Jake Bugg en version acoustique à l’AB
Depuis son accession à la gloire et son pied-de-nez aux émissions de télé-réalité, Jake Bugg n’a pas chômé puisqu’il a publié en septembre dernier “Hearts That Strain”, son quatrième album en cinq ans. Pour le promotionner, il s’est embarqué dans une tournée solo acoustique qui faisait escale à l’Ancienne Belgique ce mercredi 31 janvier. Et pour rester dans le concept, il avait demandé à sa voisine Georgie, originaire de Nottingham elle aussi, de se produire seule avec sa guitare en vue de faire patienter des spectateurs qui, malheureusement, ne le lui ont pas rendu. Extrêmement dissipés, certains énergumènes vont ainsi passer à côté de la voix soul et chaleureuse de la jeune artiste, largement influencée par les sixties. Elle reprend notamment à son compte le “Be My Baby” des Ronettes alors que certains titres renvoient du côté de Carole King. Etant donné que l’industrie musicale lui fait les yeux doux (elle est signée chez Sony Music en Angleterre et Matthew E. White lui a déjà produit un single), elle devrait sortir de l’anonymat d’ici peu. Et logiquement imposer naturellement le respect lors de son prochain passage dans nos contrées.
À l’instar de “Shangri-La”, son deuxième album qui l’a vu collaborer avec le célèbre Rick Rubin dans son antre Californien, Jake Bugg a décidé de marquer le coup pour sa quatrième livraison. Il a donc traversé l’Atlantique direction le rêve américain et plus particulièrement Nashville, où il a mis en boîte “Hearts That Strain” entouré des légendes locales que sont le claviériste Bobby Wood et le batteur Gene Chrisman, membres des célèbres Memphis Boys qui ont enregistré avec les plus grands (Elvis Presley, Aretha Franklin, Dusty Springfield,…).
Mais il a parallèlement mesuré ses compétences à la guitare avec Dan Auerback (The Black Keys) et Matt Sweeney qui ont également co-écrit certains titres. Une dream team qui a envoyé l’album dans le top 10 anglais et dont l’excellente plage titulaire sera le titre d’intro ce soir, mettant d’emblée en avant sa caractéristique voix nasillarde dans un environnement dépouillé aux lumières tamisées.
En effet, la configuration de la scène n’est pas sans rappeler celle qui a été le théâtre du concert de
St. Vincent dans cette même salle voici quelques semaines. Sauf qu’une chaise pliante agrémentée d’un coussin et entourée de spots discrets va tout de même accueillir le chanteur qui ne la quittera à aucun moment, se contentant de réceptionner les guitares apportées par le roadie. Un roadie qui aura préalablement bouclé la balance en trois minutes chrono et qui ravitaillera son boss en gin tonic tout au long de sa prestation.
Parmi les titres de son nouvel album, on retiendra le rythme faussement tribal de “Bigger Lover”, l’enflammé “In The Event Of My Demise” et le délicat “Waiting” en solo (il chante avec Noah Cyrus, la sœur de l’autre, sur l’album). Seul regret, l’absence de l’impeccable “The Man On Stage”, pourtant de circonstance ce soir. Le bonhomme va toutefois profiter de l’occasion pour revisiter son back catalogue et lui donner de nouvelles visions country enlevées (“Simple As This”, “There’s A Beast And We All Feed It”) ou en leur conférant un cachet encore plus intime (“Slide”, “Broken” interprété les yeux mi-clos). Il démontrera par la même occasion son époustouflante dextérité à la guitare (“Strange Creatures”, “Slumville Sunrise”).
Particulièrement souriant (cela change de ses précédentes visites), il sera aussi assez bavard en parsemant son set d’anecdotes. On apprendra notamment qu’il a composé “Saffron” à l’âge de seize ans et qu’il s’est inspiré de sa ville natale au moment d’écrire “Trouble Town”. Bienveillant également puisqu’il interrompra volontairement sa prestation en attendant que l’on porte secours à une personne prise d’un malaise dans le public. Sans compter qu’il intégrera dans son set “Someone Told Me” sur la simple demande d’un spectateur.
Par ailleurs, il semble qu’“On My One”, son album précédent, n’a plus la cote à ses yeux puisqu’il n’en tirera que “The Love We’re Hoping For” en tout fin de set avant que “Two Fingers” et “Lightning Bolt”, les deux bombes qui ouvraient son premier effort éponyme de 2012, ne fassent vibrer l’AB. Acoustique, mais pas trop tout de même…