JUCKER, Louis – Something went wrong
On ne sait pas ce que Louis Jucker veut dire par le titre de son nouvel album solo ʺSomething went wrongʺ. Quelque chose a foiré, mais quoi ? Notre monde en général ? La vie de ce musicien suisse ? On ne sait pas mais toujours est-il que ce nouvel album acoustique appelle au questionnement à travers les propres interrogations posées par Louis Jucker sur ce disque délicat et fragile.
Louis Jucker, on commence à connaître un petit peu. L’homme est actif depuis une dizaine d’années sur le front du rock indépendant suisse, et très prolixe sur de nombreux projets, que ce soit en solo (ʺThe black lakeʺ), ou en association avec des formations comme Coilguns (ʺMillenialsʺ, ʺKrakeslottetʺ), The Ocean Collective, Kunz, The Fawn ou comme producteur (Emilie Zoé, Cochon Double). Il a quand même pris un peu le temps récemment de revenir vers sa carrière solo en accouchant de cet album d’obédience majoritairement acoustique, à l’atmosphère retirée et propre à l’introspection.
Retiré, c’est le mot puisque c’est dans un chalet de Villa, au sud de la Suisse pas loin de la frontière italienne, que Louis Jucker couche sur un magnétophone huit-pistes une dizaine de chansons originales. Seule une d’entre elles est adaptée d’un poème d’Iona Kewney (ʺShy of fireʺ). Pour le reste, c’est Louis Jucker qui compose, joue de tous les instruments (principalement de la guitare sèche) et ajoute des collages sonores sur la bande.
Le dépouillement sonore de l’ensemble permet de se confronter aux seules mélodies brisées et fiévreuses de la guitare, sur laquelle Louis Jucker pose une voix chancelante, touchante par sa fragilité et l’émotion qu’elle suscite. Seul un titre plus assertif mené par de grosses rythmiques à la Brant Bjork (ʺThe damʺ) vient plaquer un semblant de force dans cet ensemble dédié à la mélancolie pastorale (ʺLosing hairʺ, ʺI hate to hurt the hearts I eatʺ). L’économie de moyens est précisément ce qui constitue l’âme de ce disque qui nous balance des tonnes d’émotion en pleine face. Le dernier morceau ʺTo the originʺ (écrit pour un film de Filippo Filliger de 2018 portant le même titre) touche au cœur par la simple aridité de son atmosphère et son fading terminal qui fait disparaître peu à peu la mélodie vers le silence.
Simple, modeste et dénudé, cet album (au livret CD néanmoins luxuriant) est l’album du confinement qui a mis cette année 2020 sur le bord de la route qui mène à la vie. À écouter le nez derrière la vitre en regardant tomber la pluie ou paumé au sommet d’une colline quelque part dans une montagne déserte.
Le groupe :
Louis Jucker (tout)
L’album :
ʺ31 Years of Waiting for Thisʺ (03:28)
ʺOur Easter Weddingʺ (02:18)
ʺShy of Fireʺ (02:55)
ʺThe Heat / Hello Weirdoʺ (03:15)
ʺResilienceʺ (02:32)
ʺLosing Hairʺ (04:34)
ʺThe Damʺ (02:14)
ʺI Hate to Hurt the Hearts I Eatʺ (04:24)
ʺHalf a Kid and Meʺ (03:46)
ʺTo the Originʺ (04:45)
https://louisjucker.bandcamp.com/album/something-went-wrong
Pays: CH
Hummus Records
Sortie: 2020/10/30