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Kevin Coyne et Brendan Croker au Spirit

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Un duo sublime pour un blues haut de gamme ! Ce samedi 9 novembre 2002, c’était la troisième fois que Kevin Coyne honorait le Spirit of 66 de sa présence, après les concerts des 6/2 et 26/10/2001 (vous vous rendez compte de la fabuleuse année en question…). Aujourd’hui il est accompagné (mais le mot est-il judicieux ?) par Brendan Croker un personnage terriblement attachant.

Revenons d’abord à Kevin Coyne.

Ce géant du rock et du blues compte à ce jour 41 albums à son actif (bootlegs, compil’s et, au moins, deux ou trois opus de Siren son premier groupe, non compris).

Le dernier né est « Life Is Almost Wonderful » (2002) avec Brendan Croker, son complice de la nouvelle tournée.

Un petit rappel pour ceux qui ne connaîtraient pas cet « inclassable artiste tendance blues ».

Natif du centre de l’Angleterre, Kevin Coyne réside aujourd’hui en Allemagne. Son parcours est assez atypique puisqu’il fait des études de graphisme et de peinture mais travaille dans les milieux psychiatriques et sociaux pendant quatre ans.

C’est en 1969 qu’il est repéré par John Peel, DJ de Radio 1, qui le découvre dans un groupe du circuit underground londonien baptisé SIREN.

Il enregistre alors deux albums totalement confidentiels avant de reprendre son métier d’éducateur de rue faute d’argent et de succès.

En 1972, seul avec sa guitare, il parvient à enregistrer « Case History » inspiré des personnages qu’il a côtoyés, adoptant leur voix et leur langage comme un comédien.

On sent déjà poindre la fabuleuse capacité d’expression qu’il ne cessera de déployer tout au long de quarante ans d’activité artistique.

L’année suivante paraît « Marjory Razorblade », un double album publié par VIRGIN. La petite histoire musicale veut que Kevin COYNE ait été le premier artiste du catalogue du label naissant.

C’est sur ce double album qu’on trouve, entre autres, « Marlene », « Karate King » et « Nasty » qui induisent incontestablement les prémices du punk. Johnny Rotten a d’ailleurs cité Kevin COYNE comme une de ses influences majeures.

En 1974 il signe quelques collaborations avec Andy Summers et Zoot Money (après la parution de l’album «Blame It On the Night ») et Carla Bley (album « Silence ») et commence à tourner, en Australie, en Europe, au Canada et aux Etats-unis. THE POLICE l’accompagne pour « Matching Head and Feet » (1975), “Heartburn” (1976) et le double live “In Living Black and White” (1977).

En 1978 c’est “Dynamite Daze” et l’année suivante, ce qui peut rester comme son chef d’oeuvre, l’exceptionnel “Millionaires and Teddy Bears”.

En 1979 paraît l’album et le spectacle « Babble, Songs for Lonely Lovers » avec l’ex-Slapp Happy, Dagmar KRAUZE puis le double « Sanity Stomp » avec les Ruts et Robert Wyatt.

Changement de label en 1980 puisqu’il passe sur l’indépendant Cherry Red pour « Pointing the Finger » (1981) et « Politicz » (1982).

Cette nouvelle période est assez trouble vu ce qu’on appelle pudiquement des ennuis de santé mais donne encore naissance à quelques albums émouvants « Beautiful Extremes et cetera » (1983), « Legless in Manila » (1984), « Rough » (1985). C’est l’époque où il s’installe à Nuremberg et crée le « Paradise Band ». On notera aussi les deux albums « Stumbling on to Paradise » (1987) et « Everybody’s Naked » (1989) pour ne citer que ceux-là.

Dans la discographie récente de K/C, j’ai beaucoup aimé « Knocking On Your Brain » (1996) avec le mythique « Schoolboy » et le merveilleux « My Little Angel ». Parmi les derniers albums parus, on pourra aussi mettre en évidence : « Sugar Candy Taxi » phé…no…mé…nal !!! Avec l’ emballant éponyme Sugar Candy et l’autodérisoire « Happy little fat man » .

