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Cat POWER sort ses griffes à l’AB

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La saison touche à sa fin mais cette année, les salles de concerts ont l’air de vouloir mettre un point d’honneur à la terminer en beauté. Le lendemain de The National au Cirque Royal, place à Cat Power qui était à l’affiche de l’Ancienne Belgique ce mercredi 26 juin, en support de son excellent album “Sun”.

Elle aurait dû s’y produire le 14 décembre dernier mais avait été contrainte d’annuler sa tournée européenne à la dernière minute pour cause de problèmes financiers et de soucis de santé. Vu que l’on connait sa fragilité psychologique susceptible de la rendre imprévisible, ce n’est que lorsqu’elle est montée sur scène que l’on a poussé un soupir de soulagement.

En guise d’avant-programme, l’AB avait convié Maya’s Moving Castle, un groupe gantois qui commence sérieusement à s’extirper du circuit obscur, et qui le mérite amplement. Au micro, on retrouve une certaine Maya qui doit admirer au plus haut point Natasha Khan (à qui on aurait cependant ôté le charisme et la présence scénique). D’autant que sa voix puissante accroche directement l’oreille.

Ceci dit, il ne s’agit pas du seul parallèle que l’on pourrait tracer avec Bat For Lashes. Les mélodies pleines de saveurs orientales subtiles et les arrangements rêveurs permettent de s’immiscer dans un univers pas encore tout à fait personnel mais qui pourrait le devenir. Dommage que la balance approximative ait gâché la moitié de leur prestation (nos tympans ne disent pas merci à l’ingénieur du son tant les coups de batterie les faisaient frétiller).

Charlyn Marie Marshall alia Cat Power a sorti il y a presqu’un an “Sun”, un neuvième album coloré et poppy, qui contraste avec ses précédentes livraisons et qui a séduit la critique autant que le public (elle a obtenu son premier top 10 US). Mais les apparences légères de la plaque ne doivent pas passer sous silence qu’elle a toujours un mal-être intérieur qui la ronge inexorablement. Elle est apparue sur scène une tasse de thé dans une main et un joint dans l’autre, qu’elle va s’empresser de filer aux spectateurs du premier rang. Bel exemple de respect de la loi anti-tabac…

Elle va ensuite entamer son set de la meilleure manière avec le bien nommé “The Greatest”. Ce petit bijou bourré d’intensité prend tout son sens en live et devient hyper prenant au fur et à mesure de sa savante construction. Les frissons sont au rendez-vous, notamment grâce à son impressionnante voix qui n’a rien perdu de sa superbe. Cheveux blonds peroxydés et veste en cuir bardé de son logo dans le dos (rose fluo !), elle semble pourtant un rien absente et lèvera les yeux au ciel à de nombreuses reprises. Tout au long de la soirée, elle va arpenter inlassablement la scène dans tous les sens.

Quelques mots d’excuse par rapport à l’annulation du mois de décembre et la voici partie dans “Cherokee”, l’excellente plage d’intro de “Sun”, devant des projections d’un ciel bleu parsemé de nuages. Les nouvelles compositions auront généralement droit à un habillage visuel de circonstance (“Manhattan” et ses gratte-ciels) ou pas (le diaporama de la population indienne sur “Human Being”, les hiéroglyphes sur “3, 6, 9”).

Elle va attraper une guitare au moment d’entamer “Silent Machine” et la version musclée de ce titre va nous faire réaliser que l’on est en train d’assister à un début de concert tout à fait parfait. A ses côtés, le claviériste au look de rockeur troquera de temps à autre son instrument pour s’adonner à ce qui à l’air d’être son dada : la guitare. Il va également étendre toute sa bienveillance lorsqu’il remarquera entre deux accords qu’une spectatrice est en train de faire un malaise. Il ira même jusqu’à lui donner sa bouteille d’eau avant de s’assurer que la situation soit sous contrôle. Les trois autres musiciennes observent quant à elles un rôle physiquement plus discret, mais musicalement essentiel.

La prestation sans faille va se poursuivre avec un “Manhattan” qui va faire la part belle au non-verbal (elle a l’air tout à fait habitée) mais surtout un hypnotique “King Rides By” aux guitares glaciales qui sera compensé par le piano mélancolique de “Bully”, un tout nouveau titre patiemment mis en place et interprété avec les tripes. Jusqu’ici, il n’y a quasiment rien à redire…

Les choses vont toutefois perdre de leur superbe par la suite, ou en tout cas devenir plus inégales. Sa reprise de Pedro Infante popularisée autant par Eartha Kitt que par Roberta Flack (“Angelitos Negros”) va poser question. Trop longue, trop bizarre ou trop latine (elle chante en espagnol), toujours est-il que pour la première fois de la soirée, on va regarder notre montre. “Always On My Own” va passer assez inaperçu et, un peu plus tard, le bluesy “I Don’t Blame You” va même se monter insipide.

Heureusement, des éclairs de génie viendront égayer la fin du set. “3, 6, 9” par exemple, repris en chœur par le public, un rythmé “Nothing But Time” agrémenté d’un mini film faisant la part belle aux vélos de cross ou encore un “Peace & Love” bien pêchu. Anecdote : pendant que les musiciens entament “Shivers” (une cover du regretté Rowland S. Howard), la voici qu’elle disparaît en backstage durant de longues minutes (un besoin pressant, un manque de quelque chose?). Pendant ce temps, le guitariste va prendre son pied en décochant des riffs de guitar hero jusqu’à ce qu’elle revienne prendre le micro et arranger le titre à sa manière en y incorporant judicieusement des paroles du “Never Tear Us Apart” d’INXS.

Le tout se terminera dans l’allégresse avec “Ruin”, un des meilleurs extraits de sa dernière plaque pendant lequel elle distribuera des fleurs aux premiers rangs. Visiblement surprise par l’accueil chaleureux et l’ovation que les spectateurs vont lui réserver, elle va laisser paraître une pointe d’émotion. Si elle ne peut cacher sa sensibilité à fleur de peau, lors d’une soirée comme celle-ci, il s’agit clairement d’un bonus. Pour rester honnête, on n’osait pas rêver d’une telle prestation au moment de pénétrer dans la salle…

One thought on “Cat POWER sort ses griffes à l’AB

  • Bonjour, juste 2 remarques. Je ne sais pas où vous étiez placé dans la salle mais étant à un mètre de la scène je n’ai absolument pas vu Chan Marshall entrer avec un joint… C’est amusant car lors de son dernier concert à Paris, un compte rendu disait qu’elle était entrée avec un verre de vin à la main, alors qu’à 2 pas de la scène également je peux témoigner que c’est faux. Comme quoi la perception des choses peut varier énormément…

    Autre remarque concernant le break pendant Shivers: les longues minutes ont duré exactement 2’45”, enregistrement à l’appui.

    Merci pour votre review, il est toujours intéressant de lire une impression autre que la sienne.

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