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LIVINGSTONE – Explore

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J’ai déjà eu l’occasion d’exprimer cette théorie à propos des fiches promo des maisons de disques : plus elles la ramènent, plus elles déploient de grands moyens en matière de papier glacé, photos couleurs, commentaires faramineux sur le génie imparable de leurs poulains, plus il faut s’inquiéter car on est souvent à la merci d’une magnifique baudruche prête à se dégonfler dans une flatulence sotte et moite. Exemple avec Livingstone, annoncé comme “la claque rock ‘n’ roll”, un groupe “pas là pour faire de la figuration”, “du gros rock fortement inspiré par les racines sales et poussiéreuses de son âge d’or”. On nous explique que le groupe revient des Etats-Unis, où il a tourné pendant deux mois, a parcouru 13000 kilomètres, a vendu 341 CD et mangé 183 hamburgers.

Evidemment, en soixante jours de tournée pour un trio, ça fait un hamburger par jour. A ce régime, il ne faut donc pas s’étonner de retrouver les musiciens de Livingstone un peu bouffis et le cerveau embrumé, au point de se prendre pour des demi-dieux venus sauver le rock ‘n’ roll à grand renfort de surpuissance virile et de génie cosmique. En voyant la fiche promo, on est en ébullition, on s’attend à découvrir du babylonien, du péplum rock, la réincarnation de Led Zeppelin, la résurrection de Duane Allman, le rajeunissement de ZZ Top. L’eau à la bouche, les babines salivantes, on se précipite sur l’album et là, déception, retour à la froide réalité, irruption du pommeau de douche venant glacer les rêves électriques : on se trouve devant un bon groupe, certes, mais loin d’être miraculeux.

Il faut éviter de faire ce genre de frayeur aux critiques rock. On attend tous le Messie depuis l’explosion en vol des Guns ‘n’ Roses ou la mort de Kurt Cobain, alors, venir prophétiser des immensités avec Livingstone, c’est jouer avec nos nerfs, nous inonder d’espoirs célestes. Mais au vu du résultat, on va pouvoir reprendre son baluchon et continuer la quête du Grand Soir.

Bon, j’exagère un peu dans la plainte. Livingstone est un groupe blues rock français qui donne volontiers dans un hard rock seventies à consonances sudistes. On est sur un terrain sympathique et les types se débrouillent plutôt bien, sans toutefois briller par une originalité féroce. Une fois oubliée cette maudite fiche promo qui avait fabriqué tant d’espoirs, l’album de Livingstone révèle ses bons moments (le premier titre “Grey slave”) et des aspects un peu plus tape-à-l’œil (le mignon et mélodique “Million miles away”, le blues dansant “Down on the ground”, digne de Jean-Jacques Goldman). C’est finalement dans les morceaux qui ne cherchent pas à faire de compromis entre puissance blues rock et mélodie dansante que Livingstone est le plus convaincant, par exemple quand il met la barre vers le tout country (“Give me all your loving”) ou le tout rock (“Never break”). Finalement, Livingstone parvient à mélanger harmonieusement mélodie et puissance vers la fin de son album, avec “Jailor of my soul” ou un “Crying in a river of gold” qui retrouve la simplicité d’un country blues avant de libérer solos de gratte et harmonies vocales fleurant bon les Black Crowes.

L’histoire commençait mal mais heureusement, elle finit bien. Livingstone dispose d’un potentiel mais aurait tout intérêt à se débarrasser de certaines dérives dansantes au profit d’un recentrage vers le blues ou le hard rock originel. Sur ces bases, il aurait peut-être une chance d’être cette véritable “claque rock ‘n’ roll” annoncée dans son dossier de presse.

Pays: FR
Autoproduction
Sortie: 2014

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