Quel personnage ce Kevin COYNE ! Chanteur, musicien, peintre et écrivain, toute son œuvre tourne autour de la folie. Comme le dit Michka Assayas : « il est l’un des rares à avoir fait naître de ses chansons un véritable univers où entrent marginalité, folie, dépression et le monde des marginaux ». Ses motifs picturaux confinant au simplisme sont inévitablement inspirés d’images et de flash sensitifs qui rappellent ces dessins faussement maladroits et naïfs croquant les couleurs et les images de l’enfance perdue, de la vérité naturelle et spontanée, de l’humour et de la passion. Le personnage central est bien évidemment l’ours « Teddy Bear » qui, sans doute sert de prétexte à tout dire comme dans « The world is full of fools », « People » ou « Wendy’s dream » (« Millionaires… (1979) ».

Son dernier roman connu (1992) « Showbusiness » suivait le terrible recueil d’histoires « The Party Dress et « Paradise » regroupant une série de poèmes étonnants.

Il a également écrit une comédie musicale « Fat Old Hero » consacrée à la vie d’Elvis Presley et le bouquin (en allemand) qui l’a sans doute inspirée « Elvis, Ich und Die Anderen ».

Son apparition sur scène provoque toujours un certain étonnement. C’est, en fait,

un petit bonhomme surmonté de la coiffure blanche éthérée du vieux shaman indien, plutôt rondouillard mais instantanément captivant. Il se dégage de son apparence décalée une immense force de conviction, une impressionnante capacité à dire et à donner un sens artistique intense, pénétrant et fabuleusement accessible à la moindre note de musique et au moindre mot qu’il exprime.

J’ai compris instantanément en le voyant agir ce que ceux (dont Francis) qui l’adorent voulaient me dire en m’incitant à venir le voir, il y a déjà un an quasi jour pour jour.

Une véritable magie, une attirance et une connivence totale avec le public s’installent dès la première entame tant la crédibilité de ce bonhomme est incontestable.

La présence de Brendan Croker dans une formule acoustique a de quoi donner envie… Inhabituel et intéressant à la fois, ce duo ne peut que s’accorder tant il se dégage de leurs deux mondes artistiques un caractère universel, une chaleur communicative et une lucidité implacable et naturelle, parce que «naturelle» précisément. Chaque son a du sens, chaque inflexion vocale signifie quelque chose, chaque mot rappelle une histoire vécue, une douleur ou un espoir, chaque geste, chaque crispation, chaque sourire ou réflexion participent d’un phénoménal assemblage de vérité que constitue ce duo admirable et je peux le dire : UNIQUE !

Pas vraiment le physique de Pierce Brosnan mais qu’est-ce qu’il dégage comme force de persuasion, le Kevin ! Ce décalage nous a d’ailleurs valu un fou rire énorme, l’année passée, avec CityDan en l’imaginant à la place Jim MORRISON dans son look actuel. Nous avons d’ailleurs baptisé ce célèbre fou rire : le « fou rire du lézard ».

Parce qu’il faut savoir et ce n’est pas une légende que Jack Holzman, président d’Elektra US, a proposé à Kevin Coyne de succéder à Jim Morrison au sein des Doors (oui, oui !). La petite histoire veut qu’il ait refusé en prétextant que les pantalons de cuir lui donnaient de l’urticaire…

Quant à Brendan CROKER, ce n’est plus un inconnu, depuis sa collaboration avec Mark Knopfler pour Notting Hillbillies. On le décrit comme quelqu’un de sympathique peut-être un peu bourru mais l’un des plus agréables musiciens issus du sérail britannique. Peu intéressé par la carrière proprement dite, il émerge néanmoins de la scène pub-rock avec des musiques très proches du folksong comme celles de Sleepy John Estes, Jesse Fuller, Blind Willie Mc Tell ou Hank Williams. Il forme en 1985, le « 5 O’Clock Shadows » mélangeant adroitement blues, rockabilly, folksong et country et disposant, par ailleurs, d’une « rather smoky voice » qui le rapprocherait plutôt d’un certain Ry Cooder sans lui enlever toute l’originalité personnelle à laquelle il peut prétendre.

Premier album en 1986 « A Close Shave » suivi rapidement par “Boat Trips in the Bay” (1987) avant la rencontre avec Steve Philips, Mark Knopfler et Guy Fletcher. Il intervient aussi sur le debut-album de Tanita Tikaram pour le chant de « He Likes the Sun ». Il co-écrit avec Steve Philips la bande son de la série TV « On the Big Hill ». Son troisième opus « Brendan Croker and the 5 O’ Clock Shadows » (1989) inaugure le catalogue du label Silverztone de Andrew Lauder. Sur ce disque, il est rejoint par Knopfler et Fletcher mais aussi Clapton, T. Tikaram et d’autres. En 1990, c’est l’étincelle avec Notting Hillbillies et l’album « Missing…Presumed Having a Good Time” dans lequel il interprète toutes les chansons. En 1991, il sort « The Great Indoors » le quatrième album de « 5 O’ Clock Shadows » enregistré durant les mêmes sessions que « On Every Streets » de Dire Straits.

