Chronique d’une Mission à Leuven
Six mois après avoir présenté leur nouvel album dans l’atroce (acoustiquement parlant en tout cas) Waregem Expo, les légendes gothiques de The Mission étaient de retour dans une salle digne de ce nom, le Depot de Leuven, ce vendredi 12 mai. Le public s’était en tout cas déplacé en nombre pour y voir le groupe de Wayne Hussey à l’œuvre. Un public dont la moyenne d’âge se verra quelque peu réduite grâce à certains spectateurs accompagnés de leurs jeunes enfants. Comme leurs parents, ceux-ci arborent fièrement le t-shirt d’un groupe qui avait déjà effectué une tournée d’adieu lorsqu’ils n’étaient pas encore nés (on se souvient notamment des quatre soirées mémorables au Shepherd’s Bush Empire de Londres en 2008).
Depuis, ils se sont reformés pour célébrer le vingt-cinquième anniversaire du groupe et ont même sorti deux albums. Si le dispensable “The Brightest Light” (2013) n’apportait pas grand-chose à leur aura, il en va tout autrement du récent “Another Fall From Grace” qui renoue avec le son de leurs débuts, en grande partie grâce à la production de Tim Palmer, qui avait déjà collaboré à “God’s Own Medicine”, leur première plaque. On y voit également se succéder de vieilles connaissances à l’instar de Gary Numan, Martin Gore ou Julianne Regan (All About Eve).
Mais celle qui vole la vedette sur scène s’appelle Evi Vine, qui s’est non seulement occupée de la première partie d’impeccable manière, mais qui a également assuré les chœurs de sa voix envoûtante à la droite du leader. Un leader aux cheveux grisonnants qui va jouer la majeure partie du concert avec une magnifique douze cordes blanche sertie de feuilles d’or et d’un discret logo du groupe. En revanche, on peut légitimement se poser des questions quant à sa tenue qui associait veste de pyjama et longue robe noire. Le tout en arborant des lunettes de soleil qui vont rester vissées sur son nez tout le set durant.
Cela ne va toutefois pas l’empêcher de donner une prestation intense entamée avec “Beyond The Pale” qui succèdera à une curieuse intro inspirée d’une fanfare jouant du french cancan. Aux côtés du couple vocal, on retrouve le guitariste Simon Hinkler (lui, c’est son chapeau qui ne quittera pas son crâne), le bassiste Craig Adams (désormais complètement clache) et le batteur Mike Kelly, un ex de Spear Of Destiny.
Bien entendu, la majorité des spectateurs sont venus pour entendre les classiques datant de la période 1986-1990 et c’est à peu de choses près ce que le groupe va offrir ce soir. À notre grand regret, ils n’ont ainsi puisé que par deux fois seulement dans le dernier album via l’efficace “Met-Amor-Phosis” et le pseudo acoustique “Can’t See The Ocean From The Rain”. Pourtant, il recèle de tubes potentiels (“Another Fall From Grace”, “Blood On The Road”) que l’on aurait bien voulu voir évoluer sur scène.
On a donc eu droit à une set-list gothique loin de se révéler nostalgique. Des titres comme “Over The Hills And Far Away”, “Garden Of Delight” et “Butterfly On A Wheel” n’ont en effet pas pris une ride. Bon, bien entendu, on retrouve les mêmes scènes à chaque concert de The Mission, qu’il s’agisse des pyramides humaines qui se forment dès l’intro de “Tower Of Strength” (réarrangé sans ses influences orientales ce soir) ou des bras qui se lèvent comme par magie au son de l’excellent “Belief” ou du toujours aussi efficace “Wasteland” en clôture du set principal.
Wayne et Evi reviendront les premiers sur scène pour une version acoustique à tomber d’“Island In A Stream” suivie d’un “Severina” un peu mou du genou. On sait par ailleurs que Wayne est un grand amateur de covers et celle qu’il avait prévue (outre le réapproprié “Like A Hurricane” de Neil Young joué en début de set) avait de quoi surprendre. En effet, il s’est attaqué au “Marian” de Sisters Of Mercy, groupe dont il a fait partie jusqu’en 1985 avant de le quitter en mauvais terme. Précisons tout de même qu’il a coécrit ce titre avec Andrew Eldritch et que sa version downtempo ne sera pas loin de sublimer l’originale…
La soirée n’était pas encore terminée pour autant puisque deux titres supplémentaires seront encore joués. Un très chaud “Crystal Ocean” et, sans surprise, un “Deliverance” qui valait à lui seul le déplacement. Ne fut-ce que pour l’image insolite d’un spectateur sur les épaules d’un condisciple qui communiquait par gestes interposés avec Wayne avant que ce dernier ne lui lance sa bouteille de vin (à moitié remplie). Ceci est mon sang, buvez-en tous, comme dirait l’autre…