Le bilan 2012 made in Wouty
Comme le veut la tradition, le calme relatif qui entoure la trêve des confiseurs permet de se retourner à tête reposée sur l’année en passe de se terminer. L’occasion de revenir sur les coups de cœur musicaux qui l’ont émaillée. Albums de l’année
Dans la catégorie phare, ce sont les Maccabees qui ont tenu le bon bout malgré le fait que “Given To The Wild”, leur troisième opus, soit sorti au mois de janvier. Un album d’une maturité étonnante que ne laissait certainement pas présager “Wall Of Arms” en 2009 et les prestations scéniques qui l’avaient accompagné. Ils ont en effet composé une plaque homogène hors de laquelle il est très compliqué de ressortir l’un ou l’autre extrait, tant il est indispensable de l’écouter dans son entièreté. Entre constructions délicates (“Child”, “Glimmer”), envolées mélodieuses (“Feel To Follow”, “Forever I’ve Known”) et ambiances majestueuses (“Unknow”), ils sont parvenus à passer du statut de bon groupe indépendant à celui d’incontournable sur une scène en plein renouveau.
Sur la seconde marche du podium, on retrouve Richard Hawley qui a bluffé tout son monde avec un septième album solo, l’impeccable “Standing At The Sky’s Edge”. L’ancien guitariste des Longpigs et (occasionnellement) de Pulp a laissé de côté ses influences de crooner pour se concentrer sur des compositions certes toujours très lyriques (“Before”), mais avec des atmosphères plus indie rock (“She Brings The Sunlight”) ou carrément prenantes (“Don’t Stare At The Sun”). Le résultat donne neuf titres que les adeptes de “Lady’s Bridge” (2007) découvriront avec beaucoup de surprise. Sa nomination au Mercury Music Prize ne doit rien à personne.
Zulu Winter, jeune groupe londonien, ferme la marche avec un premier album (“Language”) qui se permet de revisiter les règles du shoegazing en rendant le style accessible et poppy juste ce qu’il faut (“We Should Be Swimming”, “Key To My Heart”). Ce n’est pas un hasard si les Vaccines et, dans une moindre mesure, Keane, les ont emmenés sur les routes avec eux. Après un passage au Pukkelpop cet été, on les attend impatiemment avec une date en salle en tête d’affiche.
Albums belges de l’année
Au rayon belge, le premier album des liégeois de Roscoe (“Cracks”) est sorti assez facilement du lot, grâce à un travail patient et soigné. Ils ont en effet pris leur temps pour l’enregistrer et le résultat est à la hauteur des espérances. Omniprésents sur scène durant toute l’année, ils ont comblé leur relatif manque de charisme par une hargne et une détermination qui finit par les rendre attachants. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’ils ont réussi à trouver un son qui leur est propre, et se distancient ainsi du groupe dont ils se sont inspirés pour leur nom (Midlake, pour ne pas le citer). Une belle surprise.
Pas vraiment un album, mais avec sept titres et 35 minutes au compteur, “Wounded” ressemble davantage à un mini LP qu’à un simple EP. Les bruxellois de BRNS ont tout d’abord imposé le respect à coups de concerts avant de proposer l’objet en question. L’homogénéité sur scène n’a aucun mal à transparaître en studio même si c’est avant tout en live que le groupe de Timothée Philippe donne la pleine mesure de son talent. Et ce n’est pas le nombre de plus en plus croissant de fans qui s’égosillent sur “Mexico” qui vous diront le contraire.
Les troisièmes sont des habitués puisqu’ils avaient déjà obtenu une palme en 2008 et 2011. dEUS a réussi, par les temps qui courent, à sortir un nouvel album moins d’un an après la sortie du précédent. “Following Sea” a surpris, tant par le single avant coureur en français (le très Gainsbourien “Quatre Mains”) que par son relatif manque de promotion. Et, une fois n’est pas coutume, la Belgique n’a eu droit qu’à des apparitions en festivals. À l’heure actuelle, ce sera encore le cas en 2013 puisque seulement deux dates sont prévues en juillet, aux Ardentes et au Cactus Festival.
Singles de l’année
2012 n’aura pas été une année propice aux singles indépendants imparables. Toutefois, un irréductible anglais portant le nom de Fred Macpherson, connu dans le milieu pour saborder ses groupes avant d’enregistrer un album (Les Incompétents, Ox.Eagle.Lion.Man), va faire mentir cette légende en en sortant finalement un sous le nom de Spector (“Enjoy It While It Lasts”). Non seulement il va s’avérer d’excellente facture, mais les singles extraits, quelques part entre Blur et les Smiths, vont apporter un vent de fraîcheur sur les radios spécialisées. Parmi ceux-ci, on pointera “Chevy Thunder”, qui continuera à faire les beaux jours des soirées indie. Et quand on sait que le bonhomme est un entertainer né, cela ne fait que décupler le plaisir en live (on y revient).
