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TANGERINE DREAM – Tyger

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En 1987, Tangerine Dream affiche déjà 20 ans d’existence, ce qui le place parmi les groupes les plus vénérables de la scène rock électronique des années 80. Aucun groupe allemand n’affiche une telle longévité, ni un tel palmarès d’albums, dont certains sont souvent allés très loin en termes d’expérimentation et d’aventures sonores.

Même avec toutes ces années de carrière accumulées derrière lui, Edgar Froese, leader de Tangerine Dream, est toujours à la recherche d’une nouvelle idée originale, d’un nouveau concept qui permettrait de réaliser un autre disque toujours plus novateur ou déstabilisant que le précédent. Après avoir réalisé des musiques de film (“Sorcerer”, 1977), écrit des morceaux inspirés des grands parcs urbains du monde entier (“Le parc”, 1985) ou de don Quichotte (“Quixote”, 1980, devenu “Pergamon” en 1986) et avoir osé jouer des concerts de l’autre côté du Rideau de Fer (“Poland: the Warsaw concert”, 1984), Tangerine Dream continue de parcourir les années 80 en imaginant mettre en musique certains poèmes de William Blake (1757-1827), monument de la littérature anglaise avec Shakespeare ou Lord Byron.

Cette idée est au centre de l’album “Tyger”, qui sort en 1987. Pour ce faire, Edgar Froese et ses camarades Chris Franke et Paul Haslinger ont recours aux services de la chanteuse américaine Jocelyn B. Smith. Celle-ci vient de la scène jazz et R’n’ B et a quelques difficultés à entrer dans les textes quelque peu ardus de William Blake. Les séances d’enregistrement qui se déroulent à Berlin et à Vienne en février 1987 ne sont donc pas de tout repos pour Tangerine Dream, qui passe à de nombreuses reprises au ras du clash avec la chanteuse.

Autre défi, la présence d’une chanteuse sur un album de Tangerine Dream, justement. Pour le fan irréductible de Tangerine Dream, un album de son groupe culte avec du chant, c’est un peu comme Bob Dylan étant passé à la guitare électrique en 1965 ou Metallica étant entré au service de Lou Reed pour un album complètement avant-gardiste : le scandale à l’état pur. C’est donc une certaine polémique qui s’installe autour de “Tyger” lors de sa sortie : il y aura toujours les supporters et les opposants dès qu’on parle de cet album. La critique a d’ailleurs été à l’époque assez difficile envers “Tyger”, y voyant un album raté et à côté de la plaque.

Pourtant, un quart de siècle plus tard, il n’est pas inutile de revenir sur ce disque pour l’évaluer avec le recul nécessaire. Ce que cet album a pu garder en termes de force évocatrice, c’est précisément ces textes poétiques interprétés par une chanteuse à grande voix. Il s’en dégage immanquablement une certaine noblesse. Ceux qui n’aiment pas le chant, par contre, peuvent se tourner vers les parties purement instrumentales, qui occupent aussi une part non négligeable de l’album. Certains passages de synthétiseurs, comme dans “London” ou “Alchemy of the heart” sont tout simplement fascinants et restent parmi les choses les plus solides composées par Tangerine Dream. Ce qui a par contre un peu vieilli, c’est le son de la batterie électronique, qui évoque immanquablement ce son des années 80 qui a rapidement été ringardisé dès l’aube des années 90.

Mais dans l’ensemble, il faut considérer “Tyger” comme l’un des albums les mieux pensés de la discographie tangerinienne des années 80, et un disque qui mérite complètement considération et respect. C’est le dernier album où figure Chris Franke, qui quitte Tangerine Dream à la fin des années 80, après 18 ans de bons et loyaux services. Le label Esoteric Recordings, par le biais de sa filiale Reactive, publie une nouvelle réédition de cet album, assortie de deux bonus (“Vigour” et une autre version de “Tyger”, sortis à l’origine sur un EP en 1987 et inédits en CD).

Pays: DE
Reactive EREACD 1030
Sortie: 2012/05/25 (réédition, original 1987)

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