Il écrira également pour la star de la country « Wynona Judd » (« What It Takes » vendu à 4 millions de copies ( !), aura la reconnaisance et le statut de Nashville Songwriter, créera des spectacles type « Twelve Bar Project » inspirés par l’esprit de Kurt Cobain, Bob Marley, Vivian Stanshall et Ricky Nelson, ces disparus qui le fascinent et, last but not least, Brendan Crocker effectuera une tournée acoustique dans les prisons belges. Son tempérament désintéressé et sa vision du monde réfractaire à toute « obligation » de rendement sont sans doute les ferments de sa collaboration avec Kevin Coyne.

Ces deux artistes authentiques étaient faits pour se rencontrer. (W. Whiteside disait dans l’Independent : « Croker shares with Coyne a perverse indifference to fame »). Leur feeling est semblable et leurs sensations de vie très proches. Un humour décalé, instinctif voire « destroy » les animent communément. Les capacités picturales de l’un (pour décrire par les mots) s’allient aux immenses possibilités instrumentales de l’autre (pour colorer les phrases) dans une osmose culturelle hors norme que la musique, leur musique ne pouvait que transcender.

Sur scène, presque rien : deux chaises, deux micros de valeur, quatre guitares sèches et un objet superbe et rarissime : une guitare/harpe Bown (6cordes + 5 à deux caisses siamoises) dont le galbe et l’élégance sont assez fascinants. Il paraît qu’elle vient de N/Y et que Pink Floyd utilisa la même.

Pour la tournée 2002, un album live a été réalisé à 500 exemplaires. Il reprend une bonne partie des titres joués ce soir et contient quelques perles plutôt « politically incorrect » (comme dirait Mike Estes) assez décapantes. Ce sont les sensations, les descriptions, les émotions et les réflexions de cinquante ans de vie intense, un immense retour en arrière dans les « grey fifties », une satire tranchée de la vieille Albion décatie et perverse qui assombrit le quotidien des petites gens, les amours et les rencontres baignées par le rock and roll, les fractures et les distances, les déprimes et les espérances quotidiennes.

« Life is almost wonderful » titre éponyme de l’album, ne pouvait pas mieux servir d’entrée en matière. C’est la description acérée des classes sociales et de la vie à l’office. Une râclée au vitriol pour nos conformismes petit-bourgeois et nos consciences assoupies. La scansion rythmique n’est évidemment pas éloignée des gimmicks « classiques » du rock and roll «Not fade away » et « C’mon everybody ».

On va rester, d’ailleurs, dans l’histoire musicale et sociale avec la vie de Martha et Arthur (pronounce Artha !) petites gens entourés de gris et de fleurs fanées qui réussissent néanmoins à croire au bonheur et qui découvrent le rock and roll en 1955 (Shake Rattle and Roll puis Gene Vincent…). C’était la naissance d’une nouvelle génération qui avait le boogie beat (be bop a lula, rock and roll heaven…). C’est évidemment assez autobiographique « I’m a child, a baby of rock and Roll, and I love it …/…Martha and Arthur, they love it too ».

“Looking from my window” raconte les peurs et les angoisses d’un enfant (K/C ?) pendant les bombardements de la seconde guerre mondiale. Il regarde par la fenêtre et voit brûler le paysage , en se demandant ce que le monde, « son » monde va devenir. Il entend les bombes, les cris d’autres enfants et ne s’en remettra jamais. Il va porter toute sa vie durant cette terrible peine comme une plaie ouverte.

Comme s’il voulait en remettre, le baffle de droite part en rumble effrayant. Cet effet « cocasse » vite rattrapé par le Maestro Francis des manettes Géron est vraiment une coïncidence fantastique. Tu voudrais le faire exprès tu n’y arriverais pas !!!

