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TORPEDO – Orpheo Nebula

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Le rock suisse continue de nous persuader de tout le bien qu’on pense de lui avec ce groupe Torpedo, qui sort ici son deuxième album, belle petite pièce post-punk de très bon aloi. Les choses commencent à Lausanne, en 2016. Carole Obère (chant et guitare) et Jérôme Diserens (basse et claviers) échafaudent un plan pour monter un groupe qui ferait du bruit et mettrait mal à l’aise. L’art de Torpedo est de se consumer dans un mouvement no wave, kraut et punk, industriel et post-apocalyptique qui laisse peu de place à l’optimise et à la bonne humeur. Voilà, nous sommes prévenus, il va falloir s’habiller en noir et décorer notre chambre de pots de fleurs fanées.

De cette manière, le duo met au point son premier album en étroite collaboration avec le batteur Antoine Pfammatter. Les choses sont écrites et posées sur des démos mais rien n’est encore officiellement enregistré. Carole Obère et Jérôme Diserens se mettent alors en tête de quitter Lausanne, jugée trop oppressante et trop urbaine, pour filer dans une maisonnette de la côte ouest de l’Irlande. C’est là, face à la mer et aux vagues qui viennent s’écraser contre les rochers, dans une maison craquant sous le vent et dégageant une atmosphère de hantise, que le duo forge son premier album ʺSphynxʺ. Autoproduit, il est réalisé en avril 2019, convoquant le souvenir de Siouxie & the Banshees ou Sonic Youth.

Cet album peut sortir grâce à l’arrivée d’Andries Hannaart, un cogneur de fûts néerlandais avec qui le contact va passer tout de suite. L’alchimie du power trio naît alors et le groupe trouve un son et une attitude, avec un post-punk sombre chanté d’une voix rageuse et des lignes de basse ou de guitare envoyées en pleine figure.

Désormais lancé et sûr de son message, le groupe s’attaque au deuxième album ʺOrpheo… Nebulaʺ. Comme Torpedo aime se trouver à l’écart des populations, il va être servi car nous sommes en pleine crise covidique. C’est dans un univers de confinement proche de l’absurde que naît ce deuxième album enregistré dans des conditions live. Cette atmosphère de fin du monde est idéale pour le trio qui se trouve alimenté favorablement dans son inspiration et extrait de son imaginaire des titres angoissés et teigneux, souvent longs (les plus de sept minutes ne sont pas une exception).

Le groupe émet alors un rock n’roll noisy et nauséeux, où les collages de voix presque parlées se fixent à des sonorités colériques, tendues comme les nerfs d’un milicien ukrainien voyant surgir un char russe de 60 tonnes au bout de sa ruelle. Les boucles répétitives, chamaniques et obsédées de ʺThe fallʺ, ʺHellʺ, ʺPart III – La mortʺ, ʺDesertʺ, ʺPart V – Intersticesʺ ou ʺPOEMʺ viennent nous vriller le cerveau et éclaboussent l’imaginaire de crachats désespérés, pollués par un romantisme désespéré. Le chant se disperse entre anglais et français, nous sort de temps en temps un petit poème de Baudelaire dans le registre le plus sombre qui soit.

Résolument tourné vers le côté sombre de la force, ʺOrpheo … Nebulaʺ charrie avec lui les interrogations d’un monde arrivé en bout de course, en mal d’idées et de propositions à faire à une jeunesse qui s’ennuie. Que faire d’autre, sinon se tourner vers le sol et refuser le ciel ? Cet album superbe et cohérent sera un petit régal pour les amateurs de cold wave et de post-punk dans la lignée de The Fall, Siouxie & The Banshees ou même le Velvet Underground.

Le groupe :

Carole Obère (chant et guitare)
Jérôme Diserens (basse et claviers)
Andries Hannaart (batterie)

L’album :

ʺThe fallʺ (05:10)
ʺHellʺ (08:13)
ʺPart III – La Mortʺ (07:17)
ʺDésertʺ (05:24)
ʺInterludeʺ (01:36)
ʺPart V – Intersticesʺ (07:31)
ʺPOEMʺ (07:35)

https://arakirecords.bandcamp.com/album/orpheo-nebula
https://www.facebook.com/torpedo.cyclope

Pays: CH
Araki Records
Sortie: 2022/09/15

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