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Le phénomène Jake BUGG s’attaque au Bota

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Cela faisait longtemps que le Botanique n’avait plus connu une soirée entourée d’une telle effervescence. En effet, le nombre de personnes qui cherchaient un ticket pour le concert archi sold out de Jake Bugg dépassait l’entendement. Il est vrai que le bonhomme fait l’objet d’une véritable hype outre-Manche et on était curieux de pouvoir le juger sur pièces à l’Orangerie ce dimanche 3 mars. D’un Jake à un Jack, il n’y a qu’un pas, puisque c’est à un certain Jack Savoretti qu’avait été confié le soin de lancer les festivités ce soir. Ou, en d’autres termes, un homme et sa guitare acoustique, mais surtout une voix rocailleuse et puissante. D’autant plus qu’il la conjugue avec son instrument d’une manière telle qu’il est impossible de ne pas se retrouver captivé par celui qui a déjà trois albums à son actif.

En général, dans ce type de configuration, il arrive toujours un moment où l’attention retombe et où l’on se surprend à penser à la direction que les compositions emprunteraient si d’autres musiciens se trouvaient sur scène. Mais ce type est tellement au point qu’on a l’impression qu’un accompagnement viendrait enrayer la belle mécanique. En tout cas, le public a apprécié et a bruyamment manifesté sa satisfaction entre les morceaux tout en observant, à la grande surprise du chanteur, un silence respectueux dès que la guitare se remettait en action. Une première partie idéale qui a parfaitement rempli sa fonction.

L’histoire de Jake Bugg ressemble à un conte de fées alternatif. Le futur auteur-compositeur était à peine né lorsqu’Oasis a sorti “Definitely Maybe” en 1994 et, aujourd’hui, il est encensé par Noel Gallagher en personne. Celui-ci l’a d’ailleurs invité à se produire en première partie de sa tournée nord-américaine avec ses High Flying Birds. Son premier album éponyme au son résolument sixties et au charme presque désuet a fait la nique aux émissions de téléréalité (qu’il dénigre complètement) en rentrant directement à la première position des charts britanniques. Pour couronner le tout, il a récemment été nominé aux Brit Awards dans la catégorie révélation de l’année, sans pour autant empêcher Ben Howard de rafler la mise.

Sans surprise, la playlist qui tourne pendant les soundchecks fait la part belle aux années 60 (le “Fake Tales Of San Francisco” des Arctic Monkeys sera l’unique intrus) se prolongera jusqu’à la montée sur scène des musiciens. Si un batteur et un bassiste accompagnent Jake, c’est ce dernier qui entamera seul à la guitare le spectacle avec “Fire”, la mini plage qui termine l’album. Un début tout en douceur qui va se poursuivre en crescendo avec deux faces B (“Kentucky” et “Love The Way You Do”) qui verra le trio prendre ses marques dans une Orangerie pleine à craquer.

Quoi qu’il en soit, il est assez incroyable de se rendre compte que le chanteur sur scène est un jeunot (il vient de fêter ses 19 ans) dont la voix rauque ne correspond en rien à son physique alors que ses influences entre folk et country qui font la part belle aux larges espaces américains n’intéressent généralement pas les garçons de son âge. Pourtant, en le voyant avec une coupe au bol que n’aurait pas renié Ian Brown ou Tim Burgess dans les années 90 et son style vestimentaire de rockeur cool en jeans et chemise, on le jurerait plutôt adepte de british indie music.

Les choses allaient réellement se mettre en place à partir de l’excellent “Seen It All”, à la puissance certes mesurée, mais à l’énergie bien réelle. Ce sont d’ailleurs les titres remuants qui vont nous faire le plus d’effets ce soir, parmi lesquels “Taste It” et une nouvelle composition de très bonne facture, “Slumville Sunrise” qui renvoie à Miles Kane plutôt qu’à Scott Walker.

Le reste du temps, on va principalement se laisser envoûter par sa voix tout bonnement impressionnante, comme sur les excellents “Slide” et surtout “Someplace” à l’interprétation soignée, qui vont nous donner la chair de poule. La partie acoustique vaudra elle aussi le déplacement, d’autant qu’il parvient à capter l’attention des spectateurs sans forcer le moins du monde. Ainsi, “Someone Told Me” et “Country Song” vont avoir l’effet escompté, avec une petite pointe à la Nick Drake (en moins névrosé) alors que “Note To Self” aurait pu être composé par Johnny Cash dans sa période dorée.

Ceci dit, on pourrait sans doute lui reprocher un certain manque d’enthousiasme, mais, à ce niveau, le public ne va pas lui faciliter la tâche en restant anormalement calme. Il ne s’agit visiblement pas d’une audience habituée à ce genre d’événement et l’atmosphère générale en pâtira quelque peu. Sauf en toute fin de set lorsqu’il va balancer ses hits “Two Fingers” (un rien loupé, cela dit) et “Lightning Bolt”. Comme par enchantement, l’ambiance montera alors d’un cran et le trio rejoindra les coulisses sous les acclamations de la foule.

Lors des rappels, Jake Bugg va généreusement interpréter un titre supplémentaire non prévu sur la set-list (le délicat “Saffron”) seul à la guitare, qui sera suivi de “Broken” dans les mêmes conditions pour un effet magique. Le groupe se retrouvera alors au grand complet pour la désormais classique cover du “Folson Prison Blues” du précité Johnny Cash, qu’il ne tardera sans doute pas à s’approprier avec classe. Avec une prestation annoncée au festival de Werchter cet été, il ne faudra plus s’attendre à voir Jake Bugg dans une salle aussi intime que l’Orangerie. Rendez-vous à l’AB à l’automne ?

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