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Mayhem : buffet froid végétarien à l’AB

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Mardi 20 mai. En point d’orgue de son projet IBM, l’Ancienne Belgique invite les suppôts du Métal le plus noir à fêter le trentième anniversaire du terrifiant Mayhem. IBM (Inspired By Black Metal) est un projet qui, au travers d’une série de concerts, d’expos et de conférences, tente de poser un regard sur l’influence qu’a pu avoir le Black Métal sur la musique (et l’art en général) contemporain. Il est donc plus que normal que Mayhem – l’un des groupes les plus influents et les plus inquiétants du genre – y ait une place de choix. Nous ne vous ferons pas l’affront de retracer l’itinéraire terrifiant et macabre de la bête (NDR : celles et ceux d’entre vous qui, jusqu’ici, ont bénéficié d’une pieuse ignorance trouveront sur la toile tous les détails sordides de la succession de suicides, de meurtres, d’incendies d’églises et d’autres histoires juteuses qui ont fait la réputation des terribles norvégiens.

Trente ans après ses premiers méfaits, Mayhem s’est racheté une conduite et son attitude n’inquiète plus la police. C’est donc sans crainte que nous pénétrons dans l’AB. Sans crainte ! Enfin presque ! Car malgré le décès prématuré de ses membres les plus ‘dangereux’, le groupe bénéficie encore d’une réputation scénique ‘salissante’ puisqu’elle fait la part belle aux artifices les plus sanglants : têtes de porcs empalées, auto mutilations, etc. Nous préférons donc laisser à la maison notre costume du dimanche et optons pour une tenue étanche et lavable en machine. La suite des évènements nous prouvera que nous avions tort : pas une goutte de sang ni un gramme de bidoche pour souligner les atmosphères glaciales du True Black norvégien : un véritable buffet froid végétarien !

Mais n’allons pas trop vite, car avant de pouvoir souffler les trente bougies du gâteau de Satan, il faut encore subir les tortures infligées par ses ‘Mignons’. Il est 19h50 lorsque nous pénétrons dans l’antre de la bête où Saille termine déjà son set. Difficile de juger une prestation sur deux titres seulement. Nous nous contenterons donc de constater que la formation Gantoise distille un Black Métal symphonique musclé et que ses musiciens, très propres sur eux (pas de maquillage, vêtements noirs sans taches et bien repassés), ne sont pas vraiment communicatifs puisqu’ils quittent la scène sans un signe et sans un au revoir. Les Parisiens de Merrimack ont été ajoutés sur l’affiche à la dernière minute. Moins ‘propres’ que leurs prédécesseurs, ces derniers affichent de jolis ‘corpse paint’ et balancent un Black Métal malsain qui se fait envoutant lorsqu’il évolue en ‘down tempo’ mais qui devient franchement assommant dès qu’il accélère le rythme. Si nous ajoutons à cela que les quelques excellents passages atmosphériques sont gâchés par les beuglements inarticulés et incompréhensibles du vocaliste, vous comprendrez aisément pourquoi nous attendons Mayhem avec une impatience grandissante.

Un petit passage au stand merchandising nous apprend qu’en trente ans de carrière, Mayhem a bien assimilé les lois du business. On trouve de tout au super marché des norvégiens : du T-shirt au CD en passant par le girlie, le hoodie, le 45 tours, le sac à main, le collier et même la petite culotte de soie estampillée du logo dégoulinant du gang. Retour dans la salle où les roadies s’affairent à installer un backdrop sur lequel on peut lire ‘The True Mayhem’ et les deux drapeaux géants ornés de crânes ailés qui serviront de décor.

9h10. Les norvégiens semblent impatients d’en découdre puisqu’ils débarquent sur scène avec cinq minutes d’avance sur l’horaire annoncé. Un enregistrement de l’instrumental tribal “Silvester Anfang” (NDR : extrait de la démo “DeathCrush” de 1987) sert d’intro au concert. Hellammer qui est le premier à entrer en scène, gagne ses fûts sous les vivats de la foule. Un guitariste encapuchonné, dont nous ne verrons pas une seule fois le visage durant toute la durée du set, s’installe à gauche de la scène. Necrobutcher, le bassiste (et seul membre originel du gang) prend place à droite, suivi de près par le second guitariste (Teloch ?). Attila Csihar, l’intriguant hurleur hongrois fait son entrée alors que résonnent les premières note de “Pagan Fears”, le premier des quatre extraits de l’album culte “De Mysteriis Dom Sathanas” de 1994 qui sera joué ce soir. Csihar, le visage grimé de couleurs rouges et noires, brandit une croix renversée confectionnée avec des fémurs humains. Que l’on aime ou pas son timbre de voix particulier, on ne peut qu’être impressionné par sa prestance et son charisme. Le Hongrois harangue la foule qui lui répond avec vigueur. Contrairement aux deux vocalistes qui l’ont précédé sur les planches de l’AB ce soir et qui semblaient penser qu’il faut ignorer la foule pour avoir l’air ‘evil’, Attila salue son public et dialogue avec lui. Les titres s’enchainent, plus terribles les uns que les autres. Nous en reconnaissons quelques uns au passage “Death Crush” et ” Chainsaw Gutsfuck” tirés de l’antique démo dont nous parlions plus haut ou encore les plus récents “My Death” et “Whore” (NDR : présenté par Necrobutcher comme ‘A song for your girlfriend’), extraits de l’album “Chimera” de 2004. A part Attila qui se démène comme un damné (NDR : ce qu’il est, probablement), les autres membres du groupe sont franchement statiques. Ceci, toutefois, n’enlève rien à l’aura maléfique qu’ils dégagent. La batterie est constamment entourée d’un halo de fumée et Hellhammer est quasi invisible pendant toute la durée du set. Tout le visuel du show repose donc sur les épaules de Csihar. Le hurleur n’épargne pas les mimiques effrayantes et multiplie les accessoires horrifiques pour nous mettre dans l’ambiance. A la croix satanique, il ajoute un crâne humain, et une corde de pendu. L’ensemble monté, il s’y attache comme Norman Bates aux restes momifiés de sa mère. Mayhem n’est pas Dimmu Borgir et ses compositions oscillent souvent entre le ‘Pas Franchement Accessible’ et le ‘Totalement Hermétique’. De notre poste avancé (pas très éloigné de la porte de sortie) nous remarquons que les curieux quittent peu à peu la salle. Bien sur, les fans véritables ne ratent pas une seconde du show. Statique (respectueux ?) pendant la première partie du set, le public commence doucement à se mouvoir. Quelques pogos se forment, quelques surfers sillonnent la vague de cheveux longs et gras. Dans la foulée, nous avons encore droit à “Psywar”, un extrait plutôt brutal du nouvel album “Esoteric Warfare” dont la sortie est prévue pour plus tard dans l’année ainsi qu’a quelques classiques intemporels tels que les envoutants “De Mysteriis Dom Sathanas” et “Freezing Moon”. Le final est monstrueux de violence puisqu’il revisite, pour deux titres d’un Black Rock’n’roll visqueux, la toute première démo “Pure Fucking Armageddon” sortie en 1986. Un moment de plaisir coupable.

Cassé par la déferlante de violence et de décibels qu’il vient de subir, le public de l’AB ne cherche même pas à en demander plus lorsque les lumières se rallument et que les haut-parleurs diffusent à tue tête le “I Put A Spell On You” de Screamin’ Jay Hawkins.

Quelle jolie fête d’anniversaire !

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