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Paul Weller fait sa révolution

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À 59 ans (il les a fêtés voici quelques jours), Paul Weller n’a sans doute jamais été aussi actif. Rien qu’en ce début d’année, il a publié la BO d’un film (“Jawbone”) ainsi qu’un nouvel album solo qu’il est venu présenter sur la scène de l’Ancienne Belgique ce lundi 5 juin. Il avait en outre prévu un set kilométrique, raison pour laquelle le support signé Jacle Bow a entamé les débats peu après 19h devant un parterre relativement clairsemé. Le quatuor Bruxellois connaît bien l’endroit pour y avoir occupé le poste d’artiste en résidence le temps d’une saison après avoir fait bonne figure dans le cadre du concours De Nieuwe Lichting organisé par Studio Brussel en 2015.

Largement inspirées par le rock des années septante, leurs compositions sont portées par la voix rocailleuse du leader, quelque part entre Mick Jagger et Rod Stewart à laquelle il convient d’ajouter la fougue qui leur a été naturellement transmise par leur producteur Mario Goossens (le batteur de Triggerfinger). Par ailleurs, le fait qu’ils jouent dans un mouchoir de poche devant l’imposant matériel de Paul Weller amplifie l’intensité alors que les séquences interactives diffusées sur les postes de télévision vintage (dont les écrans ont été remplacés par du matériel high tech) sont à deux doigts d’apporter une dynamique anachronique.

Avec “A Kind Revolution”, son treizième album solo, Paul Weller démontre une fois encore qu’il n’est pas encore disposé à prendre sa retraite. Au contraire, il a même embarqué dans l’aventure Robert Wyatt et Boy George qui, eux, ont depuis longtemps adopté des profils nettement plus discrets. Les deux titres sur lesquels ils interviennent sont d’ailleurs les plus atypiques d’une plaque nettement plus posée que le nerveux “Saturns Pattern” sorti voici deux ans.

Curieusement, c’est justement dans cette plaque que sera puisée l’essentiel du début du set, entamé avec “I’m Where I Should Be”, un titre qui résume à lui seul l’énergie positive qu’il dégage sur scène via une cool attitude à toute épreuve. Souriant, fit and well, il arbore sans complexe une chevelure plus que grisonnante et un t-shirt blanc moulant. Sa voix reconnaissable entre mille va envoyer “Long Time” en enfer et “Going My Way” dans un paradis cotonneux en l’espace de cinq minutes.

Juste avant, le jazzy “My Ever Changing Moods” issu de sa période Style Council va imposer le respect, au même titre que “Have You Ever Had It Blue” un peu plus tard, bien servi par la guitare du fidèle Steve Cradock. À ses côtés, on retrouve également deux batteurs (dont un davantage axé percussions qui va majoritairement jouer debout), un claviériste et un bassiste. Chacun aura droit à son moment de gloire pendant la soirée, preuve de l’humanité et de la sagesse qui habite le Modfather.

Celui-ci va bien entendu s’arrêter sur quelques nouvelles compositions dont on retiendra surtout un rugueux “Nova” et un groovant “She Moves With The Fayre” alors que “Woo Sé Mama”, chanté derrière le piano à gauche de la scène pourrait atteindre une dimension supplémentaire bardé d’un environnement gospel même si son traitement boogie à la T-Rex lui confère une direction inattendue.

Avec un total confondu de vingt-cinq albums studio en quarante ans de carrière, le bonhomme a l’embarras du choix pour composer ses set-lists et force est de constater qu’il met un point d’honneur à non seulement se balader dans toutes ses périodes mais aussi de varier les plaisirs et les versions. Ainsi, aux côtés d’un rare “You Do Something To Me” au piano, il nous gratifiera d’un “Into Tomorrow” digne des meilleurs moments de la vague Madchester et d’une version toutes guitares en avant de “Wild Blue Yonder”.

Grand consommateur d’onglets, il va également sortir grandi d’un bordélique “White Sky” et il y en aura même pour les nostalgiques de The Jam puisque “Start!” va clôturer le set principal sur une note soul sixties. Tout ceci avant des rappels parfaitement structurés qui verront tout d’abord les roadies installer quatre tabourets sur le devant de la scène et accorder des guitares acoustiques, dont une douze cordes que maniera Steve Cradock pour notamment une délicate version de “Wild Wood”.

Les nombreux Anglais dans la salle allaient ensuite nous casser les oreilles en hurlant (faux) les paroles de “Monday” (un autre morceau de The Jam) nous forçant à porter nos bouchons généralement superflus lors des parties acoustiques. Un excellent nouveau titre (“What Would He Say”) et un méconnaissable “Out Of The Sinking” refermeront cette parenthèse unplugged.

Le groupe reviendra rapidement sur scène pour la suite des rappels, dans une configuration plus traditionnelle mais sans pour autant choisir la facilité, “These City Streets” et “Hung Up” n’étant pas les titres les plus évidents à ce moment de la soirée. “Come On / Let’s Go” et “The Changingman” se chargeront ensuite de rééquilibrer la balance. Alors que l’on pensait que tout était terminé, ils joueront un ultime “Broken Stones” qui achèvera un set généreux, à l’image de l’ami Paul. Ce n’est en effet pas tous les jours qu’un artiste annonce un show de 2h20 et tient parole…

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