Nuits du Bota 2013 : un final explosif signé BEACH FOSSILS
Cette année, les Nuits Botanique ont eu droit à un appendice. En effet, plus de dix jours après la phase classique de la manifestation, les playoffs se sont déroulés ce dimanche 26 mai. Ainsi, pendant que CoCoRosie envoûtait le Cirque Royal, le feu d’artifice final avait lieu à la Rotonde où les New Yorkais de Beach Fossils venaient présenter leur nouvel album, “Clash The Truth”. Il est 20h et il est difficile de croire qu’il s’agit d’un concert labellisé Nuits du Bota. Le chapiteau a été démonté, les tickets boissons n’ont plus cours et, surtout, les couloirs sont presque déserts. La bonne nouvelle, c’est que le prix de la bière est retombé à 2,20 EUR mais on est loin de l’effervescence qui caractérise normalement le festival.
Pourtant, la double affiche a fière allure puisqu’en guise de première partie, les vedettes de la soirée avaient invité The Phoenix Foundation, avec qui ils avaient notamment joué la veille à Amsterdam dans le cadre du festival London Calling. Les Néo-Zélandais ont eux aussi sorti récemment une nouvelle plaque, “Fandango”, qui fait suite au très réussi “Buffalo“ (2010). Une plaque ambitieuse par sa longueur mais également par sa richesse orchestrale.
C’est avec “Black Mould” qu’ils vont judicieusement entamer les débats. La plage d’intro de leur dernière livraison présente, il est vrai, une structure idéale pour ce type d’exercice. Les six musiciens vont avoir tout le loisir de se mettre en place pour ensuite sauter à pieds joints dans une version survitaminée de “Bitte Bitte”. Le leader Samuel Flynn Scott, chevelu, barbu et guitare à la main, alterne les deux micros qui se trouvent devant lui, pour un effet garanti. Il parvient en tout cas à trouver le parfait équilibre entre distorsion et son limpide tout en mettant en valeur sa voix posée.
Ses cinq compères font le spectacle autour de lui en alternant les instruments et les positions sur scène (seuls le batteur et le bassiste resteront à leur place). Mention spéciale au claviériste qui va, au gré des besoins, se muer en percussionniste et utiliser des objets pour le moins étranges (une sorte de ruche entourée de perles et une brique pour n’en citer que deux). Les nouveaux titres adoptent un format plus pop, ou en tout cas plus accessible au premier coup d’oreille (“Thames Soup”, “Supernatural”) même si les atmosphères d’“Inside Me Dead” seront aussi glaciales que le suggère son titre, tout comme le prenant “Morning Riff”.
Les fans dans la salle se délecteront des classiques du groupe tels le très court mais excellent “Damn The River” ou l’énergique “40 Years”, réclamé à corps et à cris par un spectateur. Ce généreux set (plus d’une heure) nous confirmera la bonne santé des natifs de Wellington. Affirmer qu’ils ont gagné en maturité serait un vain mot, malgré un final qui ressemblait presque à une jam soul et funky hors propos…
Beach Fossils, c’est d’abord et avant tout le projet de Dustin Payseur, une personnalité hyperactive dont les influences sont à chercher du côté du post punk de la toute fin des années 70 et qui a débarqué à Brooklyn dans le but d’y assouvir son rêve. Mais c’est aussi le groupe dans lequel a transité un certain Zachary Cole Smith, désormais à la barre de DIIV (dont le concert prévu aux Nuits du Bota le 12 puis le 14 mai a, pour la petite histoire, finalement été annulé).
Dustin Payseur, lui, est bien là et il est désormais associé au batteur Tommy Gardner. Quant au guitariste et au bassiste qui les entourent, ils en connaissent un bout sur l’art de manier leur instrument. A eux quatre, ils tournent “Clash The Truth”, un deuxième album produit par Ben Greenberg (le bassiste de The Men) sorti en février dernier sur le dynamique label Captured Tracks.
Il ne faudra pas plus de deux coups de batterie au leader pour se retrouver dans la fosse et chanter le titre d’intro au beau milieu du public en gesticulant généreusement. Un concert entamé sans round d’observation qui va déjà gagner en intensité lorsqu’il attrapera sa guitare à peine de retour sur scène avant d’envoyer “Generational Synthetic”.
Si on ferme les yeux, on s’imagine transporté une bonne trentaine d’années en arrière. Une basse ronflante proéminente, un batteur au jeu épileptique sur un instrument rudimentaire et une voix légèrement nasillarde. On pense à Joy Division, certes, mais l’aspect mélodieux renvoie plutôt au New Order de la période “Movement”, surtout que les vocaux font davantage penser à Bernard Sumner qu’à Ian Curtis.
Toujours est-il que tout s’enchaîne sans temps mort pour un effet garanti vu que l’énergie du live rend presque mollassonnes les versions studio (“Daydream”, “Vacation”). Ce n’est pas pour rien qu’ils se sont forgés une sérieuse réputation de groupe de scène. L’intensité et l’immédiateté des compositions qui dépassent rarement les trois minutes font le reste, au même titre que les intros imparables (“Taking Off”, “Calyer”). Quelque part, ils sont beaucoup plus authentiques et spontanés que White Lies ou Interpol. Plus démonstratifs également. On sent bien qu’ils ne sont pas minés par une quelconque dépression ni pas un genre dramatique qu’ils se sentent obligés d’adopter.
Pour le reste, les guitares de The Cure ou d’Echo & The Bunnymen ne sont jamais très loin (“Burn You Down”, “Birthday”), mais cela apparaît comme une évidence dans la noirceur de leur univers, bien servi par des jeux de lumières presque sinistres. Juste après le single “Careless”, ne préférant pas laisser tomber l’intensité, ils vont incorporer les rappels au set principal en jouant “Crashed Out” et “Twelve Roses” dans la foulée avant de saluer l’auditoire et de disparaître pour se retrouver presqu’aussitôt au stand merchandising. La réputation de Beach Fossils n’est donc pas usurpée. Au contraire, leurs prestations scéniques montrent à quel point ils doivent se sentir à l’étroit dans un studio d’enregistrement.