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Le nouveau Madensuyu dévoilé à l’AB Club

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Pour sa quatrième édition, le festival Autumn Falls a encore élargi son champ d’action et pourrait bien remplacer à moyen terme le regretté Domino Festival dans le cœur des aficionados de programmations pointues et variées, mais toujours de grande qualité. Exemple avec les Gantois de Madensuyu qui sont venus présenter leur nouvel album en primeur au Club de l’AB ce jeudi 28 novembre. Pointue et variée mais aussi atypique et déroutante, à l’instar de la première partie assurée par le duo turc Tugrun & Hasan, spécialement choisis par les vedettes de la soirée. Les deux paires de musiciens ont visiblement travaillé ensemble voici quelques années mais le parallèle s’arrête là car leurs styles sont diamétralement opposés.

Imaginez deux musiciens dans la force de l’âge, assis sur des chaises au bord de la scène et jouant d’instruments traditionnels tout en chantant des comptines locales dont la subtilité nous échappe complètement. Un petit coup d’œil autour de nous pour s’assurer que l’on ne s’est pas trompé d’étage et que l’on n’est pas en train d’assister à une soirée de mariage inspirée des rives du Bosphore. Mais non, ce sont bien des rockeurs qui ont visiblement l’air tout aussi surpris que nous…

Cinq ans après “D Is Done”, l’album qui les a révélés, et le nombre impressionnant de concerts qu’ils ont enchaîné dans la foulée, les gaillards de Madensuyu sortent ces jours-ci “Stabat Mater”, un troisième album fidèle à leur réputation. Excessivement complexe à la première écoute malgré une durée relativement courte (une bonne demi-heure), il commence à timidement se révéler au fur et à mesure de ses passages sur la platine. Mais avant d’analyser la prestation de ce soir, attardons-nous un instant sur le packaging dudit album.

A une période où de plus en plus de gens écoutent des playlists en ligne, se démarquer et rendre le stand merchandising attractif est essentiel et ils l’ont bien compris en proposant des objets au design original. Ils s’étaient déjà surpassés avec “D Is Done” et son fusible emprisonné dans l’arête du boîtier CD alors que le verso du livret en imitation miroir permettait de lire les crédits imprimés à l’envers. Mais ils ont encore fait plus fort cette fois, en remplaçant le booklet et ses annexes par des plaques de bois. Et encore, on ne vous parle pas de la pochette du vinyle en édition limitée minutieusement réalisée à la main dont le prix de vente avoisine la valeur d’un billet orange.

Ce soir, il s’agit de la release party de “Stabat Mater” et, dans un premier temps, ils vont strictement s’y tenir en interprétant l’intégralité de l’album (dans un ordre différent que sur le disque toutefois). Entamé avec “Hush Hum” et sa voix d’ange préenregistrée en guise d’intro, ils vont ensuite instantanément terrasser le public en se lançant dans une hypnotique version de “Dolorosa” à la rythmique énergique alors que “Ready I” montrera qu’ils sont déjà bien en place avec leur nouveau matériel.

S’ils se produisent eux aussi assis, l’intensité qu’ils dégagent est toute autre, comme vous pouvez l’imaginer. Le guitariste Stijn Ylode De Gezelle et le batteur Pieterjan Vervondel jouent ensemble depuis leur tendre enfance et l’évidente complicité qu’ils dégagent amplifie leur aisance scénique. D’ailleurs, la plupart du temps, ils jouent les yeux mi-clos, comme pour s’immiscer davantage dans leur univers. A ce sujet, “On The Long Run” est sans doute le nouveau titre le plus classique du groupe, avec sa voix particulière, sa construction en crescendo et une fausse mélodie qui change tout.

On remarquera également une légère tendance à s’inspirer de techniques math rock (“Mute Song” et sa rythmique infernale) même si dans leur chef, leur interprétation du style va nettement au-delà des restrictions imposées par celui-ci. Leurs compositions sont en effet nettement plus riches à défaut d’être chaleureuses et la voix, bien que généralement sous-mixée, intègre parfaitement l’équation. On appréciera notamment le déstructuré “Crucem” et son atmosphère glaciale que Ian Curtis aurait sans doute appréciée.

Comme expliqué plus haut, l’album prend du temps à se dévoiler mais, sur scène, on épingle des indices qui devraient permettre de résoudre certaines énigmes, même si cela prendra du temps. Ainsi, “Give” à l’atmosphère très douce offre un ressenti exquis que l’on souhaiterait voir prolongé alors que “Haul In / Hard Tide”, le titre le plus (et le mieux) chanté de la soirée rend presqu’un hommage déguisé à Lou Reed et à son Velvet Underground. Un moment troublant qui va, contre toute attente, mettre un point final au set principal.

Les rappels allaient, vous vous en doutez, mettre l’AB Club dans un état d’adrénaline indescriptible. “Tread On Tread Light” et son intro caractéristique à la batterie va tout d’abord nous renvoyer cinq ans en arrière avec une vision renouvelée avant qu’un époustouflant “Fafafafuckin'” ne détruise tout sur son passage et que “Ti:me” ne clôture les débats comme eux seuls savent le faire.

Laissons-leur quelques dates supplémentaires afin de leur permettre d’intégrer les nouveaux titres dans leur back catalogue et attendons. Quelque chose nous dit que leur tournée prévue début 2014 pourrait bien dynamiter les salles qu’ils visiteront à cette occasion…

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