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Le monde enchanté de LONEY, DEAR

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Quelques semaines après avoir joué au Witloof Bar du Botanique, Emil Svanängen aka Loney, Dear était de retour en Belgique, mais au Club de l’AB cette fois. C’est donc dans une salle plus en rapport avec ses ambitions que le Suédois a poursuivi la présentation de son dernier album en date, “Hall Music”, ce samedi 28 janvier.

Dans un style troubadour, il avait confié à Charles Frail la mission d’introduction de la soirée. On a ainsi vu apparaître sur scène un jeune homme à la démarche timide et à l’allure intello (le costume et les lunettes à l’épaisse monture font beaucoup), une simple guitare acoustique à la main. Si l’on y ajoute une entrée en matière maladroite traduite par un démarrage de projection récalcitrant, on ne s’attendait pas à assister à une grande prestation. Et pourtant…

En effet, lorsqu’il commence à chanter, on a l’impression d’avoir un autre homme devant nous. Il prend comme par enchantement de l’assurance et sa voix singulière, légèrement tremblotante à la manière d’un Nick Drake, habille des compositions mélancoliques enivrantes de douceur et de simplicité. L’originalité visuelle réside dans une mise en scène préalablement filmée pendant laquelle on voit l’artiste en train de s’appliquer à repasser du tissu, coudre et manuellement mettre en forme ce qui deviendra la pochette de “Morning, It Breathes”, son premier album dont il réalisera manuellement 500 exemplaires (le produit fini étant visible au stand merchandising).

En parallèle, les textes de ses compositions défilent à l’écran, presque à l’image d’un karaoké. Même si cela reste artisanal et pas toujours synchro, cela permet aux spectateurs de rentrer plus facilement dans son univers d’artiste. Encore que, lorsqu’il décide de chanter un titre à la place d’un autre, on pourrait lui suggérer d’interrompre la projection plutôt que de perturber inutilement l’assemblée. Cela dit, cette prestation attachante d’un personnage qui l’est tout autant a imposé le respect.

“Hall Music”, le sixième album de Loney, Dear, marque le retour du groupe suédois à géométrie variable qui s’était fait anormalement discret depuis “Dear John” (2009). Emil Svanängen a repris sa plus belle plume pour composer une dizaine de nouveaux titres encore plus à fleur de peau que par le passé, interprétés avec la sensibilité qui est devenue au fil du temps sa marque de fabrique.

C’est d’ailleurs avec “Name”, la plage d’intro de cette nouvelle plaque, que les festivités vont débuter. Paradoxalement, bien que le leader (un rien négligé, en t-shirt blanc, cheveux en bataille et présentant un léger embonpoint) arbore un visage grave, il va abondamment dialoguer entre les morceaux, adoptant un humour accessible et bon enfant. À ses côtés, pointons notamment un batteur pince-sans-rire au possible et une claviériste dont la douce voix apporte une certaine richesse aux compositions.

Hésitant continuellement entre position assise et debout, Emil Svanängen va toutefois se concentrer sur sa douze cordes qu’il quittera l’espace d’un prenant “Calm Down” au piano. Mais c’est surtout sa voix modulable à souhait qui impressionne (“D Major” interprété d’une impeccable voix haut perchée à la Bee Gees valait le déplacement) et véhicule des émotions à l’instar d’un Jasper Steverlinck par exemple (“Young Hearts”). Toutefois, s’il fallait comparer Loney, Dear à un groupe, ce serait plutôt Guillemots que l’on choisirait tant l’imaginaire prend une place importante.

Ainsi, entre des comptines qui laissent entrevoir un monde idéal (“I Was Only Going Out”) et des mélodies hors du temps (“My Heart”), on reste fasciné par une maîtrise et une mainmise parfaite sur une assemblée captivée. Même lorsqu’il lui manque un instrument (mais où est dont passé son harmonica ?), il parvient à s’en tirer avec les honneurs (le très beau “I Am John”). Et que dire d’“I Dreamed About You” qui va clôturer le set principal en indiquant la direction qu’aurait prise Kraftwerk si ces derniers n’avaient pu brancher leurs claviers sur secteur, ultime preuve qu’“Hall Music” se révèle véritablement sur scène.

Ceci dit, les rappels seront intégralement puisés dans son back catalogue, dont on retiendra surtout un troublant “Harm / Slow”, un “Saturday Waits” de circonstance et un “Sinister In A State Of Hope” qui en fera frémir plus d’un. Plus qu’un concert, c’est un moment que Loney, Dear a offert à l’AB Club, tout en générosité. S’il repasse dans le coin prochainement, vous savez ce qu’il vous reste à faire…

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