En deuxième position, les Vaccines loupent d’une place la passe de deux (“Post Break-Up Sex” avait été notre single de l’année en 2011). “Teenage Icon”, malgré des paroles farfelues, peut se targuer de proposer des arrangements et un riff instantanément reconnaissables. Eux aussi ont fait fort en tournant sans relâche (si ce n’est pour permettre au chanteur Justin Young de soigner ses cordes vocales) et en enregistrant deux albums coup sur coup alors qu’ils ne se sont formés qu’en été 2010. Beaucoup moins Strokes que le premier, ils se placent dans la lignée de groupe à haut potentiel qui remplit des salles de plus en plus grandes.
La troisième place est occupée par le “Mexico” de BRNS dont on parle un peu plus haut et qui, dans un monde idéal, serait un hit single sur les radios nationales…
Concerts de l’année
L’été 2012 a vu se relever un festival dont on ne donnait plus cher de la peau suite aux événements tragiques qui l’avaient endeuillé l’an dernier. Mais il en fallait plus au Pukkelpop pour baisser pavillon. Pour preuve, l’édition de cette année s’est retrouvée sold out en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire. Et parmi le line-up, un groupe s’est clairement démarqué. Les Foo Fighters devaient jouer le 18 août 2011 mais les circonstances en ayant décidé autrement, Dave Grohl avait promis de revenir et, symboliquement, c’est le 18 août 2012 qu’il a assuré le show. D’un point de vue musical tout d’abord car la puissance du dernier album en date (“Wasting Light”) sera rendue au centuple sur scène, alors que les nombreux hits qui ont émaillé la carrière du groupe font indéniablement figure de classiques. Mais d’un point de vue émotionnel, on s’est également rendu compte du cœur d’artichaut qui se cache derrière les cheveux longs et les tatouages de l’ancien batteur de Nirvana. Son speech relatif aux événements en a ému plus d’un, au même titre que la minute de silence qui a rendu la plaine muette à 18h10 précisément un peu plus tôt dans la journée.
La médaille d’argent revient à des habitués de ces référendums puisque Kasabian avait obtenu le titre de concert de l’année en 2010 à l’AB alors que l’album “Velociraptor!” avait coiffé la couronne d’album de l’année voici douze mois. Présents pas moins de trois fois en Belgique en 2012, les natifs de Leicester ont éclaboussé le plat pays de leur classe. Au Cirque Royal en février, sur la grande scène de Werchter en juillet ou à Forest National en novembre, la machine a chaque fois mis tout le monde d’accord. Ils s’étaient autoproclamés meilleur groupe live sur le circuit au lendemain de la séparation d’Oasis et, honnêtement parlant, on n’est pas loin de la vérité.
Juste derrière, on retrouve l’ami Richard Hawley qui a littéralement envoûté l’Orangerie du Botanique le 5 juin. Généreux, fidèle à son style particulier presque hors du temps, courageux aussi (il s’est produit assis car il s’était cassé le pied quelques jours auparavant), le chanteur de Sheffield a fièrement présenté le précité “Standing At The Sky’s Edge” dont les extraits nerveux ont donné une autre dimension à sa voix inimitable. Le fait qu’il a rempli l’AB quatre mois plus tard démontre qu’il fait désormais partie des artistes avec lesquels il faut compter. Et c’est tout à fait mérité.
Premières parties de l’année
On rend ici hommage aux groupes ou aux artistes qui doivent souvent se produire devant une assemblée à moitié vide ou dissipée. Mais c’est dans de telles conditions qu’un réel talent se développe et que certains d’entre eux sortent du lot. Cette année, c’est The Magnetic North, en première partie de Other Lives le 2 avril, qui rafle la mise. Son leader, l’incroyable Erland Cooper, est loin d’être un débutant, tout comme le batteur Simon Tong (ex-The Verve). Ils faisaient déjà partie d’un projet précédent (Erland & The Carnival, dont les deux albums sont indispensables). Cette fois, ils se sont adjoint les services de Hannah Peel et de son violon magique, qui apportent une touche lyrique de toute beauté à l’ensemble. On se retrouve magistralement emporté dans un univers rêveur qui se retrouve en partie rendu dans leur conceptuel premier album, “Orkney: Symphony Of The Magnetic North”.
Les deuxièmes et troisièmes positions sont occupées par deux groupes dont on a déjà abondamment parlé dans les paragraphes précédents. Autant Spector (avant Florence + The Machine à l’AB le 31 mars) que BRNS (en support de Yeasayer le 8 décembre dans la même salle) ont posé les bases de la chaleureuse réception qu’ils reçoivent méritoirement aujourd’hui. Et lorsqu’ils se retrouvent conjointement à l’affiche avant Blood Red Shoes aux Nuits du Bota le 20 mai, on ne peut que vénérer le programmateur du Botanique.
Voilà, 2012 est définitivement derrière nous, place à 2013 et à de nouvelles aventures musicales. Celles-ci débuteront le 22 janvier avec Get Well Soon qui viendront en seconde session au Botanique après une prestation qui nous avait quelque peu laissés sur notre faim au Club de l’AB en octobre dernier. Long live rock ‘n’ roll!