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Marianne FAITHFULL nous invite chez elle

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Comme par politesse, la porte s’ouvre à l’heure annoncée. Sur le deuxième accord de « Time Square », la maîtresse de maison rentre en scène. Vêtue de noir dans un ensemble satiné, elle nous accueille avec le sourire. Ce sourire qui ne la quittera pas de toute la prestation. « Je suis contente d’accueillir à nouveau Bruxelles chez moi » nous dit presque Marianne Faithfull, avant d’entamer le deuxième morceau. Au-devant de ses sept musiciens qu’elle n’aura de cesse de remercier au fur et à mesure de leurs interventions, elle feuillette pour nous son livret de chanson. Venu d’ici ou d’ailleurs, chaque morceau a sa petite histoire et parfois elle nous est contée.

Le fond de scène est sobre. Noir parfois zébré de blanc ou d’une couleur uniforme. Les éclairages assez puissants pour que personne ne soit dans l’ombre, pas même le public. Marianne profitant de cela pour regarder bien dans les yeux même les spectateurs des balcons latéraux.


Son groupe multifonction (presque tous ses musiciens changeront d’instrument pendant le set) joue sans abus. Petit point négatif, la section vent (flûte, saxophone, clarinette basse, hautbois, etc) où les deux musiciens auront parfois un jeu un peu poussif, se démettant même par quelques petits problèmes de justesse. Mais le son est limpide et la voix de la dame rentre en nos oreilles, nous pénétrant jusqu’au cœur à plus d’une reprise.

La maîtresse de maison n’est pourtant pas en toute bonne santé. Toussant parfois à la limite de l’indélicatesse, elle poursuivra de temps en temps assise sur un grand tabouret. Mais le temps est agréable et les convives se laissent prendre au jeu de la soirée au coin des petites choses de l’ancien temps. En effet, part plus que belle est faite au tout dernier album sorti «
Easy come, Easy go
»
fait de reprises et il faudra vraiment être patient pour entendre les morceaux du répertoire personnel de l’artiste. Par là, elle ne nie pas ses amours jazzy, un « Solitude » emprunté à Duke Ellington en étant même presque caricatural. Ou ses simples coups de cœur. « Hold on hold on » très pop finira avec un solo de violon empreint même d’un larsen.

La température est montée d’un cran et le tapis est déroulé pour « Broken English ». Morceau joué un peu moins rageur que ce qu’elle n’a déjà fait dernièrement (Gent Jazz Festival juillet 2009) mais avec sa partie centrale remplie d’un beau solo de guitare. Marianne lance les applaudissements de la salle en remerciement des gouttes de sueur de son guitariste et debout, le doigt pointé vers la foule qui l’accompagne, se lance dans un final où sa voix remplie de « reverb » fait frissonner sûrement bien d’autres que moi. Liesse ! Notre hôtesse ne se prive pas d’ouvrir les bras pour recevoir l’amour qui lui arrive jusqu’à la scène.


Suit la belle reprise de Randy Newman, « In Germany before the War », intro jouée à l’archet sur une scie, final à l’ambiance particulière où deux musiciens mélangent presque tous les instruments. « Ah tiens, celui-ci, c’est sûrement celui qui est le plus proche de ma philosophie de vie ! Merci à Nick Cave ». Il ne faut pas plus pour que tout le monde comprenne pourquoi « Crazy Love » est joué. « Love is crazy, love is blind ». « Salvation, vous connaissez ? » Pour la première fois, le son noie un peu la voix mais le poing rageur, la chanteuse rythme ses paroles et les deux poings doigts tendus vers la salle avoue son amour en langage des signes, préparant ainsi le petit dessert attendu.

« Voici maintenant une balade ». « The Ballad of Lucy Jordan » nous est annoncée comme une balade et est jouée comme telle. On est loin des crissements de pneu de « Thelma and Louise », film qui est quand même pour beaucoup dans le retour grand public de la belle un temps déchue. Que les programmateurs des radios néerlandophones de notre pays me contredisent !

Après une longue présentation des musiciens remplie de rires, « Sister Morphine » et « As Tear go by » sont joués. Pour le dernier, le public retrouvera ses sensations de jeunesse peut-être et c’est tout le monde qui finira dans les « lalala ». Mais l’âge ne fait pas les artères. Et ceux qui poussaient la chansonnette en seront pour leur gentillesse. « Why’d Ya Do It » donne à nouveau à la section rythmique de quoi exprimer sa puissance et la guitare en solo pousse aussi ce morceau dans les sillons des effets d’écho que rejoindra la voix rauque, celle-ci n’étant qu’encore plus captivante d’expression. Marianne sort de scène saluant ses amis de toujours d’un « I love you » et laissant à ses musiciens le droit de clôturer le morceau et le set comme il se doit.


Fleurie par les premiers rangs pour son retour sur les planches, elle entamera le rappel par une évocation sans trop de commentaires de Keith Richards avec qui, initialement sur l’album, elle chante « Sing Me Back Home » qui nous est présenté ce soir dans une version country lente. Et pour terminer « Dear God help me » de Morrissey (l’ancien chanteur des Smiths était-il dans la salle profitant de sa présence à Bruxelles ce week-end ? Peut-être, car pas vu dans la salle mais vu en terrasse près de la Grand Place après ce concert.)

Marianne n’a pas besoin d’aide pourtant et elle remerciera seule, délaissée de son groupe, ses invités. Souriante, gentille, chaleureuse, face à face avec son public, elle restera elle-même jusqu’au dernier geste de la main. Un bon tiers de la salle prolongeant les applaudissements au-delà du retour des lumières et du tapis musical, certains qu’ils seront à nouveau présents si prochaine invitation il y a chez la dame. Et tant pis, si les fauteuils du salon sont un peu fatigués, son charisme fait la qualité du logis.

Set List:

  • Time Square
  • Dover
  • Crane wife
  • Solitude
  • Hold on
  • Broken English
  • Mach the knife
  • In Germany
  • Crazy
  • Kimbe
  • Salvation
  • Lucy Jordan
  • Sister
  • As tear go by
  • Why’d ya do it
  • Sing me Back Home
  • Dear God Help Me

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Photos © 2009 Bernard Hulet

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