lunettes fumées amusantes, à double vitrage (si j’ose dire) qui s’ouvrent comme des fenêtres selon qu’il cherche ou non l’effet « sunglass ». Derrière lui (peu visible vu la corpulence), Corky Laing s’applique avec détermination.
On a beau dire et répéter que c’est un grand batteur, cela se mesure instantanément dans l’art de lier les coups et surtout dans la constance de la frappe. C’est-à-dire qu’il fabrique réellement un univers sonore qui plus que de ponctuer simplement le rythme, structure littéralement le beat et participe indiscutablement au réchauffement de l’atmosphère. Il élève de quelques degrés le feu qui couve dans les amplis. La justesse de sa frappe et la précision de ses enchaînements représentent, un véritable show dans le show… Un régal !!!
Et la voix de Leslie West ! Mais oui, la voix !!! Elle a gagné en profondeur avec le temps. Même si de petits réglages et parfois la position par rapport au micro l’amoindrissent de temps en temps, faut dire que l’entame de « Why Dontcha », morceau de bravoure de l’époque W/B/L, fait remonter d’un coup près de trente-cinq ans de souvenirs… Ceux de l’épopée de l’humilité, quand tout restait à prouver et… à faire ! Le gimmick de base de ce titre est superbe et le coup de patte revient comme au bon vieux temps.
Gérald P. qui m’accompagne me fait remarquer qu’il y a trop de « réverb » sur la guitare et que le son est plutôt « open air ». Je crois qu’il a raison et que l’amplification conjuguée aux soli ravageurs de L/W rend la performance acoustiquement démesurée pour l’endroit, par moments. Ce n’était, en effet, pas obligatoire d’y aller si fort. (On peut se permettre de le dire, hein, c’est pas Francis qui mixe, eh eh !!!) Heureusement d’ailleurs que la structure même des chansons contient suffisamment de relief et de solidité mélodiques pour ne pas être broyée dans une avalanche de décibels un peu destroy…
Je recommande à tous ceux qui se piquent d’écrire des ballades, le sublime « For Yasgur’s Farm ». Il n’y a pas mieux pour comprendre la valeur intrinsèque de Mountain. Leslie West et ses compères ont atteint dans ce registre des sommets rarement égalés. La portée symbolique de la chanson dédiée au fermier qui prêta sa prairie en catastrophe pour organiser le célébrissime festival refusé au dernier moment par la municipalité de Woodstock, a de quoi faire verser une larme aux anciens combattants du R&R que nous sommes… Ce jour-là, en effet, un petit vieux a gommé les distances entre les générations et rendu crédible la musique de toute une jeunesse, alors que manifestement le gentil farmer était à des lieues et des lieues de cette forme d’expression. Quand il apparut sur scène à la demande des organisateurs, ce fut une explosion de joie et ses quelques mots hésitants sont restés dans toutes les mémoires : « je ne vois ici que des jeunes qui s’amusent et qui sont heureux de vivre… ».
« Crossroads », référence obligatoire à Cream, introduit par un long monologue de L/W précède un duo de chansons dont « Mutant X » assez percutant qui justifie à lui seul l’achat de l’album « Mystic Fire » lui-même précédé par un titre prémonitoire consacré au WTC « Sea of Fine » ( ? ).
Puis survint un tout grand moment de bonheur avec l’énorme « Theme from an imaginary western » bien plus emblématique encore que « Mississippi Queen », qui a donné définitivement ses lettres de noblesse à l’impro lente et musclée pétrie de sens et garantie « south blues for ever ». C’est un passage en revue musical de haut de gamme où les nuances résonnent plus encore que la grosse artillerie implacablement alignée. Je ne sais pas ce que le Dr Boogie en pense mais il m’avait l’air assez attentif à la question… Pour moi, c’est la plus belle, ample, serrée, faite de sacs et de ressacs, ondulant comme une vague intemporelle, magnifiée par de longs accords déchirants, toute empreinte de sobriété et d’une efficacité maximale. Le public réagit assez chaudement à ce chef-d’œuvre. Des effets sonores pump (parfois un peu gonflants) ponctuent régulièrement les temps morts. La reminiscence avec la rencontre du 3ème Type de Spielberg apporte toutefois une note d’humour rassurante.
« Close Encounters » me donne l’occasion de mesurer la justesse du jeu de Ritchie Scarlet et de sa « Schecter ». Le plus animé des trois bon-z-hommes paraît sorti d’un gig de Motley Crue mais sa présence a quelque chose de captivant. Même sur deux mètres carrés, il se donne, le gaillard. Je réalise (encore et toujours) combien la tâche du bassiste dans une configuration pareille est déterminante. Il ne suffit pas de plaquer les accords pour faire beau ou pour faire fort, il faut vraiment couvrir tous les angles et garder un maximum de lucidité et d’à-propos dans tout ce tintouin, pour rendre le son crédible et galber la puissance (j’ose…).
J’vous dis pas (si je l’dis) si « Nantucket Sleighride » a mis le feu au lac, là. Du délire. Oh que j’aime ce gros son musclé qui te pénètre de partout et actionne tes grandes aspirations sincères tendues vers un bonheur infini. Ca ressemble à l’entrée des 450.000 bikers, en Harley, à Sturgis au mois d’août (suis-je clair ?). Je vous conseille le dernier album pour en avoir un petit aperçu souvenir…
Ainsi nous acheminâmes-nous (maman le style !) un peu sonnés vers l’inévitable rappel qui n’avait rien à envier à la précédente, l’immortel « Mississippi Queen » à t’en mettre plein la vue et l’ouïe, actionné comme un soufflet de forge sur nos pauvres corps encore tout meurtris et moulus par l’énorme spectacle qui venait de défiler devant nos yeux.
Corky Laing et son look à la Alice Cooper, aux commandes, la machine s’est remise en marche, époustouflante, vers une nouvelle ascension de plaisirs insoupçonnés et ce n’est pas la « Star Spangle Banner » subliminale, si décriée par les temps qui courent, qui eût pu nous priver de cette jouissance sincère. C’est quand même un tout grand morceau cette affaire-là dis donc (ladidon). Remarque astucieuse d’un de mes potes sur place, on n’a jamais connu de vraie cover convaincante de ce titre (trop dangereux à mon avis).
On pouvait décemment regretter que la fin inéluctable des plaisirs approchât (euh… c’est un subjonctif imparfait, pas une faute hein…) programmée comme un tranchant de guillotine, même si un petit cadeau de dernière minute en la personne d’un superbe « Never In My Life » vint atténuer les effets de la déception.
Et ce fut la fin ! Rideau ! Une heure trente à tout casser… Les stars se couchent décidément de plus en plus tôt…
Comme disait Gégé, « t’enlève la demi-heure de démarrage et le quart d’heure de parlottes et t’as trois quarts d’heures de musique nette… !!! ».
Il est dur un peu, là, mon pote… parce que quand même, chaque morceau a une longueur plus que raisonnable et puis, les chefs d’œuvres, ça se contemple si fort qu’on ne voit pas le temps passer…
Je pense qu’il ne faut pas trop faire la fine bouche, ce concert était géant, trop peut-être pour nos frêles épaules (en tout cas moi ça me change un peu du blues unplugged hein… si vous voyez ce que je veux dire…). Une bonne baffe à la g… comme on aime pour rêver quelques jours en attendant le prochain…
C’est quoi déjà ? Ah ! Oui « Slick 57 » les déjantés de service… A voir absolument (et à entendre surtout).
A+ DD