Baxter Dury, Prince Of Tears mais pas que…
C’est un Baxter Dury affaibli qui a foulé la scène de l’Orangerie du Botanique ce jeudi 8 mars. Affaibli mais avec encore suffisamment d’énergie que pour mener à bien la dernière date de sa tournée européenne en support de “Prince Of Tears”, son excellent nouvel album.
Dernière date commune également avec Halo Maud, le quatuor qui l’a suivi sur les routes britanniques et françaises depuis la mi-février. Emmené par une chanteuse à la voix feutrée au service de compositions langoureuses et jazzy (à l’instar du nouveau single “Tu sais comme je suis”), le groupe sait également montrer les crocs, à l’instar du dernier titre en deux phases qui la verra balancer des vocalises pendant que ses partenaires (un claviériste, un batteur et un bassiste) assureront un environnement sonore décomplexé.
L’année 2016 de Baxter Dury a été particulièrement douloureuse. En cause, une rupture sentimentale qui l’a presqu’anéanti. Mais, chance pour nous, c’est dans le chagrin et le désespoir qu’il a été puiser l’inspiration qui jalonne “Prince Of Tears”, son cinquième album et sans aucun doute le plus abouti à ce jour. Un album à l’atmosphère pas forcément tristounette mais dans lequel il panse ses blessures avec toute l’ironie qui le caractérise.
En cette journée internationale des droits de la femme, il aurait pu honorer Jane, Francesca, Lisa ou Claire, mais c’est finalement avec “Isabel” qu’il ouvrira le débat. Dans le même ordre d’idées et en bon gentleman, il mettra en avant ses deux choristes dont une indispensable Madeleine Hart vêtue d’un top à paillettes du plus bel effet. Son intervention sur le nouveau “Listen” dans la foulée (à la vibe très Dr. Dre) lancera définitivement la soirée.
Dandy classe et grisonnant, Baxter se produit en col et cravate et porte à merveille une barbe naissante. Sans instrument (si ce n’est un synthé à sa droite sur lequel il pianotera de temps à autre), il a le loisir de laisser libre cours à ses délires visuels, entre pas de danse, position couchée et diverses pitreries. À ses côtés, on retrouve également un excellent guitariste, un bassiste au look de jeune premier un peu coincé et un batteur très en verve.
Après un “Picnic On The Edge” bien puissant, le bonhomme enchaînera une demi-douzaine de nouvelles compositions qui nous confirmeront l’évidente complicité avec sa choriste favorite, au point qu’il la laissera seule sur le langoureux (et un chouia borderline) “Porcelain”. Mais la complémentarité de leurs voix sur “Mungo” ou le délicat “Wanna” toucheront en plein cœur. Le style inimitable de Baxter qui déclame plus qu’il ne chante atteindra des sommets sur “Almond Milk” et surtout le délirant “Oi” alors que l’énergie de “Letter Bomb” sera inversement proportionnelle à la richesse de son texte.
Un peu plus tard, les seules incursions dans son album précédent se limiteront à “Pleasure” et “Palm Trees” qui restent de petites pépites pop à consommer sans modération. Tiens, en parlant de consommation, lui qui était assez porté sur la bouteille a l’air d’avoir stoppé net tout breuvage alcoolisé et se limitera à deux gorgées d’eau ce soir. Tournée minérale, bonne résolution ou simple conséquence de son état fébrile confirmé par un tweet le lendemain ? La question reste posée…
Toutes ces considérations ne vont toutefois pas empêcher l’intense final “Miami”, tout en crescendo et bardé d’une entêtante basse, de s’imposer comme le moment fort de sa prestation. À moins que ce ne soit plutôt le majestueux “Prince Of Tears”, deuxième et dernier titre du rappel qui tutoiera la perfection après “Cocaine Man”, le plus ancien morceau joué ce soir (sur son deuxième album en 2005). Si la pochette de l’album illustre Baxter seul et perdu au milieu du désert, on peut affirmer sans crainte que les épreuves qui ont mené vers ses nouvelles compositions l’ont aidé à le traverser. Pour notre plus grand bonheur.