Petit moment de fun avec le «Teenage Raves /How it burns » adroitement arrangé par rapport à la version du CD, c’est évidemment le blues en plein : « moderne » dirait Brendan Croker et sa dextérité fait merveille pour apporter à cette petite pièce ciselée qu’il chante admirablement, toute la classe qu’elle mérite.

« I want to sit with the girls » petit flash d’enfance laisse planer un spleen et des émotions touchant à la solitude du gamin pas beau qu’on emmerde sur la cour de récré en le traitant de fou, en essayant de le faire tomber et en lui disant que sa sœur est moche…et … écossaise ! Ce sont sans doute des souvenirs précis qu’endura l’ami Kevin tout petit… Après la chanson, Kevin Coyne explique que sa mère (à l’âme catholique romaine) lui disait toujours pour l’endurcir : « tu peux avoir un cœur tendre tous les jours mais pas une autre mère ». Raison pour laquelle sans doute, il a connu sept femmes… au moins.

Puis le très beau « Whispers in the night » commencé par Brendan donne des frissons à l’audience avec son sens de la formule : « solitary sounds in the silence »… grand ! C’est saisissant de remarquer à quel point sa voix colle instantanément aux « ballades » qu’elle rend rassurantes, « prenantes » et chaudes tandis que celle de Kevin Coyne, plus soul, déchire la nuit, comme un cri, une plainte nue… Ce titre est sur l’album et c’est une vraie merveille de même que « Be your sugar daddy », inquiétant pourtant par ce qu’il recèle comme allusion à peine voilée aux dérives de la perversion, pour ne pas en dire plus…

Survient alors un grand moment de bonheur quand Brendan Croker joue les maîtres de musique pour entraîner le public à chanter… et ça marche avec cette subtile chansonnette qui a l’air d’une ritournelle à quatre sous « I know who you are » construite comme un petit poème dont le classicisme lui vaudra sans doute l’éternité. Toutes les transitions se passent dans la bonne humeur et les réparties humoristiques des deux compères rendent le show hyper-convivial. D’autant que dans la chanson, ils y vont gaiement pour annoncer tout de go qu’ils n’aiment pas Phil Collins (je me marre… tout le monde se tord)…

« World of trouble » est en fait une adaptation du titre “Strange pictures” de l’album “Life is almost wonderful”. Elle est balancée ici dans un rythme clair, irrésistible, très roots, qui me fait littéralement craquer de plaisir… Ce qui n’est pas tout à fait le cas pour « Gina’s song » (ancienne chanson de l’album « Legless in Manila (1984) » déchirée et forte, dans la pure lignée des grandes chansons de Kevin Coyne, celles où il décrit admirablement les douleurs et les cris de l’amour perdu ou jamais atteint. Des phrases comme « I want to scream but I just can shout » sont sublimes. Là-dessus, Brendan Croker nous remet sans transition une chanson que je ne connais pas. Elle exprime la réalité toute bête, tellement évidente qu’elle nous aveugle : « Some people got no money at all ». Fermez le ban !

« Good Boy » est aussi une énorme chanson (« Marjory Razorblade » (1973). L’un des thèmes favoris de Kevin Coyne est de dénoncer l’hypocrisie des gens qui paraissent (ou veulent paraître) ce qu’ils ne sont pas. Bref ceux qu’on appelle « de braves garçons » ou « des gars comme il faut » mais qui ne sont en fait que des salauds (sic…). L’allusion très précise vise un cow-boy texan pétrolier que je ne citerai pas… Et là-dessus, Brendan Croker y va de sa leçon de choses sur les citoyens bien comme il faut, calfeutrés chez eux dans la vision la plus parfaite d’un monde qu’ils jugent merveilleux, à travers la voix officielle et les valeurs de l’idéologie dominante, sans faille… Leur propre discours concourt en permanence à se convaincre que tout va bien… pour eux ! « The Great Indoors » est une chanson fabuleuse, c’est la chanson éponyme de son album 1991 (voir plus haut). Notre gaillard, lui, n’a pas mes scrupules oratoires, il met carrément en joue le Gédeubelyou. Véritable quart d’heure de mitraillage en règle puisque deux chansons plus loin on va retrouver un nouveau pamphlet pas piqué des vers !

« Lunatic » m’a fait frissonner d’effroi. C’est une chanson de résistance tragique à l’ordre établi, (« Dynamite Daze » 1978) quasiment le chemin vers la folie, que la différence et…les autres vous imposent. Dur, dur… On réalise qu’il a été infirmier psychiatrique le bougre et qu’il en a été marqué au point d’en restituer la description implacable.

