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Madrugada, valley of emotion

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Après s’être reformés pour célébrer le vingtième anniversaire d’Industrial Silence, les Norvégiens de Madrugada ont décidé de poursuivre leurs aventures. Début de cette année, ils ont ainsi publié un nouvel album, “Chimes At Midnight”, qui n’a absolument rien à envier à ses prédécesseurs. Ils sont venus le présenter à l’AB dans le cadre du second volet de leur tournée européenne.

Aussi bizarre que cela puisse paraître, la série initiale de concerts en début d’année avait ignoré la Belgique, nous contraignant à filer jusqu’aux Pays-Bas en toute fin de pandémie pour découvrir sur scène leurs nouvelles compositions. Ce soir, un public chaud comme la braise ne leur en a absolument pas tenu rigueur…

Les spectateurs ont en effet bruyamment acclamé un groupe dans une forme olympique qui a maîtrisé son sujet, du ténébreux “Only When You’re Gone” d’entrée de jeu à un “Valley Of Deception” à donner des frissons près de deux heures plus tard. Entre les deux, un large ratissage s’est attardé sur chacune de leurs étapes discographiques, avec une passion intacte.

Sans surprise, l’élégant Sivert Hoyem orchestre le tout de sa voix caverneuse alors que son charisme doublé d’un irrésistible magnétisme renvoient irrémédiablement vers Nick Cave. Une comparaison qui prend tout son sens lorsque le gaillard laisse tomber sa guitare pour arpenter la scène et rendre les premiers rangs complètement dingues. Lorsqu’il se cantonne derrière son micro, il forme un triangle avec le bassiste Frode Jacobsen et le batteur Jon Lauvland Pettersen, désormais la solide base du groupe depuis la disparition inopinée de Robert Buras en 2007. À leurs côtés, on retrouve son remplaçant Cato Salsa (loin d’être un manchot malgré son apparence rustre) et le claviériste Christer Knutsen.

Contrairement à ce concert au 013 de Tilburg où ils avaient généreusement décortiqué “Chimes Of Midnight”, ils ont été plus frileux sur le sujet ce soir. Mis à part le tout nouveau “If I Was The Captain Of This Ship” (inclus sur la récente réédition dudit album comprenant quatre inédits et une collaboration avec Ane Brun), ils n’en ont ainsi offert que deux extraits après une grosse demi-heure. Pourtant, les excellemment exécutés “Nobody Loves You Like I Do” et “Help Yourself To Me” (cette partie aux claviers…), en plus d’exercer un pouvoir mélancolique certain, auraient pu servir de tremplin à un peu plus d’audace. Ce sera à nos yeux le seul (léger) bémol de la soirée.

On préfère dès lors penser qu’ils ont scindé le set en deux parties, permettant tout d’abord au groupe de sagement se mettre en place. En effet, mis à part un “Look Away Lucifer” témoin des premières envolées, on restera plutôt dans des atmosphères retenues qui n’empêcheront pas “Hands Up – I Love You” de se vêtir d’un manteau groovant et “Electric” d’actionner les boules à facettes au fond de la scène au milieu de sonorités sixties et d’un Sivert habité. Sans oublier les visuels discrets mais diablement efficaces projetés sur l’immense écran à l’arrière des musiciens.

La suite sera quant à elle plus décomplexée mais non moins émotionnelle. Prenons par exemple cet “Honey Bee” dépouillé ou ce “Black Mambo” aussi flippant que sinueux dont les Bad Seeds auraient été fiers. C’est à ce moment que l’intensité grimpera d’un cran via un “Salt” façon western obscur auquel succèdera un “Blood Shot Adult Commitment” toutes guitares en avant, Sivert enfilant sa célèbre veste à paillettes plus éblouissante que jamais. Un Sivert visiblement fier de se retrouver sur une scène où ont joué de véritables légendes dont il mentionnera notamment Jacques Brel et Edith Piaf.

Les deux derniers titres du set principal seront quant à eux des pièces d’anthologie patiemment construites et somptueusement délivrées à un public subjugué. “Majesty” nous arrachera ainsi des larmes qu’un orgue viendra amplifier avant qu’une explosion sonore ne les sèche sans crier gare. “Strange Colour Blue”, de son côté, sera majoritairement joué dans l’obscurité totale, le leader s’amusant à éblouir des spectateurs choisis au hasard via un spot portatif.

Le temps de reprendre ses esprits et voici que le groupe revient sur scène pour des rappels entamés par un “Vocal” toujours aussi parfait. Ils se souviendront ensuite qu’ils étaient venus défendre “Chimes At Midnight” et en tireront deux autres impeccables extraits. L’hyper prenant “Stabat Mater” et l’au moins aussi intense “The World Could Be Falling Down” confirmeront que cet album figurera sans aucun doute dans notre top de l’année.

La fin sera quant à elle plus classique même si on ne se lassera sans doute jamais d’un triptyque aussi captivant composé d’un “What’s On Your Mind?” à donner la chair de poule, d’un puissant “The Kids Are On High Street” et d’un “Valley Of Deception” dont on a déjà parlé. Surtout qu’entre-temps, le batteur présentera non sans humour l’ensemble des musiciens dans un français impeccable. Une belle claque émotionnelle que l’on aurait préféré voir prolongée ne fut-ce que l’espace d’un ultime dernier titre, même si regarder les musiciens faire les paons au son du “If I Can Dream” d’Elvis Presley avant de quitter la scène valait également son pesant de charme…

SET-LIST
ONLY WHEN YOU’RE GONE
IF I WAS THE CAPTAIN OF THIS SHIP
LOOK AWAY LUCIFER
BELLADONNA
HANDS UP – I LOVE YOU
ELECTRIC
NOBODY LOVES YOU LIKE I DO
HELP YOURSELF TO ME
HONEY BEE
BLACK MAMBO
SALT
BLOOD SHOT ADULT COMMITMENT
MAJESTY
STRANGE COLOUR BLUE

VOCAL
STABAT MATER
THE WORLD COULD BE FALLING DOWN
WHAT’S ON YOUR MIND?
THE KIDS ARE ON HIGH STREET
VALLEY OF DECEPTION

Photos © 2022 Olivier Bourgi

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