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SOOTHSAYER – Echoes of the Earth

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La verte Irlande cache des côtés sombres. Sous ses prairies où gambadent moutons et bovidés s’étendent des galeries souterraines menant à des mondes hantés par les cris et les douleurs. Le gentil folklore celtique est espionné de près par des groupes ayant vendu leur âme aux forces obscures du sludge et du doom metal. Sous les bottes vernies et proprettes de U2 grouillent des combos innommables comme Norot, Iweriu, Abysm, Corr Mhona, Dog On Stilts, Teetheater, Astralist, Patholon, XeroPulse ou Coroza. Point commun entre tous ces groupes : ils viennent de la ville de Cork et pratiquent un doom/sludge metal poisseux et angoissant. Et cette scène locale pourrait bien trouver un maître de cérémonie avec Soothsayer, une formation active depuis 2013 et qui trouve enfin une reconnaissance internationale avec son premier album ʺEchoes of the Earthʺ grâce au label Transcending Obscurity.

Les origines de Soothsayer remontent à Days Of Night, un groupe death mélodique qui commet un EP en 2011 avant de splitter l’année suivante. On trouve Marc O’Grady (guitare) et Liam Hughes (chant), qui vont ensuite former Procession Of Spectres, un combo black metal dans lequel on trouve aussi des membres de Corr Monha et The Grief, dont Stephen Quinn (qui participe aux débuts de Soothsayer mais est remplacé en 2016 par Sean Breen) et Con Doyle (basse), qui va rejoindre Soothsayer en tant que guitariste tout en tenant la basse dans Demeter, avec Liam Hughes. Aux débuts de Soothsayer, en 2013, il y avait aussi le batteur Will Fahey, qui sera remplacé par Pavol Rosa, un Slovaque émigré en Irlande, également actif dans Ten Ton Slug et qui joua dans des groupes slovaques à la fin des années 1990 (Daybreak, Bizarre Of Brutality).

Le décollage ne semble pas très évident pour Soothsayer, qui commet deux EPs en 2015 et 1016, ainsi qu’un album ʺLive in Maltaʺ en 2020. Si cet album, ainsi que le premier EP ʺThe Soothsayerʺ étaient sortis à compte d’auteur, le deuxième EP ʺAt this great depthsʺ avait déjà été publié par Transcending Obscurity. Il faut cependant attendre cinq ans avant qu’un album long format voie le jour. Le groupe a beau être à son premier album, on sent que sa réputation est déjà bien établie, à en juger par les quelques artistes du monde doom et sludge qui ont répondu présents pour ajouter des parties de chant sur quelques titres : Eugene S. Robinson (Oxbow), Paul Catten (ex-Lazarus Blackstar, ex-Medulla Nocte, ex-Murder One), Ralf W. Garcia (Neolithic Regression, Poltergeist, Requiem) et Dave Ingram (du mythique combo death anglais Benediction).

Bénédiction est effectivement un mot de transition tout trouvé pour qualifier ce premier album qui attrape l’auditeur par les pieds et l’entraîne irrémédiablement dans les profondeurs du désespoir et de la dépression. Les bruits de chaîne et les litanies flottantes et répétitives qui hantent le premier morceau ʺFringeʺ imposent immédiatement une atmosphère glaciale et sombre, de quoi flanquer la frousse à n’importe quel tueur en série des Carpates. Le doom metal le plus lourd s’abat sur nos têtes à partir du deuxième morceau ʺOuter fringeʺ, début d’une série de titres flirtant avec les neuf à douze minutes et se déroulant comme un immense tapis monolithique aux coutures reliant les chansons les unes aux autres. Dans cet ensemble ʺWar of the dovesʺ impressionne avec ses assauts permanents de guitares épaisses et méchantes, soutenant un chant qui semble dévoré par un insondable désespoir. Dans cette affaire, quelques comparaisons avec Yob ne sont pas interdites.

Les deux derniers morceaux qui offrent à eux seuls 22 minutes de baignade dans des eaux boueuses à souhait sont un autre grand moment de cet album intense de bout en bout, porté par un souffle cérémonieux et grave, témoignage d’une œuvre à la densité remarquable et au sens très poussé de la fabrique d’ambiances expressives et étouffantes. Les hommes de Soothsayer commettent ici un petit chef-d’œuvre de damnation sonore. Il va incontestablement falloir braquer les télescopes sur cet astre sombre qui vient de pénétrer dans les cieux tourmentés du doom et du sludge metal, car son parcours pourrait engendrer d’autres tempêtes cosmiques.

Le groupe :

Con Doyle (guitare et chant)
Marc O’Grady (guitare)
Liam Hughes (chant)
Sean Breen (batterie et chœurs)
Pavol Rosa (basse et chœurs)

L’album :

ʺFringeʺ (5:57)
ʺOuter fringeʺ (8:03)
ʺWar of the dovesʺ (9:30)
ʺCities of smokeʺ (5:55)
ʺSix of nothingʺ (10:09)
ʺTrue Northʺ (12:09)

https://soothsayer.bandcamp.com/
https://www.facebook.com/soothsayerdoom/

Pays: IE
Transcending Obscurity
Sortie: 2021/04/09

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