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The Julie Ruin ou l’esprit rebelle intact de Kathleen Hanna

C’est une véritable icône qui a foulé les planches de la Rotonde du Botanique ce mercredi 30 novembre. Kathleen Hanna, la plus activiste des féministes du rock alternatif et fondatrice du mouvement Riot Grrrl, est venue y présenter le deuxième album de son projet le plus récent, The Julie Ruin. Originaires de Nottingham, les deux nanas qui ont assuré la première partie sous le nom de Rattle peuvent se targuer d’officier dans un registre peu conventionnel. En effet, il s’agit de deux batteuses qui se font face et se produisent de profil par rapport au public. Une contrainte auto-imposée qui les motive à explorer au maximum les possibilités de leurs kits respectifs relativement basiques.

On aura ainsi droit à un paquet de nuances rythmiques sur lesquelles se poseront des voix que l’on perçoit issues d’un langage imaginaire bercé d’onomatopées parfois déclamées en canon. Si une complicité évidente se dégage de leur association aussi improbable qu’étrange, on se demande tout de même de quelle manière elles parviendront à faire évoluer leur univers sans une aide instrumentale extérieure.

Cela faisait plus de deux ans que l’on attendait la venue de The Julie Ruin en Belgique. Leur concert prévu lors des Nuits du Bota en 2014 avait en effet été annulé en presque dernière minute suite à la maladie de Lyme dont Kathleen Hanna souffrait. L’ex-chanteuse de Bikini Kill et Le Tigre a donc fait contre mauvaise fortune bon cœur et suivi les conseils de son médecin en suivant le traitement que celui-ci lui recommandait. Bien lui en a pris, elle est désormais débarrassée du fléau et a célébré sa victoire en enregistrant “Hit Reset”, le deuxième album du groupe.

Un album aux contours rugueux comme va le démontrer le titre d’intro, “I Decide”, balancé à du cent à l’heure et boosté par une chanteuse dans une forme olympique (c’est le mot). Vêtue d’un body, elle va peaufiner sa condition physique en sautillant, gesticulant et répétant des chorégraphies imaginaires. Une performance vu son âge (48 ans, elle le répétera nombre de fois), son passé récent et l’intensité avec laquelle elle déballe ses textes. Un nerveux “I’m Done” et un “Record Breaker” empreint de colère au travers d’une voix nasillarde enfantine vont le confirmer dans la foulée.

Ceci dit, elle n’est pas la seule à se produire sans la moindre honte. Le claviériste barbu et chevelu Kenny Mellman arbore un magnifique ensemble short et t-shirt coloré à l’effigie d’un dauphin. Il s’agit à n’en point douter de la seconde force créatrice du groupe. Ses nappes font en effet mouche (“Time Is Up”, “Mr. So & So”), à l’instar de ses parties vocales (“South Coast Plaza”, l’excellente cover de Courtney Barnett, “Pedestrian At Best”). Il va également décocher des piques à Kathleen Hanna qui ne va pas se priver de lui répondre du tac au tac.

Celle-ci va ainsi abondamment converser entre les morceaux, même si son accent US prononcé couplé à un débit ultra-rapide vont nous priver d’une partie des succulentes anecdotes partagées ce soir (elle se trouvait notamment dans le même magazine que le chanteur d’Extreme au début des années 90, elle a fréquenté pas mal de toxic friends,…). Pendant ce temps, les trois autres membres du groupe passent au second plan, à commencer par la guitariste Sara Landeau et la bassiste Kathi Wilcox (une ex de Bikini Kill également) même si son instrument fera fureur sur “Hit Reset” notamment. Quant au batteur Carmine Covelli, on a l’impression que c’est lui qui gère ce petit monde de derrière son kit.

Musicalement, des titres comme le très surf rock “Planet You” ou un “Rather Not” à la vibe 60s font le boulot, tout comme des extraits de la première incarnation du groupe dans les années 90. À l’époque, il s’agissait d’un projet solo de Kathleen, mais l’enlevé “A Place Called Won’t Be There” ou un plus introverti “Apt. #5” restent toujours d’actualité. Sans surprise, “Oh Come On”, le hit du premier album dans une version particulièrement puissante, mettra un terme au set principal.

Avec “Let Me Go”, les rappels débuteront de mélodieuse manière avant de faire souffler un vent de révolte dans la Rotonde au son de “Rebel Girl”, un des titres de Bikini Kill, récemment ressuscité pour la BO du film Captain Fantastic. Une tuerie qui n’a pas pris une ride…

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