Et voilà, on y est « When George closes his windows, he sees a twilight world », « When George turns to his wife, he’s wearing a plastic smile » Et George va à l’église écouter le Pasteur pour sauver l’Amérique. “I don’t believe old George, I don’t believe a word he says, it’s just a noise, it’s nothing in the air and that goes “Tony Blair” as well”. “Oh George leave us alone, we are quite happy here…” Vous voyez le genre on ne peut plus clair. Je ne sais si cette chanson a été écrite pour le père ou le fils mais elle valable pour toute la famille hein ? On ne sait jamais dès fois qu’il nous ferait un rejeton pour préparer la cinquième guerre mondiale…

Pour se remettre d’une pareille, il fallait revenir vite au blues le plus profond, dans cette façon chatoyante et réconfortante qu’a Brendan Croker de jouer, il nous sert alors un sublime « Leadbelly » (1888-1949) : « I’m on my last go round » accompagné par Kevin Coyne à l’harmonica.

Quelle merveille, quelle musique de haute tenue… Cette chanson couplée à « Need Somebody » (K/C « Case History » 1972) représente vraiment un des plus forts moments de la soirée. Il faut dire que Kevin Coyne a une façon particulière de jouer de la six corde, presque à plat sur les genoux en se servant uniquement du pouce gauche et d’une rythmique véritablement « trash » de la main droite. Cela rend chacune de ses chansons hypnotique, martelée comme une trépidation du fond de l’être et terriblement efficace.

On est décidément au sommet puisque Brendan Croker nous sort dans la foulée un titre de la période Notting Hillbillies « I feel like goin’ home », grandiose de pureté et de dépouillement, merveilleusement coloré par cette guitare qui sonne si cristalline, si parfaite… quel régal ! (Dire qu’on doit ce titre à Charlie Rich… comme quoi ( !)

Suit alors une transe limite impro dont Kevin Coyne est coutumier et qu’il maîtrise habilement, avec une expérience de vieux routard heureux de faire plaisir (et de se faire plaisir). « I got a feeling, you never let me down » qu’il va répéter à l’infini « I got a mood, I want to dance »… “I just want to dance” “Come on and dance, everybody dance, I’m almost fifty nine but I can still dance” “You never let us down…” “You know you got to dance” A capella cela marche aussi : “I got to feel allright, I’m not dead” “We’re not dead”… fabuleux moment (et tout cela appuyé sur une seule guitare…).

Eh ben heureusement qu’on n’est pas mort hein parce que cela a bien failli m’arriver dès l’entame de “Singing the blues” (le premier rappel) ce morceau qui a bercé toute ma jeunesse. Un des rares trucs fifties pop pas dégueus… qu’on doit au sirupeux Guy Mitchell mais que Tommy Steele, Dave Edmunds et Doc Watson ont un peu musclé plus tard. Ici la cover de Coyne/Crocker toute faite de décontraction et de supplément d’âme est lu…mi…neu…se !!! C’est divin… Et je ne crois pas si bien dire parce que juste après nous eûmes droit à la révélation (le mot est bien choisi ) dans le deuxième « Encore » qui dit à peu près ceci : «I believe in God when I see a girl like you », « I believe in the man upstairs, I’ve no regrets… » Mais quelle voix, mon Dieu quelle voix (tiens je m’y mets aussi moi…). Il faut dire que cette voix a d’autant plus d’espace qu’ elle est accompagnée par une unique guitare et qu’elle se répand dans l’air comme un effluve magique et chaud dirigé passionnément vers nous-mêmes.

Ce duo est fait de complicité, de respect et de grand talent. Brendan Croker apporte une contribution solide et réconfortante à l’ensemble. Sa décontraction et son fun (apparents) cachent en fait une personnalité pleine d’émotion et de finesse. C’est un tendre qui prend des distances (bien peu faut-il dire mais quand même) comme pour se préserver de trop en faire. Kevin Coyne n’est plus à présenter, il EST le blues et le restera éternellement. Je l’ai dit déjà, Tom Waits, Vanmo et lui c’est la sainte Trinité ! Décidément ces images liturgiques.. faut croire que le blues a sa mysticité réactive…

Un tout grand concert encore ce soir, reprene-z-avec-moi-tous-en-chœur : Thanks Mister Géron for giving us so perfect music !

DD

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