PacRock 2016 : indie glagla
La saison des festivals en plein air s’est officiellement ouverte ce samedi 23 avril à Pont-à-Celles avec la onzième édition du PacRock. Une affiche alléchante qui contrastait avec la météo, une fois de plus capricieuse. Les trombes d’eau de l’an dernier ont en effet fait place à des températures dignes d’un mois de février… Il en fallait toutefois plus pour refroidir l’ardeur des festivaliers qui ont rejoint en nombre le site. De notre côté, une histoire abracadabrante couplée à une grosse frayeur nous ont empêchés de fouler la plaine avant le début de soirée, pendant le set de Great Mountain Fire. Vu qu’ils n’ont pas révolutionné leur style, on en a donc profité pour récolter les commentaires concernant les concerts qui nous sont passés sous le nez. Parmi les prestations remarquées de l’après-midi, pointons celles de The K. et de Victoria+Jean mais ce sont surtout les Luxembourgeois de Mutiny On The Bounty qui ont visiblement fait l’unanimité.
Notre PacRock a donc commencé tardivement avec Laetitia Sheriff au Marquee (la petite scène couverte). Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la Française n’y est pas allée par quatre chemins pour marquer son territoire. Parfaitement entourée de deux excellents musiciens (un batteur et un guitariste), il ne lui faudra qu’un titre pour réchauffer l’assemblée, grâce à une voix fascinante et une présence qui n’est pas sans rappeler celle de PJ Harvey (son look aussi, d’ailleurs, même si on a l’impression d’avoir devant nous une jeune Joëlle Milquet). Musicalement, lorsqu’elle se lâche, on se retrouve dans un univers grungy qui rappelle les groupes de nanas des années 90 (Veruca Salt, The Breeders). Mais elle peut aussi se montrer tendre et troublante, tout en restant convaincante.
Lorsque l’on est arrivés sur la Main Stage, les Russes de Motorama avaient déjà entamé leur set, mais quelque chose ne tournait pas rond. Le chanteur, emmitouflé dans un gros anorak et coiffé d’une casquette, avait beau hurler dans son micro, le son renvoyé dans les enceintes semblait provenir de leur ville natale de Rostov-on-Don sans amplification. Pour le public en tout cas car les retours sur scène, eux, fonctionnaient normalement. Pourtant, la voix austère de Vladislav Parshin est essentielle à l’équilibre des compositions.
Il aura fallu trois titres à l’ingénieur du son pour régler le problème et nous permettre d’enfin profiter de ces sucreries post punk qui, bien que glaciales, gardent un sens de la mélodie qui les rendent digestes et accessibles au plus grand nombre. On pense davantage au “Movement” de New Order qu’au “Closer” de Joy Division avec une basse certes moins caractéristique mais une voix au moins aussi emblématique. Ajoutons un batteur qui tire le meilleur parti de son kit rudimentaire et des titres imparables (“Corona”, “Heavy Wave”) et on se retrouve avec un des groupes les plus injustement ignorés du circuit.
Retour au Marquee avec les deux sauvages de La Jungle qui, avouons-le, nous avaient laissés sur notre faim en première partie de Black Box Revelation à l’Eden de Charleroi voici un gros mois. Rien de cela ici, il faut croire que la température les a motivés à se surpasser. Toutes proportions gardées, on a pensé à Madensuyu, que l’on avait découvert ici-même en 2009. Même disposition (un batteur et un guitariste) mais une énergie encore plus décoiffante que celle dégagée par le duo Gantois. D’autant que le guitariste joue debout et laisse les textes au second plan. En effet, les compositions majoritairement instrumentales (quelques onomatopées mises à part) à tendance math rock s’appuient sur des riffs imparables (même si parfois un peu tirés en longueur) que complémentent la rythmique infernale du batteur. Ils devraient faire bonne figure en première partie de Ty Segall & The Muggers le 1er juin prochain au Botanique.
Sur la Main Stage, David Bartholomé était en train de fignoler les derniers soundchecks en vue de la prestation de son projet principal Sharko. L’occasion de prendre le temps de déguster un PacBurger toujours aussi succulent avant que le trio ne monte sur scène. Outre l’ami David qui porte une écharpe (mais pas de couvre-chef ridicule comme par le passé), son fidèle guitariste Teuk Henri fait toujours partie de l’aventure. Seul le batteur a une nouvelle fois changé (ils commencent d’ailleurs à en avoir une belle collection). Sept ans après un décevant “Dance On The Beast” suivi d’une parenthèse en solitaire, le gaillard est de retour avec un nouvel album, plus mature, “You Don’t Have To Worry”.
Avec sa voix caractéristique, son jeu de basse entêtant et son humour décapant, il va redevenir l’âme de Sharko. Une heure pendant laquelle on se rend compte qu’il a composé quelques tubes marquants (“I Went Down”, “Sweet Protection”, “Rock 1”) et qu’il n’a rien perdu de son talent à l’écoute des nouveaux titres présentés ce soir (“When I Was Your Age” et son clin d’œil à Justin Bieber, “You Don’t Have To Worry”). Le public, en tout cas, a apprécié et les pas de danse étaient légion. À moins que l’objectif poursuivi était de ne pas geler sur place…
À ce propos, de retour au Marquee, on a remarqué la présence d’un canon à chaleur qui fonctionnait à plein régime. Ceci dit, avec l’énergie dégagée par Electric Electric, le trio qui se produisait sur la scène, il n’était à la limite pas nécessaire (le batteur jouait d’ailleurs en… short et t-shirt). Les Français nous avaient bluffés au Dour Festival en 2013 mais ce soir, leurs compositions complexes et appuyées, un chouia tirées en longueur ont fini par nous lasser. Bien entendu, la symbiose rythmique qu’ils partagent impressionne mais on a l’impression par moments qu’ils jouent pour eux. Cela n’a en tout cas aucunement terni une affiche en tout point impeccable. L’année prochaine, avec le soleil en sus, gageons qu’elle sera parfaite.