MŁYN – Folwark

Depuis quelques années, la Pologne nous a habitués à la découverte d’une scène musicale florissante et imaginative, pleine de groupes un rien zinzins recherchant l’anti-accord absolu et se répandant en expériences quelques peu chahutées. On se souvient de Mapa, Kurws, you.Guru, Job Karma ou Voices Of The Cosmos, pour n’en citer que quelques-uns. Il faudra ajouter à cette liste des frapadingues de la Vistule ce groupe Młyn, qui nous vient de Wrocław dans le sud du pays et qui pratique un jazz rock lourdement coupé à l’électro de synthèse et au noise rock de contrebande.

Sebastian Milewski (claviers), Cezary Rosiński (électronique) et Michał Wdowikowski (batterie) constituent ce trio qui signe ici son troisième album, faisant suite à ʺReklamaʺ (2019) et ʺLive at Narodowyʺ (2020), le premier étant édité sur le label Dym Records et le second faisant l’objet d’une cassette sortie avec les moyens personnels du groupe et distribuée sous le manteau. Le groupe s’est constitué une petite réputation locale en apparaissant au festival Avant Art de Wroclaw, au festival Dym, au festival Borderline ainsi que sur les planches de clubs situés en Pologne et en République Tchèque.

On prend le train en marche avec ʺFolwarkʺ, troisième volet de la discographie de Młyn qui, si tout le monde devient subitement éclairé et abandonne l’écoute de Rihanna ou d’Ed Sheeran, devrait porter le groupe sur les scènes du Madison Square Garden, avec Coldplay et Metallica en première partie.

Mais non, tout cela est du doux rêve, sans doute provoqué par l’écoute de cet album qui emporte l’auditeur dans des mondes parallèles, insensibles au réel et entièrement possédés par la folie douce suscitée par la musique de Młyn. Une batterie capricieuse et des nappes de synthés en pleines divagations ésotériques règnent sur des morceaux qui prennent leur temps (cinq à neuf minutes). On démarre avec le faussement logique ʺJazʺ, qui commence effectivement comme un morceau de jazz rock mais qui se voit tout de suite possédé par des effets électroniques semblant jaillir de la planète interdite. Même ambiance avec ʺTajfunʺ, assez prog dans sa construction mais également hanté par des sons anarchiques qui donnent tout le sel à ce morceau qui, sans cela, serait tout plat et tout mou. Et c’est là où on découvre le secret de ce groupe Młyn : ne rien faire comme les autres, étonner là où on ne l’attend pas et recycler des compositions apparemment bien structurées pour en faire des moments de folie dansante.

Mais on va monter d’un cran avec les phases suivantes de l’album, qui prennent des aspects un peu plus avant-gardistes et cosmiques (ʺPółpasiecʺ, qui en polonais veut dire zona, oui, la dermatose virale, vous avez bien lu) ou disco anarchique (ʺKsięciunioʺ). Puisqu’on est dans la traduction en polonais, sachez que ʺFolwarkʺ veut dire grange, ʺKsięciunioʺ, c’est le prince et ʺSzklarzʺ, le dernier morceau, signifie vitrier. N’allons pas chercher la moindre signification logique à tout cet ensemble qui a quand même le mérite de nous offrir un voyage mirobolant et inclassable dans un territoire occupé à la fois par le post-jazz, le noise rock, le néo-prog expérimental, le tout dans un petit bain d’anarchisme musical qui fait du bien aux neurones et à la remise en question. Seul défaut de cet album : l’entonnoir et la camisole de force ne sont pas fournis avec.

Le groupe :

Sebastian Milewski (claviers)
Cezary Rosiński (électronique)
Michał Wdowikowski (batterie)

L’album :

ʺJazʺ (07:30)
ʺTajfunʺ (06:09)
ʺPółpasiecʺ (05:16)
ʺFolwarkʺ (06:28)
ʺKsięciunioʺ (05:01)
ʺSzklarzʺ (09:22)

https://mlyn.bandcamp.com/album/folwark
https://www.facebook.com/mlyn.mlyn

Pays: PL
Gusstaff Records
Sortie: 2021/11/19