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Double dose d’Archive à l’AB

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Après avoir testé Forest National lors de leur dernière tournée en 2012, les Londoniens d’Archive sont revenus à un environnement plus humain pour célébrer la sortie de “Restriction”, leur nouvel album. Et le public leur a bien rendu puisque l’Ancienne Belgique était remplie comme un œuf ces mercredi 25 et jeudi 26 février.

Ceci dit, entre-temps, ils ont concrétisé un ambitieux projet en réalisant “Axiom”, un film d’une quarantaine de minutes pour lequel ils ont bien évidemment composé la musique. A moins que ce ne soit l’inverse. Toujours est-il que l’avant-programme était réservé à la projection de ce court-métrage tourné en noir et blanc qui, s’il ne s’adresse pas aux âmes sensibles, démontre une fois encore combien leur musique se transpose aisément sur écran grâce aux ambiances qu’elle dégage.

Surtout que dans ce cas, il est question d’atmosphères sinistres sur fond de fanatisme inquiétant (à ce sujet, il convient de mettre en avant la magistrale prestation de l’acteur qui joue le rôle du gourou Jon Preacher au réalisme troublant). Mais ce qu’il faut surtout retenir, c’est que le spectateur qui ira se replonger dans “Axiom” (l’album) va y trouver des moments d’une profondeur insoupçonnée lorsqu’isolés du film (“Distorted Angels” et la plage titulaire en tête). Les fans invétérés auraient peut-être préféré une première partie classique (le DVD se trouve en bonus avec la version CD) mais les novices et les curieux auront apprécié l’initiative.

N’ayons pas peur des mots, “With Us Until You’re Dead”, l’album précédent d’Archive, n’a pas rencontré nos attentes. Mais il semble que le projet précité leur a donné une nouvelle impulsion créative qui se retrouve dans “Restriction”, leur très recommandable dixième plaque dans laquelle ils vont abondamment se plonger ces deux soirs. C’est d’ailleurs avec un “Feel It” aux quatre fausses fins dynamitées que le show va débuter, juste après la diffusion de “Radioactivity”, le single de Kraftwerk en guise d’intro.


Réputé pour ses pléthoriques changements de personnel, le collectif londonien s’est stabilisé autour de huit membres à l’occasion de cette tournée. Aux côtés des têtes pensantes Darius Keeler et Danny Griffiths qui surveillent la manœuvre derrière leurs claviers respectifs de part et d’autre de la scène, trois personnalités vont se partager les vocaux. Des styles certes différents mais un seul dénominateur commun : l’émotion dégagée.

La galanterie nous pousse à mettre en avant Holly Martin dont la fluette silhouette contraste avec ses performances époustouflantes sur des titres comme “You Make Me Feel”, “End Of Our Days” et surtout un prenant “Black And Blue”. A vrai dire, c’est dans un environnement dépouillé qu’elle s’exprime le mieux, au point de donner des frissons. Elle fera des allers-retours au gré de la set-list.


A l’inverse de Pollard Berrier (devenu aussi chevelu que… joufflu) et de Dave Penn (généreusement barbu) dont la présence quasi permanente sur scène est requise du fait de leur statut combiné de musicien et de chanteur. A ce sujet, il convient de mettre en avant la prestation individuelle du second nommé qui s’affirme de plus en plus comme une pièce essentielle de l’échiquier d’Archive. Ses nombreuses prestations avec son projet parallèle (Birdpen) ont l’air de lui avoir donné une confiance à la fois instrumentale et vocale. Ainsi, il n’attrapera une guitare (son instrument de prédilection) qu’à partir du quatrième titre alors que son intervention sur “The Feeling Of Losing Everything” et “Third Quarter Storm” approcheront la perfection.


Il serait toutefois réducteur de limiter le groupe à de longues pièces planantes destinées aux mélomanes avertis. Car quand ils décident de passer à la vitesse supérieure, ils le font avec une énergie à rendre jaloux certains de leurs pairs. On connaissait déjà “Dangervisit” et ses trois instructions diffusées en lettres immenses sur l’écran (Feel, Trust, Obey), il faudra désormais y ajouter les petits nouveaux “Crushed” (tribal et puissant) et “Ladders” (nerveux sur scène). Un peu plus tard, “Numb”, se terminera avec pas moins de quatre guitares en action, même s’il aura mis du temps à démarrer au terme de dispensables incantations.

Ce qui nous amène à parler du ventre mou du concert, constitué, sans surprise, de deux extraits de “With Us Until You’re Dead” (“Conflict” et “Violently”), de surcroit joués l’un après l’autre. Peut-être que raboter la prestation d’un quart d’heure aurait laissé place à une intensité permanente. Ceci dit, on avait toujours la possibilité de s’imbiber des visuels, toujours de grande qualité dans leur chef. Occupant intelligemment les trois écrans géants disposés à l’arrière de la scène, ceux-ci remplissent parfaitement leur rôle en ajoutant une plus-value à des compositions qui ne manquent pas d’imagination (on revient à cet aspect visuel dont on parlait plus haut).

Pour ceux qui se le demandent, les deux soirées avaient tout à fait la même trame, à quelques rares exceptions près en ce qui concerne la set-list. Les spectateurs du jeudi ont ainsi eu droit à un titre supplémentaire (“Bridge Scene, issu de la BO de “Michel Vaillant”) mais ceux du mercredi ont reçu un (très long) “Waste” de derrière les fagots à la place. Les autres modifications ont concerné des compositions qu’ils n’avaient plus jouées depuis un petit temps réparties sur les deux shows (“Sleep”, “Nothing Else”, “Blood In Numbers”). Pour l’anecdote, le groupe semblait davantage libéré sur scène le second soir. Allez savoir.

Toujours est-il que le rappel allait sans surprise mettre le public en émoi avec un “Lights” de vingt minutes impeccablement exécuté selon la mise en scène utilisée en octobre 2006 dans cette même salle, à l’époque où ils entamaient leurs prestations avec ce titre. Chaque musicien est monté sur scène au fur et à mesure de l’avancement de l’intro afin de l’enrichir avant que Pollard Berrier ne touche la sensibilité de chacun avec sa voix troublante. Du grand art et un triomphe à la clé.

Photos © 2015 Denoual Coatleven

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